Avoir un bébé c’est l’un des plus beaux cadeaux que l’on puisse avoir; c’est la raison pour laquelle il est quelques fois difficile de s’en séparer même pour dormir. Il est vrai que certaines mamans gardent leur enfant dans leur lit parce qu’elles ont peur que quelque chose ne leur arrive durant le sommeil (par exemple la mort subite du nouveau-né). D’autres mamans par contre, pour éviter de se lever fréquemment la nuit pour allaiter ou leur donner le biberon, préfèrent garder leur enfant tout près d’elles, car c’est plus commode. Mais il y a le revers de la médaille : l’enfant s’habitue très rapidement à dormir avec ses parents, si bien que le jour où vous décidez de le remettre dans son lit, il fait très vite la différence, car il lui manque cette chaleur dont il a l’habitude ; et du coup il ne dort pas longtemps et parfois se réveille presque instantanément au contact de son lit lorsqu’il constate qu’il est tout seul. Et très souvent, ce qui se passe, l’enfant pleure des heures durant. Il est vrai, ce n’est pas chose faisée d’entendre son petit bout pleurer sans réagir et le problème relatif au sommeil des enfants stresse énormément les parents.
Une fois les causes médicales écartées, il faut chercher du côté psy pour comprendre ce qui se passe, nous dit Madame Malika Chougare (psychologue clinicienne et spécialiste des problèmes de la petite enfance et de l’adolescence). Voici ses réponses.
Le Midi Libre : Qu’est-ce que le sommeil chez l’enfant et comment expliquez vous ce rituel ?
Madame M. Chougare : Il faut tout d’abord, rappeler que dormir n’est pas une affaire purement physiologique, c’est aussi un mode de rapport enfant-adultes. Le réglage du sommeil (heure du coucher du soleil, nombre d’heures, etc.) est lié dés la première année à la sensation de satiété, de faim, de propreté…. Vers la deuxième année, la qualité du sommeil change, il peut être perturbé et s’accompagné de rituel d’endormissement (succion du pousse, balancement, etc.) visant la maîtrise de l’angoisse. Vers trois ans, l’enfant commence à faire des rêves et son sommeil peut s’accompagner de cauchemars et de terreur nocturnes. Enfin, à partir de six ans, il dort de manière plus stable et sacralisé. Ces étapes et ces particularités sont normales et ne doivent pas inquiéter les parents qui se demandent à quel age ils peuvent mettre leur enfant dans une chambre à part
A partir de quel âge l’enfant peut-il dormir seul ?
En fait, pas de réponse standard à cette question, car cela dépend de la personnalité de chaque enfant et de chaque parent (mère surtout), du mode d’éducation, du type de relations affectives et des conditions socio-économiques et culturelles du milieu familial. Par exemple, un enfant nourri au sein longtemps aura plus de mal à se séparer de sa mère donc à dormir seul que celui qui est passé au biberon et à la cuillère plutôt un enfant fragile, malade unique ou sans fratrie reviendra plus longtemps l’attention des parents qu’un autre. Celui qui est élevé dans une famille nucléaire (parents + enfants) réagira différemment de celui qui est dans une grande famille (grand-parents, tante, oncle, etc). En général, on peut dire que l’idée de dormir seul est assez répondu dans notre société, surtout dans les familles modestes et rurales, mais cela doit être encourager à chaque fois que dans la maison, il y a une chambre où l’enfant peut s’isoler et organiser son intimité.
Si les parents sont assez attentifs, aimant sans être possessif, ils sauront repérer ce moment grâce à leur sens des réalités, à leur souplesse éducative, ils pourront accepter de voir leur enfant grandir et s’éloigner d’eux, ce qui n’est pas toujours facile, éduquer n’est pas seulement aimer, mais aussi savoir éviter à frustrer et être frustré.
Si cela conduit à des réactions négatives, que faut-il faire ?
Cela peut, certes, conduire à des réactions négatives (pleurs, chagrins, agitation, opposition) face à ce changement ressentir comme un abonda, une éviction de l’espace parental intime. Ce sentiment peut exacerber les frayeurs infantiles (peur du noir, des fantômes, de l’orage, des voleurs, des animaux, etc.), d’autant que pour certains auteurs, le moment du sommeil peut être vécu comme l’entrée dans un monde inconnu et dangereux. En parler avec lui d’abord à partir de trois ans, il peut déjà comprendre cela, des avantage de tel événement, par exemple : il est grand à présent, il a besoin de plus d’espace, plus de liberté, il faut la convaincre et non contraindre. Il y a lieu aussi d’éviter de procéder à ce changement parce qu’il y a un nouveau-né qui arrive et qu’il doit céder sa place. La réaction de celui-ci pourrait être un sentiment de rejet, d’agressivité, de rancune envers le petit frère ou petite sœur. Eviter aussi cette situation si la famille vit déjà des moments pénibles, difficiles : maladie, deuil, absence, éloignement de l’un des membres considérés déjà comme facteurs de stresse. Une fois ces facteurs maîtrisés, stabilisé, préparer la chambre avec l’enfant, l’encourager à la décorer comme il veut avec des objets, des jouets qui lui sont chers (ours en peluche, petites voitures, bouts de tissu, de ficelle, vêtements particuliers, etc.). Ces objets qu’on appelle «transitionnels constituent des antidotes contre l’angoisse dépressive provoquée par les absences de la mère.
Pour maîtriser cette angoisse, l’enfant recourt à d’autres comportements tels que les rituels d’endormissement. Ces rituels doivent être respectés tant que l’enfant ne s’est habitué à sa nouvelle vie. En fin, accepter d’accompagner l’enfant dans son sommeil, ses réveils et ce, pendant quelques jours, voire quelques semaines, en :
lui faisant des câlins ;
en lui parlant d’une manière rassurante ;
en lui racontant une histoire qu’il aime bien ;
Si malgré toutes ces précautions, l’enfant n’est pas apaisé, faut-il s’inquiéter et consulter un psychologue ?
Si toutes les précautions ne suffisent pas à apaiser l’enfant et à lui traverser cette période surtout chez celui qui est scolarisé on peut suspecter :
de sérieux désordre émotionnels, des incohérences éducatives au sein de la famille, des problèmes à l’école avec les camarades, les enseignants, difficultés d’apprentissage source d’anxiété chronique, de stresse de performance…
Aussi, il faut chercher d’éventuels troubles associés (cauchemars, récurrents, phobies diverses, hyper activité ou inhibition, retrait social, refus de jouer, etc.). Si tel est le cas penser alors à consulter, à se faire aider (psychologue, médecin, pédopsychiatre.)
Quel est l’avantage de ce changement pour l’enfant ?
Quitter la chambre des parents, cet espace sécurisant, le premier très chargé émotionnellement après celui de l’utérus peut s’avérer difficile mais nécessaire. Accepter les absences de la mère en particulier la nuit, permet le passage d’une relation fusionnelle à une relation interpersonnelle. C’est pour l’enfant l’occasion de se gorger un moi fort et autonome, de construire son identité propre. Seule condition pour que celui-ci continue à s’épanouir normalement.