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Le Midi quatorze heures
It’s here
12 Juin 2010

C’est ici. En Afsud. 1990, 1994, 2004, 2010. Rencontre avec le destin. Quatre étapes symboles. Messages. Rencontre avec le rêve. Jeudi, la veille du plus grand évènement jamais vécu par le continent africain, Desmond Tutu, Prix Nobel de la Paix et héros de la lutte anti-apartheid, ami intime de la légende Mandela, père de la Nation, privé de la fête par la mort de son arrière-petite-fille, tuée dans un accident de voiture à quelques heures du coup d’envoi, disait qu’il vivait «un rêve» avec le Mondial de football. Non sans se laisser aller à cette prose qui fera sûrement école. Fera le tour des écoles du monde entier. «Nous voulons dire au monde que cette chenille laide, si laide, que nous étions, est devenue ce papillon si joli, si joli !», a continué l’ancien archevêque anglican du Cap, en référence à la chute de l’apartheid, il y a seize ans. Quatre ans à peine après la sortie de prison, en 1990, du leader Mandela, icône de la liberté et de la réconciliation, qui mènera, vingt longues années durant, à partir de sa prison, une révolution unique aboutissant, en 94, à un vote historique réunissant en des urnes inédites, les Noirs et les Blancs pour donner naissance à cette nation «arc en ciel» qui permet aujourd’hui au reste de l’Afrique de continuer, avec l’ouverture solennelle du premier Mondial jamais organisé sur le continent, son rêve de libération. Dans tous les sens du mot. Un rêve qui prendra forme en 2004 quand la Fifa, cédant enfin face au charisme de… Mandela, qui pèsera de tout son poids, rectifiera le déni de justice d’un précédent vote. "L’Afrique, berceau de l’humanité", comme le rappellera Tutu, tenait son rêve. Pouvait rêver. Une autre barrière, après la bête immonde qu’est le racisme, vient de tomber. Le rêve était là, à Soweto, quand la star colombienne, Shakira, devant des milliers de spectateurs en transes, allumera le feu dans un concert unique en avant-goût de la fête grandiose qui attend le pays pendant les quatre semaines de compétitions. En même temps qu’au Cap où les Sud- Africains ont honoré leur libérateur là où il prononcera, vingt ans plus tôt, son premier discours d’homme libre. Avant qu’à Soccer City, le premier coup de sifflet d’un Mondial «noir» ne soit officiellement donné sous la forme d’une superbe, grandiose, cérémonie d’ouverture d’une demi-heure animée par 1.500 artistes, dont notre Khaled national. Pour sceller, définitivement, une expérience unique. Un mois pas comme les autres. Durant lequel le reste du monde, grâce à un ballon tournant enfin rond, rendra justice à un continent portant sur lui toutes les misères du monde. Racisme, esclavagisme, colonisation et toutes les tares d’un capitalisme au visage inhumain. Déclinant. En crise. Fin d’une époque, le début d’une ère nouvelle pour une Afrique en marche. Qui prend sa revanche sur le sort et l’histoire. L’Afrique, symbole de la misère. Mais aussi de la résistance permanente. Belle réponse que ces trente minutes de rêve dans un «Soccer City» figurant déjà au Panthéon. La preuve par la fête et la joie que l’Afrique est majeure. Capable d’exploits.
La preuve par ce stade jouxtant l’ex-ghetto de Soweto, terre de tous les combats, aujourd’hui plus grand que le monde le temps d’une reconnaissance unanime, que le continent noir n’est finalement pas que pauvreté et maladies. Un terrain de foot, une passion dévorante, un symbole politique, un jeu imprégnant la terre entière à l’heure de la mondialisation rampante. It’s here. C’est ici l’Afrique du Sud. Pour dire qu’elle ne se fera pas sans nous. Et un premier match, décisif, de gagné. À d’autres victoires.

Par : Abdelaziz Azizi

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