Vingt équipes seront conviées en France du 7 septembre
au 20 octobre 2007 pour y disputer la phase finale de la Coupe du monde de rugby. Midi Libre consacre, à partir d’aujourd’hui et ce, jusqu’à
la fin de la compétition, une page spéciale pour ce sport collectif de combat tout en espérant qu’il fera bientôt son entrée officielle en Algérie.
La France gagne le vote contre l’Angleterre
Opposée à l’Angleterre en 2003, la France a largement gagné la bataille du vote organisé pour la Coupe du monde de rugby 2007: un succès par dix-huit voix contre trois. Architecte de l’épreuve en 1987, la France l’organisera pour la première fois vingt ans plus tard, dans les mêmes stades qui avaient abrité la Coupe du monde de football en 1998.
L’Angleterre contre la France ou l’inverse. Par les temps qui courent, c’est une sorte de classique. Dans le domaine politique, parfois (on en a eu un exemple tout récent), dans le domaine sportif, plus souvent. Cette fois, les deux pays se battaient pour la compétition imaginée par les Français, mais toujours organisée par des pays anglo-saxons.
Au-delà de la bataille pour l’organisation elle-même, deux conceptions se retrouvaient face-à-face: l’anglaise, plus élitiste, la française, plus mondialiste. Principale différence: la proposition anglaise visait à réduire le nombre des engagés, seize contre vingt actuellement (la prochaine édition se déroulera cet automne en Australie), tandis que la française suggérait de ne rien changer afin d’élargir le champ d’un sport cantonné depuis de nombreuses années aux mêmes pays. Les Anglais n’étaient pas contre l’idée d’organiser une seconde compétition, de deuxième division en quelque sorte.
Deux conceptions du sport presque en contradiction, les premiers étant pour le «restons entre nous», les seconds étant favorables à un élargissement qui pourrait accélérer le développement d’un sport longtemps figé dans ses bases traditionnelles. Les Français ont souhaité donner un signe fort aux moins compétitifs, dans l’espoir d’attirer d’autres nations dans ce sport qui a beaucoup perdu de ses spécificités rurales depuis une dizaine d’années, pour devenir, dans son essence, un sport plus universel.
Les stades de la Coupe
du monde de football 1998 seront utilisés pour le rugby
Vingt équipes seront donc conviées à venir en France du 7 septembre au 20 octobre 2007. Les quarante matches du premier tour se dérouleront à Lens, Paris, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Marseille, Lyon et Saint-Etienne, mais également à Cardiff (Pays de Galles), Dublin (Irlande) et Edimbourg (Ecosse). Deux quarts de finale auront lieu au stade de France, un autre à Marseille et le dernier à Cardiff. Les demi-finales, match de classement et finale seront joués au stade de France, à Saint Denis.
Les règles du jeu (1re partie):
Le rugby ? «C’est la guerre du feu» en a dit un jour l’ancien international français Pierre Albaladejo. Ce n’est pas aussi simple… Débordant de règles, de temps de jeu différents, par l’engagement physique impitoyable et cependant terriblement codifié de ses participants, le jeu à XV déroute parfois le spectateur non initié. Voici ce qu’il faut savoir d’un sport à nul autre pareil…
Le terrain :
Le jeu de rugby se déroule sur un vaste rectangle d’herbe de 100 m de long et de 70 m de large au maximum. Deux en-buts de 10 à 22 m, situés à chaque extrémité de l’aire de jeu, sont l’espace où doivent être aplatis les essais. La ligne de but est dans l’en-but. Par contre, la ligne de ballon mort, qui délimite l’espace placé après la zone d’essai n’est pas dans l’en-but. De chaque côté du champ de jeu, une ligne définit la touche. Cette dernière n’est pas considérée comme faisant partie du champ de jeu. La hauteur minimum des poteaux de but est de 3,4 m. La distance entre eux est de 5,6 m.
Le ballon :
Il doit être ovale et composé de quatre panneaux. Sa longueur : de 280 à 300 mm . Pouvant peser de 410 à 460 grammes, il peut être en cuir ou en matériau synthétique.
Histoire du rugby :
un certain M. Ellis (1re partie)
On sait que le rugby, sport collectif, est né en Angleterre à la fin du XIXe siècle. Ce sport, héritier de pratiques villageoises collectives comme la soule était alors majoritairement pratiqué dans les universités et collèges par des jeunes gens issus des meilleures familles britanniques. Kicking, hacking, tripping étaient autorisés… c’est-à-dire l’usage des pieds contre tout ce qui n’était pas la balle… L’histoire officielle nous parle de M. William Webb Ellis, qui, un beau jour de 1823, empoigna le ballon pour aller le déposer dans le but adverse… La légende du rugby, sport de voyous joué par des gentlemen était née. Webb Ellis (1807-1872), «l’inventeur» du rugby, est enterré à Menton (sud de la France ).
(Photo : Ville de Menton)
La petite cité de Rugby dans le Warwickshire (centre de l’Angleterre), sur la rivière Avon est l’une de ces prestigieuses villes universitaires britanniques, située à mi-chemin d’Oxford et de Cambridge. Les élèves y aiment les fêtes et la boisson ; ils y jouent à des jeux de balle, dont le football : deux groupes de collégiens s’y affrontent, les uns portent des petites casquettes et les autres des hauts-de-forme. Ils s’efforcent de faire passer un ballon au milieu des barres d’un but en forme de H. On ne peut saisir le ballon à la main que pour le transmettre à l’arrière, à un équipier qui pourra le frapper au pied. A cette époque il est courant de voir des rencontres opposant 40 grands élèves à 200 plus jeunes se dérouler sur des terrains de 4 ha… L’histoire officielle dit que c’est là, sur le bigside, le terrain de jeu de l’école, qu’en 1823, un élève de 16 ans assez culotté, William Webb Ellis, transgresse toutes les règles, prend le ballon à pleines mains et va le déposer derrière la ligne du but adverse. Le geste d’Ellis entre peu à peu dans les mœurs du collège de Rugby dans les années qui suivent. Et d’autres universités britanniques intègrent la nouvelle règle – qui introduit de la vivacité et de la dextérité — dans leur manière de jouer au football. Le premier club officiellement reconnu naît à Cambridge en 1839, le Guy’s Hospital. Mais d’autres clament également la paternité du rugby : les Ecossais, qui donnent comme père du jeu à la main un certain Jim Mackie et surtout les Irlandais, avec le cad, un jeu pratiqué par des cousins d’Ellis… et qui aurait influencé le jeune élève turbulent de Rugby.
L’école de rugby
Fondée en 1567, l’école de rugby est l’une des neuf grandes écoles privées d’Angleterre, les public schools. L’un des plus célèbres directeurs de cette école a été sans conteste Thomas Arnold entre 1828 et 1841. Grand réformateur, il a exercé une influence sans précédent sur le système éducatif anglais. Le sport et le fair-play comptaient beaucoup pour lui. Par ailleurs, il encourageait les élèves à prendre des responsabilités. Aujourd’hui, l’école continue d’offrir des bourses aux élèves les plus talentueux des écoles publiques de la région et finance entièrement, par le biais de la fondation Arnold, les études d’étudiants étrangers à Rugby.
Vessie de porc
En tout cas, en 1846, Thomas Hugues, écrivain et homme de loi, pose les bases du rugby moderne. Son ouvrage définit les trente-sept règles du rugby-football. Et notamment les positions sur le terrain de jeu : il y a déjà, les avants, agressifs, chargés de la conquête du ballon, les demis, qui orientent le jeu et les arrières, dont la rapidité et l’agilité doivent les mener à l’essai. Le ballon est souvent une vessie de porc emplie de son et recouverte d’une enveloppe de cuir. La forme ovale ne s’impose pas d’emblée. Décembre 1863 marque la sécession définitive des tenants du rugby-football d’avec les partisans du football-association, le dribbling game, l‘ancêtre du football moderne qui ne se joue qu’avec les pieds. Les rencontres de rugby d’alors se jouent à vingt joueurs et les mêlées restent encore des moments d’intense violence. L’année 1871 est cruciale : en janvier naît la RFU, la première fédération du ballon ovale et en juillet de la même année, celle-ci accepte de nouvelles règles. Celles-ci imposent le placage à la place du controversé hacking, font disputer une mêlée après chaque faute et pénalisent les hors-jeux. Le premier match « international » se tient aussi cette année-là : l’Ecosse gagne face à l’Angleterre une transformation à zéro. Le succès du rugby est dès lors phénoménal. En 1883, naît un tournoi opposant les quatre équipes britanniques, Angleterre, Ecosse, Pays de Galles, Irlande.
Le monde devient ovale
Un succès qui ne va pas sans poser le problème de la rémunération des joueurs en raison de l’amateurisme affiché par les différents clubs. Certaines équipes du Nord de l’Angleterre fondent la Northern Football Union en 1893. Et celle-ci autorise les équipes qui y sont affiliées à indemniser les joueurs – souvent ouvriers — pour le manque à gagner causé par la journée de championnat. Une scission qui sera, plus tard, à la base de la naissance du rugby à XIII. En 1910, l’instance supérieure du rugby, l’International Rugby Board (IRB) -créée en 1880- autorise le XV de France à jouer dans le tournoi britannique. Un tournoi gagné pour la première fois par les Français en 1954 (victoire partagée avec l’Angleterre et le Pays de Galles). Au début du XXe siècle, la diffusion du rugby se fait majoritairement dans les pays de culture anglo-saxonne (Australie, Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande…) mais aussi en Argentine, en Roumanie, dans le Pacifique... La première Coupe du monde de la discipline est organisée en 1987 en Nouvelle-Zélande et en Australie (victoire des Néo-Zélandais sur la France par 29 à 9). En 1995, le professionnalisme gagne le rugby. C’est à partir de ce moment que le rugby entre dans une autre histoire : les rugbymen, devenus pros, intègrent, comme au foot, la logique de la concurrence sur le marché des joueurs… Les clubs, de leur côté, ne représentent plus un terroir, mais souvent l’image d’un sponsor… L’argent coule en abondance. Les compétitions évoluent elles aussi : une coupe d’Europe des clubs naît l’année même de la professionnalisation du ballon ovale et en 2000, le tournoi des Cinq nations devient celui des Six nations avec l’intégration de l’Italie. Le rugby, devenu pro et formaté pour la télévision, va-t-il séduire tout le monde ?