Ce fut un défenseur de talent très technique et coriace malgré sa petite taille et sa silhouette d’apparence frêle. Il a fait les beaux jours du grand Chabab de Belcourt (CRB) et de l’EN des années 70 et 80. Il a aussi fait un passage à l’USMA et à l’O Médéa. Latéral gauche de charme, Mustapha Kouici, 60 ans, à présent, paraît toujours jeune d’esprit et ne fait pas du tout son âge. Sa passion pour le football demeure intacte.
Midi Libre : Votre avis sur la saison pénible que vient de réaliser votre club de toujours, le CRB...
Mustapha Kouici : La saison a été catastrophique, c’est le moins que l’on puisse dire. L’équipe est passée à côté. Aucun fond de jeu, aucune ambition et des joueurs qui n’ont pas été, pour la plupart, à la hauteur de porter les couleurs de ce grand club au passé glorieux.
La crise financière aiguë a fini par se répercuter sur les résultats de l’équipe…
Exact ! Comme ont dit, l’argent est le nerf de la guerre, de surcroit pour un club dit professionnel. Mais, il n’y a pas que ça. Le CRB était en retard sur tous les plans. Préparation, recrutement, etc. La crise financière était énorme. Ce qui a poussé certains joueurs importants à quitter le club, à l’image d’Ousserir.
Le CRB a heureusement réussi tout de même à éviter la relégation, grâce à des hommes qui n’ont jamais cessé de le servir à chaque fois qu’il a eu besoin d’eux dans les moments difficiles. Le président du club, Réda Malek, a été courageux envers un CRB en crise, qui était, et je peux le dire sans détour, à... la rue. Il a su faire démarrer le club et faire face avec bravoure au malaise qui y couvait.
Que faudrait-il au CRB pour qu’il retrouve son standing ?
Le Chabab doit avant tout s’organiser et mettre en place les structures adéquates qui lui permettront d’améliorer sa gestion sur tous les plans. Ensuite, faire en sorte de ramener des joueurs selon des critères bien définis. Ne joue pas au CRB qui veut ! Il faut mériter de porter le maillot du Chabab.
Comment se fait-il qu’un grand club aussi réputé que le CRB ne puisse pas attirer de grands bailleurs de fonds ?
Cela n’est pas en ce moment le propre du CRB, mais celui de la plupart de nos clubs. Ce qui se passe au Chabab avec le manque de résultats n’encourage pas les gens à y mettre leur argent. Je donne un exemple : Batimetal devait devenir un important partenaire du CRB.
Finalement, ses responsables ont fait faux bond parce que l’équipe jouait le bas du tableau. Pour son image de marque, cette entreprise a préféré, en fin de compte, sponsoriser la JSK qui cette saison marchait bien.
Comment se passent les choses pour vous en tant que DTS des jeunes au CRB ?
J’ai présenté un projet de travail concernant les catégories jeunes à Réda Malek et Mokhtar Kalem, qui les a intéressés. La formation fait partie de nos priorités. On veut inculquer aux jeunes joueurs de la nouvelle génération les valeurs du CRB pour construire l’avenir.
C’est une très bonne chose…
Cette saison, nous avons bien travaillé en jeunes catégories et je peux vous assurer que la pâte existe. Nous avons des jeunes qui ont des qualités auxquels je prédis un avenir radieux Inchallah. Il faut noter une chose…
On vous écoute…
Nous avons trouvé les jeunes du CRB dans une situation catastrophique. Notre constat a été franchement amer. On a fait de notre mieux pour organiser les choses en mettant de l’ordre. J’ouvre une parenthèse pour dire que la direction du club, avec à sa tête Réda Malek, a mis à notre disposition tous les moyens nécessaires. Le président a tenu ses promesses envers les catégories jeunes.
Il ne reste que la réception du centre de formation pour pouvoir mieux travailler, n’est-ce-pas ?
Une fois la disponibilité du centre de formation, les jeunes du CRB n’auront plus à souffrir du manque d’infrastructures pour s’entraîner à l’aise. Parce que, c’est le seul véritable épineux problème que nous avons rencontré cette saison. Le centre du Caroubier est dans un état lamentable. Ni vestiaires, ni électricité, ni eau et en plus, le terrain est toujours en tuf !
On attend avec impatience sa réfection, en attendant la réception du complexe sportif du club. Cet handicap de taille n’a pas empêché nos jeunes de rivaliser avec d’autres équipes mieux nanties. Pour preuve, on a une très bonne équipe minime qui a terminé 2e. Nos cadets et juniors ont terminé quatrième et les espoirs sixième. C’est franchement très encourageant. Cela dit, en tant que DTS, le résultat technique m’importe peu.
Que voulez-vous dire ?
Vous savez ce qu’on a fait cette année ? On a fait signer 24 joueurs de talent, des jeunes catégories, des précontrats. Huit en minimes, sept en cadets et neuf en juniors, pour ne plus avoir à vivre la déperdition des bons joueurs formés au club, qui doivent avant tout servir le CRB dans un premier temps et lui faire bénéficier le cas échéant de revenus financiers en cas de transfert. Voilà, entre autres, les aspects de la nouvelle politique mise en place par le club.
C’est la première fois que le CRB le fait, et le mérite revient à l’actuelle direction. D’ailleurs, on prépare une réception à l’hôtel Samitel en l’honneur des 24 joueurs des différentes catégories auxquels ont a fait signer des précontrats, plus les huit meilleurs élèves parmi nos jeunes éléments. Cela va les motiver et les encourager à persévérer. Cela prouve qu’il y a du sérieux au sein de l’équipe dirigeante conduite par Réda Malek.
On constate, par ailleurs, que le CRB ne fait que rarement appel à ses enfants…
Justement, on voudrait inverser cette tendance. Les anciens joueurs qui ont un bagage et une formation peuvent énormément apporter au Chabab, d’autant plus qu’ils ont un riche vécu et toujours cet amour sincère du club et la passion du foot.
Les vrais enfants du club n’ont jamais tourné le dos à leur équipe, quelles que soient les conditions. Faire appel à eux dans le futur fait partie des plans de l’actuelle direction. Pour les anciens qui manquent de formation et qui voudront s’impliquer, il y a un volet formation les concernant que le club prendra en charge. Je suis persuadé qu’on est sur la bonne voie au vu des projets ficelés et/ou en cours d’étude au profit du CRB.
Passons à l’EN. Quel est votre opinion sur les choix actuels de Vahid Halilhodzic ?
Personnellement, je n’étais pas d’accord pour 1, voire 2 éléments, mais dans l’ensemble, le groupe retenu est logique.
Peut-on avoir des noms ?
Je dis toujours qu’on s’est trompé sur Belfodil qui n’a pas été retenu. Je lui souhaite, néanmoins, de rebondir dans un proche avenir.
Pensez-vous aussi à Ferhat ?
Il n’y a pas que Ferhat mais aussi Khoualed qui a réalisé une saison pleine et qui dispose de qualités certaines lui permettant de prétendre prendre part du voyage au Brésil. Il y a, par ailleurs, le 24e joueur qui devra quitter ses camarades.
On parle de Guedioura aux dernières nouvelles. Moi, je pense qu’on se trompe sur Belkalem, qui a été blessé durant un bon moment de la saison et qui a peu joué, même si c’est un joueur de qualité que j’apprécie. J’estime qu’il aurait été plus judicieux de laisser la place à un autre joueur plus compétitif. Toutefois, on respecte les choix du sélectionneur.
Croyez-vous en cette Equipe nationale dans ce Mondial-2014 ?
J’ai toujours cru en la valeur de nos joueurs. On ne doit avoir peur de personne, et c’est d’ailleurs avec cet état d’esprit que l’EN-82 a battu la RFA. C’était notre mentalité à l’époque en sélection. Ni la Belgique, ni la Corée du Sud, ni la Russie ne doivent nous faire peur. Nos joueurs sont tenus de croire en eux et en leurs chances à jouer à fond. Ils doivent se mettre dans la tête qu’ils sont capables de rivaliser et de battre n’importe quel adversaire.
Si on n’a pas cet état d’esprit de gagneurs, je ne crois pas qu’on pourra faire quelque chose. L’EN devra faire en sorte de montrer un beau football, il s’agit du plus grand tournoi footballistique de la planète. C’est le monde entier qui regarde. Le prestige du pays est en jeu. Les joueurs y gagneront aussi sur le plan individuel avec les nombreux recruteurs qui seront à l’affût. C’est une bonne occasion pour l’EN et à chacun de nos joueurs de marquer l’évènement. Inchallah, ils vont nous régaler parce que tout un peuple est derrière eux.
Selon vous, quel onze présentera Halilhodzic le 17 juin face à la Belgique ?
Vahid dégagera son équipe en faisant l’analyse des deux matches amicaux contre l’Arménie que l’EN a gagné et face à la Roumanie ce mercredi, même si je suis persuadé qu’il a déjà l’équipe en tête à 90 %, le reste est en rapport avec les variantes de jeu, l’état physique de ses joueurs, etc.
Pour moi, ça sera comme suit :
Mbolhi, Mandi, Ghoulam, Medjani, Bougherra, Lacen, Bentaleb, Brahimi, Feghouli, Slimani, Soudani. Avec Taider, comme solution de rechange au milieu de terrain. Je souhaite à l’EN de passer au second tour et de réaliser un très bon parcours au Mondial. Le rêve est permis. Il faudra seulement y croire.
A la Coupe du monde 1982 en Espagne, vous faisiez partie du groupe des Verts sans avoir eu la chance de jouer. Tenez-vous encore rancune à Khalef ?
On ne peut pas oublier une chose pareille. Il n’y a aucun entraîneur au monde qui ne commet pas d’erreurs. Je suis persuadé qu’on a commis quelques erreurs lors du Mondial espagnol. Je ne parle pas uniquement de mon cas, il y a d’autres joueurs qui méritaient de jouer…
D’autant qu’il y avait pratiquement 22 éléments d’égale valeur…
Entièrement d’accord avec vous. Si on change X contre Y, cela ne devait pas poser problème. Je parle de changements judicieux, bien sûr, de deux ou trois joueurs. Face à l’Autriche par exemple où on a perdu par 2-0, notre équipe pouvait aisément gagner et n’aurait jamais dû perdre. Si le staff avait incorporé d’entrée de jeu quelques joueurs frais physiquement, ça aurait été plus bénéfique à l’équipe. Parce qu’après le match contre l’ex-RFA (Allemagne), Il y avait un impact physique énorme chez les joueurs.
Après le match, Fergani était assommé par exemple. Même face au Chili avec un peu de sang neuf, on aurait assuré une victoire plus large. Bon, c’était notre premier Mondial, il y a eu des erreurs, c’est normal. La victoire contre l’Allemagne a induit en erreur le staff dirigé par Mekhloufi, Khalef et Saâdane à l’époque.
Je ne suis pas du tout rancunier envers Khalef, parce que je crois au destin et à la loi divine. Mais quelque part surtout pour la dernière rencontre face au Chili, je pensais vraiment jouer, j’étais très en forme. D’autres joueurs étaient dans une forme éblouissante tels les Bencheikh, Maroc et Tlemçani.
Pour terminer, parlez-nous un peu de votre autre métier de consultant sportif à la télé et de votre nature d’homme qui est resté de tout temps populaire…
Je suis un fils du peuple et je le demeurerai. Je ne changerai jamais sur ce plan-là. J’étais éduqué de cette manière. Pour ce qui est de mon autre métier de consultant télé, je vous fais une confidence. Quand j’étais jeune, j’ai passé un bac philo que je n’ai pas eu parce que dès 1973, j’ai été promu senior au CRB.
J’ai choisi le football, mais j’avais toujours souhaité embrasser le métier de journaliste sportif qui me passionnait à défaut de foot. J’ai quand même fait des études en droit. Aprésent que je peux le faire, je ne m’en prive pas (rire).