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Batna
Les dernières huileries traditionnelles en voie d’extinction
25 Fevrier 2009

Les six dernières unités traditionnelles d’extraction de l’huile d’olive (Maâsra), encore en activité dans la wilaya de Batna, risquent à leur tour de disparaître, emportées par la prédominance de machines plus modernes, mais incapables de générer la même qualité d’huile que leurs célèbres ancêtres.

La mémoire populaire fait remonter les premières presses d’olives de la région à des temps très lointains que les propriétaires des dernières ‘’maâsras’’ ne manquent jamais de rappeler au bon souvenir de qui entre pour la première fois dans leur local.
Et on y apprendra, pour commencer, que la région s’était de tous temps distinguée par la luxuriance de ses vergers où dominaient l’olivier, l’abricotier et les vignes des environs de N’gaous.
Pour rester avec l’olivier et son huile bienfaisante, on saura aussi que la wilaya compte actuellement un total de six "maasras" concentrées dans les localités de Soufiane (3), Boumegar (2) et Tinibawine (1) où l’on peut encore savourer le bonheur d’admirer le spectacle pittoresque de meules tirées par des ânes et des mulets...
C’est connu, le travail dans les unités artisanales de pressage des olives exige de grands efforts physiques, et Abdelali Magaâch, propriétaire d’une huilerie à Soufiane, pense que c’est là la raison principale de la désaffection des plus jeunes à l’encontre de cette activité ancestrale.
Le modeste résultat que procurent de tels efforts explique aussi ce manque d’engouement : pour 2 à 3 quintaux d’olives pressés par jour, on extrait moins de 40 litres d’huile, à en croire ce professionnel.
Cet état de fait peu encourageant a poussé les autres presses d’olive à remplacer l’énergie humaine par l’efficacité et la magie de l’électricité. C’est le cas notamment de toutes les unités de N’gouas où l’on pense que cela permet de gagner du temps, de réduire la main d’oeuvre et de réaliser, au final, des économies substantielles sur les coûts.

Le nombre de pressoirs anciens en chute libre
Propriétaire d’une oliveraie à Soufiane, Haj Barech regrette la disparition progressive des anciennes maâsras, intimement convaincu qu’il est du fait que "zitt el moutour" (l’huile du moteur, entendre l’huile sortie des presses électriques) restera à jamais de moindre qualité que celle produite par des presses artisanales.
Les presses électriques "écrasent à la fois la chair et le noyau du fruit, donnant à l’huile un goût particulièrement amer", soutient-il simplement tout en assurant, du haut de ses 80 ans et de ses nombreuses années d’expérience, que cela "ne peut pas se produire avec les presses traditionnelles".
L’homme relève, d’autre part, qu’en dépit de l’expansion des plantations oléicoles, le nombre de pressoirs ne cesse de décroître à Soufiane de même que l’offre de l’huile d’olive locale.
Faisant partie du patrimoine économique et social de la région, les ‘’maâsras’’ artisanales paraissent ainsi de plus en plus négligées et leurs bâtiments laissés dans un état frisant l’abandon.
Pourtant, la renommée de l’huile de Soufiane reste intacte dans toute la wilaya pour sa qualité supérieure et dont le prix n’est pas, en conséquence, descendu cette année en dessous de 800 DA le litre, très loin de la moyenne nationale que l’on peut estimer à 350 ou 400 DA.
Le prix du litre d’huile d’olive de la région, très demandée y compris, semble-t-il, par de potentiels importateurs étrangers, oscille cette année entre 800 et 1.200 DA.
Irremplaçable recette
de grand-père
Le plus souvent ces presses ne sont accessibles que par des pistes plus ou moins praticables. Les sacs de la pâte d’olive entassés les uns sur les autres suffisent à signaler l’existence d’une maâsra, souvent une petite bâtisse en toub avec un toit en bois ou en palmes de dattiers.
Les étapes d’extraction de l’huile sont les mêmes que celles qu’utilisaient les ancêtres, affirme Ali Mentiri, employé à la maâsra de Bekhouch dans la commune de Soufiane dont la construction remonte aux années 1930.
Et le vieil homme d’expliquer la bonne recette dans ses détails : "On apporte d’abord les olives que l’on place dans des sacs après lavage et élimination des impuretés. Ces sacs sont entreposés pour des périodes allant de 10 à 17 jours pour que le fruit s’imprègne de la température naturelle du site".
"Les olives sont ensuite plongées dans de l’eau réchauffée au bois et versées dans un bassin cylindrique avec, au beau milieu, deux grosses pierres reliées à une longue barre de fer dont l’autre extrémité est attachée à un âne qui, en tournant, fait mouvoir la meule. La presse peut ainsi fonctionner jusqu’à 18 heures d’affilée en recourant à seulement deux travailleurs qui se relayent".
Une fois prête, la pâte d’olive ainsi moulue est mise sur 12 à 17 scourtins que l’on place dans la presse manuelle dont l’action permet d’extraire de la pâte l’eau mélangée à l’huile.
Le liquide obtenu s’écoule dans un récipient relié par un tube à un deuxième récipient placé un peu plus bas pour recueillir l’huile qui flotte sur l’eau dans le premier réceptacle. L’huile extraite de la sorte est laissée pendant une journée ou deux pour se décanter par dépôt des impuretés, avant la mise en bouteille finale.
Pour extraire l’huile d’olive dite froide, le même procédé est adopté, mais en éliminant l’ajout de l’eau chaude dans la phase de mouture de la pâte, explique un autre spécialiste nostalgique de bonnes vieilles recettes.


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