La pédophilie est un phénomène social qui prend une ampleur alarmante dans notre société ces dernières années. La presse nationale publie de plus en plus d’histoires qui défrayent la chronique où il est question d’enfants portés disparus, kidnappés, retrouvés morts, violés ou amputé d’un organe.

Savoir que son enfant a subi l’irréparable est insupportable. Le voir souffrir devant ses yeux, incapable de réagir est le pire des cauchemars. Percevoir son regard triste après avoir été objet d’une terrible injustice, d’un acte ignoble est un vécu atroce. A ce moment, le parent oublie le monde entier, sa famille, sa vie, ses projets et ne pense qu’à une seule chose : l’injustice faite à son enfant dont l’innocence a été à jamais violée. Comment survivre ? Comment faire face ? Comment se faire justice dans une société où beaucoup de fléaux dramatiques restent dans le domaine du tabou.  
La pédophilie est un phénomène social qui prend une ampleur alarmante dans notre société ces dernières années.
La presse nationale publie de plus en plus d’histoires qui défrayent la chronique où il est question d’enfants portés disparus, kidnappés, retrouvés morts, violés ou amputé d’un organe. Le constat est effarant, mais face aux chiffres qui augmentent de jour en jour, quelle lecture porter sur ce phénomène de société aux suites ravageuses ?
La loi du silence incriminable 
25 crimes commis contre des gosses, dont certains perpétrés après des violences sexuelles, et pas moins de 146 enlèvements d’enfants ont été enregistrés en 2007.
Le bilan donne froid au dos. Les rapts d’enfants ayant dans la majorité des cas pour motif l’abus sexuel se terminent souvent par l’assassinat froid et atroce des gamins par leurs bourreaux, des pédophiles insensibles commandés par un appétit sexuel débordant et qui, après avoir assouvi leurs bas instincts, préfèrent faire taire à jamais l’enfant en le tuant pour garantir son silence.
Ces chiffres alarmants témoignent de la gravité de la situation dans notre société conservatrice qui passe sous silence ce phénomène de société bien qu’il sous-tend, nous dit-on de source officielle, la totalité des cas d’enlèvement d’enfants.
1.546 cas de violences sexuelles faites aux chérubins ont été recensés en 2007 par les services de la Gendarmerie nationale. Un chiffre qui introduit largement l’installation alarmante de la pédophilie. On ne peut nous empêcher de poser une série de questions sur la genèse de cette perversion. Sachant qu’en une vingtaine d’années, les condamnations pour agressions sexuelles commises sur des mineurs ont pratiquement doublé et alors que les médias dépeignent le pédophile comme un pervers machiavélique, les spécialistes se sont penchés sur l’étude de ce comportement pathologique. En effet, loin de vouloir banaliser l’acte largement incriminable de ces individus, des recherches scientifiques tentent d’avancer, comme explication psychologique à ce trouble, une pathologie de la relation humaine.
Pédophilie, les psychiatres en parlent
«Les crimes de pédophilie qui font aujourd’hui vraiment rage au plan médiatique ont été longtemps objet de recherches en psychiatrie. La pédophilie est classée dans les perversions sexuelles dont les suites sont funestes et sur l’individu et sur l’équilibre social.  Cependant, le champ pervers dépasse de très loin la figure du pervers caricatural, telle qu’elle s’est dégagée de la conceptualisation psychanalytique et englobe un très vaste ensemble de comportements plus ou moins sociabilisés, parmi lesquels les conduites pédophiliques et certains rares pervers sadiques polymorphes pédophiles et pédérastes par ricochet. Est-il excessif de mettre à contribution le psychiatre en vue d’une meilleure protection des victimes, d’une plus profonde compréhension des comportements pédophiliques, d’une meilleure prise en charge des agresseurs sexuels ? Surtout lorsqu’on a conscience qu’il s’agit d’œuvrer dans l’intérêt des victimes mais aussi dans l’intérêt bien compris des agresseurs sexuels. Je dirais que le fonctionnement du pédophile est très compliqué. L’analyse du comportement, l’exploration de la personnalité sert justement de mieux cerner cette pathologie, mais aussi de prévenir les récidives, car les pédophiles rechutent malgré eux rapidement en l’absence d’accompagnement psychiatrique.   Contribuer au traitement, à la sociabilisation et à la prévention de ces désordres qui affectent la société et marquent l’individu n’est-il pas la tâche d’un psychiatre (ou d’un thérapeute) ? Surtout lorsqu’on lui en donne les moyens...», atteste Dr Mesmoudi, psychiatre.
Traitement de la pédophilie en milieu carcéral
Mme Ferhat, psychologue clinicienne, estime que la prise en charge thérapeutique des pédophiles en milieu carcéral est défaillante en Algérie.
«Le silence qui entoure la pédophilie complique la détection des cas passés souvent sous silence, notamment dans les zones rurales.  Les abus sexuels sont certes des crimes intolérables, inadmissibles que la loi pénalise sévèrement. Mais la répression, à elle seule, n’est certainement pas la solution idéale contre la récidive. En appréhendant mieux le profil de l’agresseur, certains psychiatres font le pari de la prise en charge thérapeutique.
La rencontre des condamnés après le jugement est un moment propice pour comprendre leurs motivations. Il faut différencier le cadre légal du cadre pénitentiaire. Le cadre thérapeutique en milieu pénitentiaire doit être précisé et aménagé en tenant compte du contexte. Pour certaines personnalités, des lieux spécifiques définis par un but de soins et une limite de temps peuvent être utiles. Les thérapies de groupe avec médiation sont un support utile, notamment pour la reconnaissance des faits. La démarche de soin doit inclure une évaluation du fonctionnement familial et/ou de l’entourage. Le traitement débuté en milieu carcéral est conçu comme une première étape et doit être poursuivi en milieu libre. Prévenir le risque d’une récidive est protégé la société civile des actes sexuels criminels», ajoute, à cet égard, Mme Ferhat.
La prise en charge du pédophile en milieu carcéral algérien est nettement déficiente. Les actes de pédophilie sont lourdement pénalisés, mais qu’en est-il de la prévention de la rechute, par une prise en charge psychologique et mentale.
Nous avons encore un long chemin à parcourir en matière de prévention de telles pathologies. Mais, l’urgence aujourd’hui, faut-il le noter, est d’élucider le mystère de la pédophilie, de sensibiliser la société civile sur ce mal, d’appeler à la vigilance et de renforcer les peines répressives.
La société civile doit comprendre que le pédophile est souvent une figure bien familière à l’enfant. Voisin, proche, instituteur ou parent, l’enfant tombe aisément dans le piège de ce prédateur, se croyant bien protégé en la présence d’un «gentil tonton», qui ne s’avèrera finalement qu’un bourreau sans cœur. Protéger l’enfant commence d’abord par l’avoir à l’œil, lui expliquer les risques qu’il encourt par des termes simples et lui apprendre à ne placer sa confiance en personne.
Aussi, les spécialistes, psychiatres, psychologues et sociologues devront, à leur tour, accorder une attention particulière à l’étude de cette perversion, à la détection du profil du pédophile, à l’analyse profonde des comportements pathologiques qui sous-tendent ce déséquilibre psychique. Traiter le mal à sa source passe finalement par la prévention et la sensibilisation.