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Enfants victimes d’abus sexuel
Comment réagir après coup ?
11 Fevrier 2008

Le traumatisme occasionné par un abus sexuel est loin d’être léger. L’agression sexuelle, atteinte au corps et à l’âme d’une personne, engendre une profonde blessure psychique dont la cicatrisation nécessite écoute, soutien moral et accompagnement psychologique sur le cours et le long terme.

Aujourd’hui, avec l’expansion du phénomène des agressions sexuelles à l’encontre des enfants, la question est de savoir comment réagir à l’égard de cette frange de la société qui, subissant un traumatisme physique et psychologique destructeur, risque de se retrouver livrée à elle-même, perdue et en proie à un désespoir sans égal.
De nos jours, les médias font régulièrement étalage des faits défrayant la chronique portant sur les abus sexuels contre des êtres innocents incapables de défendre leur corps frêles contre l’instinct fatal de prédateurs cruels. Malheureusement, les cas recensés par les services de la sécurité nationale ne représentent que la partie visible de l’iceberg, car notre société, gouvernée encore et toujours, par un silence meurtrier arrive difficilement à se dévoiler. Ainsi, une partie des crimes sexuels contre les enfants, perpétrés aussi bien en zone rurale qu’en milieu urbain, continue à être tue, notamment lorsque l’agresseur n’est autre qu’un parent ou un proche. La peur du scandale pousserait-elle des familles à mettre en péril l’équilibre physique et mental de leurs chérubins afin tout simplement de préserver la face ? Malheureusement, oui.
Le cas de cette maman accablée venue en consultation psychologique pour confier son malheur est largement illustrateur. Cette mère atterrée est arrivée effondrée à mon bureau. Elle n’avait qu’une seule phrase dans la bouche : «Je suspecte mon mari d’abuser de mes deux enfants et je suis incapable de réagir.» La femme en question, souffrant de sévères différends conjugaux, voyait son mari sortir la nuit, à pas de loups, et se glisser sous les draps des petits. Au départ, croyant que son conjoint ne supportait plus sa présence à ses côtés, préférant dormir avec les gosses, elle ne s’est doutée de rien. Mais le doute n’a pas tardé à la ronger lorsque son enfant âgé à l’époque de 6 ans faisait subir à son petit frère âgé de 2 ans des attouchements qui étaient loin d’être innocents. Harcelant le petit de questions, ce dernier a fini par déclarer, innocemment, qu’il jouait avec son frère tout comme son papa jouait avec lui et sa sœur, âgée de 8 ans. Questionnée à son tour, la fillette révéla à sa maman que son papa leur faisait subir des attouchements et qu’il leur imposait de garder le silence. La femme redoutant, au début le scandale, a fini par dénoncer le père incestueux dont l’acte ignoble a fini par être sévèrement pénalisé. Les enfants suivent aujourd’hui une thérapie psychologique qui les aide à mettre des mots sur les maux et afin d’exorciser un mal qui leur laissera des séquelles indélébiles.
Face aux agressions sexuelles contre les enfants, il faut réagir. Mais, quelle attitude adopter à l’égard d’un enfant victime d’abus sexuel ? Autrement parler, Comment les aider à mettre des mots sur les abus qu’ils ont subis ? Quelle attitude adopter ?
Les agressions sexuelles ne laissent pas toujours de traces visibles sur le corps de l’enfant. Mais, un comportement brutalement perturbé ainsi qu’un changement d’attitude sont des signes que l’entourage ne doit aucunement négliger.
Comment repérer qu’un enfant est victime d’abus sexuel ? La tâche n’est point aisée et nécessite faculté d’observation et méthode d’approche de la par de l’entourage proche de l’enfant.
Le cas est simple lorsque l’abus est révélé par un témoin direct ou par l’enfant ou l’adolescent lui-même. Quelques mots suffisent parfois à l’enfant pour évoquer l’acte subi, susciter l’attention sur une douleur enfouie, des éléments à partir desquels il deviendra possible de l’aider à se livrer davantage. La situation devient plus complexe quand il s’agit de décrypter un comportement perturbé. Lorsque l’enfant est anormalement agité ou se replie sur lui même, qu’il se plaint de maux de ventre, cauchemarde, n’a plus faim, rencontre des difficultés scolaires et autres symptômes.
Chez le petit enfant n’ayant pas accès au langage, les troubles se manifesteront plus particulièrement par le corps et des perturbations du contact avec autrui. L’enfant un peu plus âgé mais encore très jeune, pourra reproduire des actes subis, les mimer sur d’autres enfants, sur une poupée, une peluche ou sur lui-même, certains auront des conduites masturbatoires exacerbées. Parfois, l’enfant accompagne ces gestes par quelques mots ou phrases : "bobo" ou "méchant" en parlant d’une peluche.
Ces symptômes et le contexte dans lequel ils se déroulent, sont autant de signes que l’enfant nous lance pour dévoiler la situation.
Comment aider l’enfant à parler ? L’intervention rapide et efficace afin de prendre en main la reconstruction de ce qui a été ravagé par l’abus sexuel doit être envisagée sérieusement. L’aide professionnelle ne doit nullement être négligée.
L’enfant parlera plus facilement à une personne en qui il a confiance. S’il arrive qu’il se livre spontanément, il faut la plupart du temps l’aider à parler sans pour autant lui poser des questions trop directes. Préférez "je voudrais comprendre pourquoi tu fais à nouveau pipi au lit", "j’ai l’impression que quelque chose ne va pas à la maison, que quelqu’un te fait souffrir", "ce que je constate sur ton corps me fait penser que quelqu’un ne se conduit pas bien avec toi." "C’est peut-être difficile pour toi d’en parler parce ce que par moment tu aimes beaucoup cette personne et d’autres moments tu la détestes" à des formulations qui induisent déjà des réponses. Dans un premier temps, il est préférable de ne pas aborder ce qui est le plus douloureux, l’enfant risque de devenir mutique sur ce sujet.
Il est important aussi de soutenir l’enfant dans ses révélations, car il imagine toujours être le seul à qui cela arrive. A aucun moment, un adulte ne doit brusquer un enfant victime d’abus sexuel en l’obligeant à raconter son cauchemar. Il existe toujours des moyens plus efficaces. Une fois le drame confirmé, le dépôt de plainte auprès des autorités judiciaires est une obligation. Cependant, cette étape accomplie, le plus sérieux travail reste à faire. Celui de l’accompagnement psychologique, car il ne faut point banaliser les répercussions dévastatrices de l’agression.

Par : d. soltani

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