Le Midi Libre - Société - Le redoutable passage à l’acte
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Fugue à l’adolescence
Le redoutable passage à l’acte
17 Décembre 2007

A l’adolescence, les jeunes traversent des moments de crise marqués par de sévères conflits intérieurs et relationnels. Le mal-être de l’adolescent provient, en effet, de la période de changements psychologiques, affectifs et physiques qu’il traverse, mais qu’il n’arrive pas à gérer.

Il demeure alors confus devant tant d’émotions qui émergent en lui et face à lesquelles il est impuissant. Lors de cette période transitoire entre l’enfance et l’âge adulte, l’ado risque d’exprimer sa souffrance à travers son corps en utilisant ce dernier comme souffre-douleur. Il ira alors jusqu’à adopter des conduites à haut risque comme l’automutilation, l’anorexie, la boulimie et autres troubles du comportement. Ces troubles sont la manifestation typique de la douleur psychologique à l’adolescence.
Il survient que l’ado ait recours à d’autres conduites risquées pour exprimer son malaise intérieur et son sentiment d’être incompris et mis à l’écart par son entourage. Dans ce chapitre, nous pouvons citer les attitudes périlleuses adoptées par le jeune sans prise de conscience des risques qu’elles entraînent. La fugue est entre autres agissements scabreux qui mérite d’être analysée en profondeur afin d’explorer sa genèse en vue de pouvoir sensibiliser l’entourage sur les risques que court un adolescent livré à lui-même.
La fugue, un comportement qui touche aussi bien les garçons que les filles, reste un phénomène largement méconnu par le grand public. Non seulement les parents ignorent comment réagir face à la fugue de leur fils ou de leur fille, mais ils croient le plus souvent que cela n’arrive qu’aux autres. Cependant, face au fait accompli, nombreux sont les parents qui restent cois, incapables de trouver la bonne attitude.
Pour pouvoir accomplir efficacement son rôle de parent, il importe de commencer par croire que ce qui arrive aux autres peut nous arriver. La fugue (celle de la fille notamment considérée au sein de la société algérienne comme un acte scandaleux) reste une manifestation fréquente à l’adolescence. S’arrêter à l’inadmissible caractère de la fugue, notamment lorsque le fugueur est une fille, n’est point porteur. Au contraire, cela risque de contraindre la bonne prise en charge de l’ado.
Chercher à appréhender la missive que tente vainement de lancer l’ado par le biais de cette conduite périlleuse est l’unique manière pour pouvoir redresser la barre et rétablir la confiance de l’ado en lui et en ses parents.
Les adolescents traversent une période de développement propice aux remises en question et caractérisée par une quête identitaire majeure. Les bouleversements affectifs qu’ils endurent favorisent l’apparition d’un stress permanent, bien plus sévère comparativement à celui que ressentent les adultes, ce qui les expose, de ce fait, au danger des conduites à risque.
Cette période de la vie amène aux frontières de la rupture, de la déviance et de la délinquance. On fuit, on cherche l’évasion. L’ado cherche à calmer les tentions intérieures qui bouillonnent en lui, veut trouver la paix, veut réaliser son autonomie, veut mettre fin à l’autorité des adultes en manifestant sa rébellion contre les lois instaurées par les parents. La fugue est une manifestation de soulèvement contre les adultes, une manière de leur dire : «Stop, arrêtez de me traiter comme un enfant. Je peux bien survivre sans votre aide.» La révolte qui empreint l’âge ado pousse le jeune, en l’absence de communication au sein de sa famille, à adopter des comportements hasardeux sans considérer les suites.
Telle est le cas de Lamia, une ado âgée de 15 ans, qui a fait des fugues à répétition et qui a été accompagnée, en consultation psychologique, par son père angoissé et épuisé à cause du comportement imprudent de sa fille qui a failli, lors de sa dernière escapade, être violée.
«Je ne comprends pas ce qu’elle a. Elle était tellement docile, autrefois. Aujourd’hui, tout a basculé. Notre vie ne lui plaît plus. Elle voudrait sortir danser dans des boîtes ; participer à la star académy, chanter. J’ai beau lui demander de se tourner vers ses études, mais en vain. J’ai essayé d’être attentionné et compréhensif, cela n’a pas porté de fruits. J’ai alors décidé d’être méchant et même violent et là, elle a commencé à fuguer. A chaque fois que je la récupère du poste de police, je me sens rabaissé. Que faire ? Cette gamine me fatigue et j’ai vraiment ras-le-bol de devoir changer d’habitation pour ne pas endurer le regard condamnatoire de mes voisins», révèle M. Mohamed.
Manifestement, ce pauvre père déclare son impuissance face aux fugues à répétitions de sa fille ado qui désire s’éclater. Le père qui n’admet pas l’idée que son enfant puisse participer à une émission de divertissements adopte une attitude violente qui rend le terrain familial favorable aux prises de risques majeurs.
La méconnaissance des parents de la vulnérabilité de l’ado en quête identitaire et à la recherche de son autonomie, la défaillance de la communication au sein de la sphère familiale, le recours à la violence qui imprègne de plus en plus les échanges parents-enfants,  restent largement responsables de l’adoption des ados des conduites dangereuses.
L’écoute parentale, l’accompagnement, le dialogue et le suivi forment la meilleure formule efficace dans la prévention, la prise en charge et l’intégration de l’ado dans une société d’adultes et lui permettre, de ce fait, d’acquérir l’autonomie et la maturité.

Par : d. soltani

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