Située à 6 kilomètres de la daïra de Merahna et à 34 kilomètres à l’est du chef-lieu de la wilaya de Souk-Ahras, la commune de Sidi Fredj est l’une des 26 communes que compte la wilaya, mais aussi l’une des 4 communes déclarées les plus pauvres en Algérie.
Issue du dernier découpage administratif, cette commune longe la frontière tunisienne de Hedada (Souk-Ahras) à El-Ouenza (Tébessa), d’où les liens de parenté entre ses habitants et ceux d’El-Kef et Tagerouine (Tunisie). Depuis sa programmation en tant que commune pauvre, beaucoup d’encre a coulé sur les divers programmes destinés à améliorer, un tant soit peu, les conditions de vie de ses 7.500 habitants répartis sur 18 mechtas, tel le programme des Hauts-Plateaux, le HDS ou celui de la Communauté européenne, notamment après la double visite des Belges. Sur ce, nous avons décidé de se rendre sur les lieux afin d’y voir plus clair.
Lorsque nous avons pris un taxi à Souk-Ahras à destination de Merahna, nous pensions trouver facilement un transport de cette dernière vers El-Bordj (chef-lieu de la commune de Sidi Fredj), mais il nous a fallu attendre une heure pour que le chauffeur d’un vieux tas de ferraille clandestin accepte de nous y ramener moyennant 200 DA. "Ici il n’y a que des clandestins, nous lance-t-il. Que ce soit vers El- Bordj ou El-Guebla (appellation locale de la région de Ouled Abbès), vous ne trouverez ni taxi ni bus à cause de l’état de la route, et puis il n’y a pas assez de voyageurs vers cette destination." Heureusement que nous avons constaté de visu que la route a fait peau neuve et que son état est excellent de Merahna à El-Ouenza, en passant par le chef- lieu de commune (El-Borgj). Le seul tronçon dégradé menant vers mechta Aïn Sayada, sur 17 kilomètres, est encore praticable. Arrivés sur les lieux, notre identité fut vite constatée et immédiatement nous fûmes entourés de citoyens venus se plaindre surtout du chômage et du manque d’eau potable : "La seule source d’eau pour El-Bordj est Aïn Zitouna", déclare Youcef, un père de famille de 14 âmes, ex-employé à souk el- fellah, aujourd’hui en chômage. "Ici, nous sommes alimentés que 7 minutes une fois par semaine. Quant à la fontaine romaine qui alimentait autrefois toute la ville, elle est ensevelie et a séché complètement après la construction de la mosquée et de la place de la Solidarité." "A Aïn Sayada, on ramène l’eau à dos de mulets", lance Mohamed, un habitant de cette mechta considérée localement comme étant la plus pauvre et la plus enclavée. "Ailleurs, on nous alimente avec les citernes de l’APC ou par les privés qui nous ramènent l’eau de Aïn Laâradjine moyennant 800 DA/citerne." Amara, un jeune célibataire de 30 ans, espère que l’entreprise militaire ouvre ses bras aux jeunes de cette localité : "Nous n’avons pas où aller, dit-il. Ni agriculture ni entreprise capable d’absorber le chômage qui est à 95% à peu près. Il n’existe même pas un stade pour jouer au football. Pour pratiquer l’élevage, on nous exige la carte de fellah, chose impossible vu que la majorité des terres est à titre de arche. On n’a rien vu des promesses, poursuit-il. Les élèves de Fidh Ezder, par exemple, parcourent 7 kilomètres à pied pour rejoindre les bancs de l’école. Même pour payer la facture de consommation de l’électricité, on est obligé de se déplacer à Taoura. Côté agriculture, l’infertilité de la terre fait que seul el hendi (figue de barbarie) pousse dans cette région. La majorité de la population opte pour l’exode rurale vers Sakiet Sidi Youcef ou Merahna. Même la protection sanitaire est minime. On reçoit la visite d’un médecin et d’un dentiste une fois par semaine et seulement pour deux heures." En effet, de Koudiat El-Assa à Ouled Abbès, des milliers d’arbustes de figue de barbarie longent la route des deux côtés, mais la récolte est parfois bonne et parfois mauvaise, nous confient les agriculteurs. Par ailleurs, on nous confie, sous couvert de l’anonymat, que le chômage dans cette région du pays n’existe pas, du moment que la frontière n’est qu’à quelques centaines de mètres. On y fait passer vers le pays voisin toutes sortes de marchandises, principalement du carburant et du cheptel, et on importe de la fripe et surtout des denrées alimentaires (pâtes, concentré de tomate, mouloukhia, épices, huile, etc.) ; des produits dont la qualité est fortement appréciée par les Algériens, nous confirment-ils.