De nombreuses familles de la wilaya de Tipasa, Cherchell et Koléa, notamment, sont nostalgiques du Ramadhan d’antan où les repas, dans chaque foyer, se distinguaient par des préparations culinaires originales alliant la fantaisie et l’innovation et durant lequel les marchés embaumaient de parfum de jasmin.
Les incontournables mets du mois de Ramadhan qu’étaient la "douida", une soupe préparée à base de petites vermicelles confectionnées à la maison quelques jours avant l’arrivée du mois sacré, séchées puis conservées dans des sacs au frais ainsi que la "mkirna", un plat de résistance composé de viande hachée et de pâtes, préparées également à la main, font partie du passé, regrette, à cet égard, khalti Zhira.
Les préparatifs du Ramadhan d’antan
Cette ménagère octogénaire déplore le manque d’imagination des "nouvelles" familles algériennes qui se sont toutes mises à la classique "chorba frik", chorba aux vermicelles industrielles ou à la "hrira" qui, estime-t-elle, "ne se donnent plus la peine de se préparer pour ce mois sacré qui doit être différent des autres mois de l’année".
Les préparatifs de ce mois de jeûne, selon elle, était jadis un cérémonial auquel nulle famille ne dérogeait puisqu’il était, à l’époque, de bonne tradition de se réunir entre femmes pour s’adonner à la préparation de la "douida" ou de la "mkirna".
Ces bonnes vieilles coutumes, suivies par des opérations de grand lavage des demeures, d’achat de nouveaux ustensiles en terre cuite pour mijoter de bons petits plats, sont en train de disparaître au fil des ans.
De ces traditions ancestrales, il en reste peu ou prou, excepté chez certaines familles, notamment celles dont les parentes de l’ancienne génération sont encore vivantes, qui veillent encore à perpétuer les habitudes culinaires traditionnelles.
La jeune génération se contente d’aller au marché
"La jeune génération cherche la facilité en se contentant d’aller acheter sur le marché leur pâtes déjà prêtes sans se soucier de leur saveur, l’essentiel étant de ne pas faire d’efforts", souligne-t-elle.
De son côté, le vieux Mhamed se souvient du Ramadhan à Cherchell où le marché couvert tenait la place centrale de la vie de la cité avec des commerçants rivalisant de décoration de leurs étals et où le parfum du jasmin régnait en maître des lieux.
Même les poissonniers, dit-il, ne dérogeaient pas à la règle et à la tradition en entourant leurs casiers de poissons de différentes plantes et herbes aromatiques et odorantes qui exaltaient leurs parfums au grand plaisir des clients.
Ammi Mhamed évoque, avec un brin de nostalgie, cette "belle époque" où les gens se connaissaient bien et se permettaient de taquiner les personnes ayant les nerfs à fleur de peau durant le Ramadhan, histoire de passer le temps.
"Hélas", lance-t-il, quelque peu agacé, "les temps ont bien changé", en montrant du doigt les ruelles grouillantes de monde, les étals des commerçants légaux ou informels qui ont envahi tous les espaces et recoins de la ville et qui sont à l’origine de l’envahissement de la ville par des amas de détritus.
Les soirées ponctuées de jeux de "boqala" et autres visites familiales et "gaâdates" autour d’un orchestre de musique andalouse, tout en sirotant un thé à la menthe ou un café arrosé de ma zhar (fleurs d’orangers) accompagnés de pâtisseries et autres sucreries comme "hlaouet el halqoum" ne sont plus de mise, regrettent, par ailleurs, de nombreux Cherchellois.