Le harangueur s’adressant à la foule féminine lui affirme qu’en étrennant son article elles ne manqueront pas de faire verdir de jalousie leur(s) (s) voisine (s). Pendant que les clientes se bousculent devant les étals, pour rebooster leur ardeur, le vendeur ne manque pas de lancer un « aya mabkach ».
Nul besoin d’avoir recours à des supports publicitaires, hors de prix, pour faire la réclame des produits proposés sur les étals informels. Les jeunes commerçants, , sans pour cela avoir suivi de longues études en marketing, ont pourtant trouvé la formule idoine pour écouler en un temps record leur marchandise. Avec le bagout propre à leur génération, avec une pointe d’humour et un soupçon de dérision, Ils arrivent à séduire les clients, qui ne peuvent s’empêcher de rire, et un client séduit est pour ainsi dire acquis. En effet la clientèle, en majorité constituée de femmes, fréquentant ces lieux, sont conviés à une fête et spectacle permanents. La nouvelle tendance du commerce, particulièrement en ce mois où tout se vend, est aux slogans vantant les produits proposés par les jeunes qui s’égosillent pour tenter de mettre en vedette leur produit et attirer ainsi l’attention des éventuels clients. Ces jeunes, vendant leurs produits à la criée, se retrouvent partout, au marché du 1er-Mai, à la place des Martyrs, marché Tnache, bref en tout lieu investi par le commerce informel. Les slogans, répétés à l’envi par ces jeunes gens, portent apparemment leurs fruits à la vue de la foule compacte se bousculant devant leurs étals-spectacles. En fait ces jeunes n’hésitent pas à faire même dans l’excès, en s’affublant des articles proposés à la vente... robes, pulls, djebas, écharpes et autres articles féminins. « Leurs formules "magiques" m’attirent irrésistiblement vers leurs étals » nous avoue, avec amusement, une personne abordée au niveau de l’un de ces marchés à la criée.
« Diri l’affaire yamra », est la formule qui revient le plus souvent, ce message sous-tend que la consommatrice est face à une proposition d’achat qu’elle ne saurait rater, car étant unique. « Quand j’entends cette phrase, je sais que le produit en exposition n’est pas ordinaire et que son prix est certainement concurrentiel » nous explique, naïvement une, mère de famille. « Echri ou ghayri djartek » est l’autre slogan clé faisant appel à l’instinct de jalousie féminin censé exister de tous temps entre voisines. Le harangueur s’adressant à la foule féminine lui affirme qu’en arborant son article elles ne manqueront pas de faire verdir de jalousie leur(s) (s) voisine (s). Ces slogans font que les clientes se bousculent devant les étals, d’autant que de temps à autres, pour rebooster leur ardeur, le vendeur ne manque pas de lancer un « aya mabkach » en guise d’avertissement et pour mettre l’accent sur la rareté et l’indisponibilité du produit "offert" à ces convoitises féminines. Les insecticides, en cette période où les moustiques prolifèrent ont aussi une grande place dans ce souk à la criée
« roch fi darek imout fidar djarek !», est le slogan le plus usité pour ce produit. D’autres commerçants évitant de mettre la pression sur les passants les invitent à admirer la marchandise sans pour autant être obligées d’acheter, « djouzi, elli machra yetnezah », disent-ils avec courtoisie. « La plupart des vêtements achetés l’ont été ainsi sur un voup de cœur, mais surtout grâce au bagout de ces vendeurs », nous avoue une jeune étudiante, « quand j’ai de l’argent et que je passe par là, je ne peux m’empêcher d’effectuer des achats » nous dit-elle.
Par conséquent, la gent féminine algéroise apprécie l’humour de ces jeunes commerçants, au point de souvent acheter des produits dont elles n’auront jamais l’usage.