Tous les quartiers de la capitale ont leur (s) bidonville (s), aucun quartier n’y échappe. Ils se nichent partout, sur les flancs des collines, sur les lits des oueds, même les morts se voient disputer leurs espaces. Ils ont commencé d’abord par ceinturer la capitale avant de s’y insinuer progressivement et de finir par s’y installer.
Nous avons décidé de faire une escale dans les bidonvilles de Gué de Constantine érigés au début des années 90. Ces lieux offrent un sinistre décor de misère et de malaise social. Collées l’une à l’autre, à Aïn El-Malha, Safsafa, à Remli, ou encore le quartier des Touansa, ces constructions ne cessent de gagner du terrain au point qu’elles cernent, de toutes parts, les cités de cette commune. Elles sont environ 10.500 baraques implantées sur plusieurs sites de la seule commune de Gué de Constantine. Abritant des milliers de familles venues de wilayas de l’intérieur du pays, Medea, Bousâada, ces habitations précaires sont construites, dans leur majorité, en parpaings et plaques de zinc en guise de toits. Les raisons ayant mené la plupart de ces familles à cette situation désolante, sont en premier lieu, la fuite face au terrorisme, mais pour d’autres c’est "l’explosion sociale" qui a engendré une importante crise du logement. Vivant dans ces lieux où les conditions élémentaires d’hygiène sont inexistantes, cette population est sujette à de multiples maladies, entre autres, l’asthme, qui atteint surtout les enfants mais n’épargne pas les adultes non plus. Le quotidien de ces gens est une suite de nuisances où domine l’humidité et les relents des ordures et des eaux usées. Cela sans parler des fléaux sociaux que toute cette misère engendre au quotidien, les principales victimes en sont les jeunes. Ces derniers se retrouvent très tôt confrontés à un climat malsain et ils sont vite entraînés sur la pente glissante de la délinquance pour certains alors que les autres sont obligés de quitter l’école encore enfant pour aider leurs parents à subvenir aux besoins des membres de leur nombreuse famille, puisque pour la plupart de ces parents, trouver un emploi stable ou moyennement bien rétribué, "relève du miracle", nous confie un père de 8 enfants (2 filles et 6 garçons). "Mes deux fils aînés, 14 et 16 ans, ont arrêté l’école pour m’aider à nourrir la famille, moi je bricole par-ci par-là, parfois des petits travaux de maçonnerie ou de peinture, en fait tout travail qui se présente à moi, je le prend, le plus jeune de mes fils revend des cigarettes, quant à l’autre il est employé comme receveur dans un minibus". Interrogé sur les raisons l’ayant poussée à vivre dans ce taudis et dans ces conditions inhumaines, il dira : "C’est le destin, originaire de Médea, je suis venu m’installer ici pour fuir les "égorgeurs", c’était le seul moyen que j’avais pour préserver la vie de mes gosses et celle de ma femme".
Les autorités communales de Gué de Constantine n’ont, jusqu’à présent, entrepris aucune action concrète, difficile à prendre dans ce contexte, une chose est sûre néanmoins, c’est qu’il est urgent et essentiel de mettre fin au calvaire de ces familles et éradiquer définitivement ces bidonvilles qui défigurent la capitale et qui sont présents partout et même dans les quartiers dit résidentiels, en fait aucun quartier n’est à l’abri de ce phénomène : Kouba, Ben Aknoun et même Hydra où un bidonville est érigé depuis... 1965. Le cimetière d’El Alia a lui aussi son bidonville, le parc zoologique a été également investi par ces baraques, il est vraiment grand temps de mettre un terme à cet envahissement dangereux aussi bien pour l’environnement que pour la santé des citoyens.
M. M.