Les autorités italiennes redoutaient jeudi un nouveau cycle de violences après l’exécution sans précédent dans l’histoire pourtant déjà sanglante de la mafia calabraise de six Italiens mercredi à Duisbourg (ouest de l’Allemagne). Un "sommet antimafia" se tenait jeudi en fin de matinée à Reggio de Calabre, chef-lieu de la région du sud de l’Italie où sont nées cinq des six victimes. La sixième, qui avait fêté ses 18 ans peu avant le massacre, était née en Allemagne.
Le directeur de la police criminelle Francesco Gratteri a d’abord assisté à une réunion à la préfecture avec les principaux chefs des forces de l’ordre avant de rencontrer les magistrats antimafia au parquet de Reggio de Calabre. Ce sommet devait porter sur l’enquête et les mesures à prendre pour éviter une escalade de la violence dans la région. Deux enquêteurs italiens sont par ailleurs arrivés mercredi soir à Duisbourg pour participer à l’enquête côté allemand. Les policiers et les carabiniers de la Calabre, dont beaucoup se trouvaient en congé pour le long week-end du 15 août, ont été rappelés à leur poste, a rapporté l’agence Ansa. Les forces de l’ordre étaient massivement présentes jeudi matin dans la zone du village de San Luca, épicentre du contentieux entre deux clans de la mafia calabraise qui serait à l’origine de l’exécution des six hommes. Des postes de contrôle ont également été mis en place sur les routes conduisant au village dont les habitants refusent de parler aux journalistes, selon les médias italiens sur place. "Il est nécessaire de mettre en place un dispositif de façon à empêcher la répétition de tels actes", a commenté jeudi à Reggio de Calabre Francesco Gratteri, cité par l’agence Ansa avant le sommet antimafia. Agées de 16 à 38 ans, les victimes parmi lesquelles se trouvent deux frères, ont été criblées de balles alors qu’elles se trouvaient dans deux véhicules stationnés devant le restaurant italien "Da Bruno". Elles avaient toutes des liens avec cette pizzeria, selon la police de Duisbourg. Le ministre italien de l’Intérieur Giuliano Amato avait dès mercredi souligné que l’attention se portait désormais sur la Calabre, la région du sud de l’Italie, berceau de la mafia calabraise, la ’Ndrangheta, pour empêcher "un troisième acte" dans l’escalade de vengeances connue sous le sous le nom de "vendetta de San Luca". Cette vendetta a commencé en 1991 lors d’une rixe entre familles durant la fête de la Saint-Valentin qui aurait été déclenchée, selon les différentes versions, par le jet d’un pétard ou d’un oeuf, qui a entraîné une série d’actions de représailles. Le massacre de mercredi en Allemagne est, selon Rome, la réponse au meurtre le jour de Noël 2006 de l’épouse de l’un des chefs présumés d’un des deux clans. Le guet-apens qui avait fait également trois blessés, dont un enfant, a été suivi de plusieurs meurtres en Calabre (au moins quatre selon les médias). Au-delà d’une vendetta familiale classique, certains experts, comme le président de la Commission parlementaire antimafia, Francesco Forgione, soulignaient qu’il était nécessaire de "comprendre quels intérêts et quelles affaires étaient en présence en Allemagne" pour expliquer ce "massacre sans précédent dans l’histoire de la "Ndrangheta". En 2007, la police italienne a arrêté 228 membres présumés de cette organisation criminelle, considérée parmi "les plus dangereuses au niveau mondial", selon un rapport du ministère de l’Intérieur sur la sécurité publié en juin.