Nous sommes au 10e jour du mois de Ramadhan. Deux inspecteurs de la répression des fraudes et du contrôle de la qualité sont en train d’effectuer des contrôles dans les environs de Réghaïa, à l’est d’Alger. Ils arrivent en vue d’une boucherie se trouvant au milieu d’une cité. Ils s’en approchent. Alors qu’ils sont à quelque 50 mètres de la boutique, un des deux inspecteurs se boucha le nez tout en se tournant vers son collègue.
- Il doit y avoir un chat mort dans les parages. Tu sens cette odeur de putréfaction, Madjid ?
- Hum… je la sens, Hamid… Tu as vu le nombre d’immeubles qu’il y a ici ? Et personne ne s’est dit qu’il faisait trop chaud pour laisser un charognard à l’air libre… Ils auraient pu l’enterrer, ce pauvre animal.
- Ah ! Madjid, je crois que c’est cette boucherie, là-bas, qu’ils auraient dû enterrer.
- Cette boucherie ? Pourquoi ?
- C’est de là que vient l’odeur.
- Tu plaisantes ?
- Entrons et tu verras.
Dès que les deux inspecteurs furent entrés dans la boucherie, la puanteur qui les avait agressés se fit plus forte, plus insupportable, à tel point qu’ils ne purent s’empêcher de se boucher le nez.
Incroyable ! Toute la viande exposée était avariée. Celle qui se trouvait dans la petite chambre froide n’était pas mieux lotie.
- Mais votre marchandise est impropre à la consommation, khouya, s’exclama Madjid.
- Allah ghaleb…
- Comment ça, Allah ghaleb ?
- Vous croyez que ça me fait plaisir de vendre cette
viande ? Pourquoi vous ne vous adressez pas à ceux qui sont responsables des coupures de courant électrique ?
- Il y a des coupures de courant, ces jours-ci, c’est vrai mais ce n’est pas une raison pour empoisonner la population…
- Je n’ai empoisonné personne… Personne ne s’en est plaint…
- Toute votre viande est à jeter.
- A jeter ? s’écria le boucher. Je l’ai payée, cette viande monsieur ! Si je la jette qui va me rembourser ?
- Et si des gens meurent après l’avoir consommée, qui consolera leurs parents ?
Les deux agents rédigèrent leurs rapports et il y a quelques jours le boucher indélicat et sans scrupules s’est retrouvé au tribunal de Boudouaou.
Trois ans de prison ferme et une forte amende ont été requis contre lui.
Par : K. A.