Le 8 février dernier, Mahmoud, un paisible quadragénaire de Khraïcia, comme d’habitude, s’était levé à 6h du matin pour se rendre à son travail. Il ignorait que ce matin-là il vivrait quelques-uns des moments les plus palpitants et les plus spectaculaires de sa vie. Il sortit sa voiture du garage de sa villa en marche arrière puis descendit pour refermer le rideau métallique tout en laissant le moteur allumé. C’est ainsi qu’il procédait depuis des années sans qu’il n’y ait le moindre problème. Mais comme les habitudes sont faites pour être violées, ce matin-là, quelque chose… d’inhabituel allait se produire.
Un jeune homme qui n’avait pas encore trente ans et qui n’ignorait rien du rituel de Mahmoud qu’il avait épié pendant plusieurs jours, profita de ce que ce dernier soit descendu de voiture pour refermer le rideau pour y monter et démarrer en trombe. Mahmoud se retourna, vit sa voiture s’en aller et il comprit. Il se mit alors à hurler. Il était si choqué et si affolé qu’il ne savait plus ce qu’il disait. Son cerveau se mit à travailler très vite et il vit un de ses voisins s’apprêtant à monter dans sa voiture. Il courut alors vers lui et lui enleva les clefs.
- Prête-moi ta voiture, Prête-moi ta voiture, Prête-moi ta voiture, Nordine !
- Eh ! Qu’est-ce qui te prend, Mahmoud ? Et ta voiture où est-elle ?
- Ne pose pas de questions… Monte avec moi si tu veux…
Nordine monta dans sa voiture mais à la place du passager. Ce n’est qu’une fois que la Nissan de Mohmoud fut à portée de vue qu’il commença à comprendre.
- Mais Mahmoud… C’est ta voiture que je vois là-bas ?
- Tais-toi, tais-toi… laisse-moi conduire. Je dois rester concentré, je dois le rattraper.
La course poursuite n’avait rien à envier à ce que l’on voit dans les téléfilms américains de série «b». Il y avait de tout : des moteurs qui ronflent, des crissements de freins… Il ne manquait que les cascades et les tonneaux ? Il allait y avoir ! Le voleur qui roulait à une très grande vitesse, à un moment donné, heurta avec la roue avant gauche un obstacle immobile se trouvant sur un côté de la chaussée rendue glissante par la pluie glaciale de ce matin-là et la voiture fit plusieurs tonneaux spectaculaires. Si elle avait rencontré d’autres voitures venant en sens inverse, il y aurait eu un vrai carnage. Mais fort heureusement, il n’en fut rien.
- Oh ! ma pauvre voiture ! Oh ! ma pauvre voiture ! Oh ! ma pauvre voiture ! se lamenta Mahmoud.
Dès que la voiture qui était retombée sur ses quatre roues, se fut immobilisée, le voleur en sortit et s’enfuit à pieds cette fois-ci. Mahmoud descendit à son tour de la voiture de son voisin et entreprit de le poursuivre. Un peu groggy par le choc et la frayeur qu’il venait de vivre, le voleur eut du mal à distancer son poursuivant Alors, il s’arrêta sortit un couteau et fit face au quadragénaire :
- Avance un peu et je vais te montrer ! hurla-t-il sous l’empire de la rage du désespoir.
Nordine qui venait de descendre à son tour de la voiture et qui avait suivi tant bien que mal son voisin s’affola :
- Mahmoud, sois raisonnable, laisse-le partir ! Il est dangereux ! Il risque de te tuer…
Mahmoud, entendit l’appel de son voisin et décida de l’écouter. Il s’éloigna à reculons et le voleur en profita pour s’enfuir.
- Voilà j’ai récupéré ma voiture mais dans quel état ! soupira Mahmoud.
- Tu l’as récupérée, c’est l’essentiel parce que si le voleur l’avait prise tu ne l’aurais jamais retrouvée, opina son voisin.
- Le salaud… je n’ai pas bien vu son visage… même si je le revoyais, j’aurais du mal à le reconnaître.
- C’est ce que tu crois parce tu es choqué par ce qui vient d’arriver. Mais je suis certain que si tu le revoyais une seconde fois, tu le reconnaîtrais….
- Peut-être… peut-être…
- En tout cas, Mahmoud… je crois que tu n’auras pas besoin de chercher après lui… Il a oublié dans la voiture quelque chose de très important qui pourrait aider la police à arriver jusqu’à lui : son téléphone mobile.
- Bof ! C’est certainement un téléphone volé…
- Et alors ? Il a dû l’utiliser pour appeler des gens qu’il connaît. Et c’est bien le diable si aucun d’entre eux ne sait comment il s’appelle et où on peut le trouver.
- Oui, tu as raison…
- Mais, Mahmoud… il y a une chose que tu dois éviter de faire …
- Laquelle ?
- Toucher le volant de ta voiture ! Tu risquerais d’effacer les empreintes du voleur.
Mahmoud déposa plainte au poste de police le plus proche. Et le jour-même, les enquêteurs purent mettre la main sur le voleur. Celui-ci, dans un premier temps, nia son implication dans le vol de la voiture. Quant à la présence de son téléphone mobile, il l’expliqua par le fait qu’il lui avait été volé deux jours plus tôt. Mais tout mensonge contient des lacunes. C’est ainsi qu’il avait eu du mal à expliquer pourquoi il n’avait pas déclaré le vol de son téléphone. Et puis, il ne trouva rien à dire lorsqu’on lui signifia son inculpation après que les enquêteurs eurent trouvé ses empreintes sur le volant de la voiture de Mahmoud.
Il y a quelques jours, le voleur s’est retrouvé au tribunal de Koléa où il a été condamné à 3 ans de prison ferme et à une amende de 20 millions de centimes. Il doit également payer 50 millions de dédommagements à Mahmoud.