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Vol et falsification
La belle… mauvaise affaire !
29 Septembre 2011

Beaucoup de gens n’ont pas encore compris qu’acheter un produit volé est un délit passible de prison. C’est ce qu’un jeune homme de Rouiba aura découvert à ses dépens.

Dès que Samir fut descendu du car qui l’avait ramené d’Alger, il émit un soupir de soulagement. Il avait beau se dire que la distance entre Alger et Rouiba n’était pas importante il n’empêche qu’à chaque fois, ce trajet le fatiguait. Entre l’arrêt où il était descendu et son domicile, il restait quand même un sacré parcours à pieds. Comme chaque jour, sauf le vendredi et le samedi, il entra dans un petit café du centre de Rouiba où il avait coutume de prendre une tasse de café bien serré, fumait une cigarette avant de poursuivre sa route. Cette fin d’après-midi là, dès qu’il fut entré dans le café, il entendit quelqu’un le héler depuis une table.
-Samir ! Hé ! Samir ! Viens
t’installer ! J’ai une bonne nouvelle pour toi !
Il regarda dans la direction de l’appel et il reconnut Rabah, un ami de longue date qu’il connaissait depuis le CEM.
- Ah ! Rabah… j’arrive… j’arrive.
Il s’attabla avec son ami et celui-ci lui dit :
- Tu es fatigué, hein ?
- Ah ! Ne m’en parle pas… Il n’y a que 30 kilomètres entre Alger et Rouiba et en plus je viens dans un bus direct qui a emprunté l’autoroute mais quand j’arrive ici, je me sens transformé en serpillière mouillée…
- C’est l’âge, mon vieux ! c’est l’âge… Tu n’as plus vingt ans…Tu as quel âge maintenant, Samir ?
- Oh ! Epargne-moi ton sarcasme. Tu sais bien que toi et moi avons le même âge !
- Oui…C’est vrai…Il m’arrive d’avoir l’impression que tu es plus âgé que moi…

- Oui, oui, je connais la chanson…Tu vas encore me dire que les transports en communs fatiguent l’organisme et stressent les gens qui les utilisent …Je suis d’accord avec toi Rabah, mais dis-moi ce que je dois faire… Les prix des voitures ne cessent de monter en flèche et ceux qui vendent des voitures d’occasion en profitent.
- Non, ce n’est pas vrai...il y a de très bonne occasions…seulement il faut bien chercher…la dernière fois, je t’ai trouvé une 2 CV, année 1984, à 14 millions de centimes et tu ne voulais pas l’acheter…
- Je ne voulais pas l’acheter parce que la 2 CV n’est plus une voiture. On ne trouve plus ses pièces de rechange…
- Tu as raison…Mais cette fois-ci, comme je te l’ai dit, j’ai une bonne affaire pour toi. Tu es prêt à acheter une
Clio ?
- Si c’est à une Clio à 80 millions, merci… Je n’ai qu’à emprunter un peu d’argent et en acheter une neuve.
- Elle ne coûte que 35 millions.
- De quelle année ?
- 2004. Mais tu la verrais, tu croirais qu’elle vient de sortir d’une usine
de montage.
- C’est vrai ? Et pourquoi son prix
est-il si abordable ?
- Parce que son propriétaire avait un besoin urgent d’argent et il ne savait pas comment faire pour se le procurer alors il a décidé de vendre sa voiture. C’est Kamel qui l’a achetée. Il a l’art de flairer les bonnes affaires. Il l’a achetée à 30 millions et je l’ai supplié de te la revendre… pour presque son prix d’achat. Il te la cède à 35 millions si tu es intéressé. Si tu ne l’achètes pas il a déjà des clients pour 50 millions… si tu n’achètes pas cette Clio, tu mourras dans un bus ou dans un train entre deux passagers puant des pieds !
- Hum…où peut-on la voir cette
voiture ?
- Pas loin d’ici.
- On va la voir ?
- D’accord… je vais d’abord appeler Kamel pour savoir si on peut le trouver… sinon nous risquerions de nous déplacer inutilement.
- Tu as raison, Rabah. Tu ne peux pas savoir à quel point j’ai envie de prendre une douche et de m’allonger sous
un climatiseur.
Rabah eut Kamel au bout du téléphone et il jubila ;
- Tu as de la chance, mon vieux. Kamel est dans les parages Il m’a dit où on peut le trouver.
La voiture de couleur blanche était en très bon état. Rabah n’avait pas exagéré quand il avait dit qu’elle avait l’air d’être sortie d’une usine de montage. Pendant que Samir tournait autour d’elle, il sentit son cœur battre la chamade et intérieurement il reconnut qu’elle valait facilement 50 à 60 millions. S’il arrivait à l’acheter à 35, il aurait réalisé l’affaire de sa vie. Il se gratta la tête et demanda à Kamel.
- Tu la vends à combien ?
- Rabah te l’a dit, non ? A 35 millions et ce n’est pas vraiment son prix. Mais comme tu es l’ami de Rabah et qu’il m’a souvent rendu service, elle est toi pour
35 ! Mabrouk aâlik si tu la prends…
- Merci, merci… Et pour les papiers ? Comment fait-on, Monsieur Kamel ?
- Les papiers, il faut les faire… Si tu n’as pas le temps, il n’y a pas de problème. Tu me donnes ta carte d’identité et je m’occupe de tout. Moi, je suis libre. En principe, les papiers seront prêts après-demain. On s’appelle, tu me donneras l’argent et je te donne les papiers et les clefs de la voiture.
- Oh ! Formidable ! Oh ! merci, merci, monsieur Kamel !
- Ce n’est pas moi qu’il faut remercier mais ton ami Rabah. Il m’a dit que si je ne te la vendais pas à 35 millions, il ne m’adresserait plus la parole.!
Au moment où Samir et Rabah allaient prendre congé de Kamel, celui-ci les
retint !
- Ah ! une dernière chose, Monsieur Samir, si quelqu’un te demande combien tu l’as achetée, réponds 75 millions…Si tu dis que tu l’as achetée à 35 millions, tu vas nous casser le marché et le business !
- Ah ! oui… j’ai compris… je répondrai que je l’ai payée à 80 millions !
Deux jours plus tard, Samir entra en possession de la belle voiture. Quelle ne fut la surprise de ses collègues de travail lorsqu’ils le virent arriver au bureau à bord d’une rutilante Clio blanche. On lui demanda combien il l’avait achetée et il répondit 80 millions. Et quand on lui eut fait savoir qu’il aurait pu ajouter une petite somme et il en achèterait une neuve, il répliqua alors que cette voiture-là était
« française » c’est-à-dire qu’elle était destinée au marché français et qu’elle contenait beaucoup d’accessoires que ne comportent pas les voitures destinés aux pays émergents. Bref, il répéta tout ce que se disait dans la rue au sujet de la fiabilité des voitures importées par les concessionnaires sans savoir ce que valaient toutes ces affirmations.
Une semaine plus tard, Samir fut arrêté à un barrage de la gendarmerie nationale. On lui demanda les papiers de la voiture et il les leur remit. Les deux gendarmes se consultèrent un moment. Puis ils lui demandèrent de sortir de la voiture. Et c’est là qu’il apprit que les papiers étaient faux.
- Ces papiers sont faux ?
- Vous ne le saviez pas ?
- Non… J’ai acheté cette voiture il y a une semaine chez quelqu’un que je considère comme digne de confiance. C’est l’ami d’un ami…
- Et généralement, quand les papiers d’une voiture sont faux cela signifie qu’elle a été volée.
- Vous voulez dire que j’ai acheté une voiture volée ?
- C’est ce que nous découvrirons ensemble.
Samir fut emmené à la brigade de gendarmerie de Rouiba où on lui signifia au bout d’un moment son arrestation pour s’être trouvé au volant d’une voiture volée et muni de faux papiers administratifs.
Il clama son innocence et se dit victime d’une machination ourdie par un certain Kamel. Ce dernier fut arrêté à son tour le jour même et à bord d’une Renault
25…volée aussi ainsi que l’attestaient, entre autres, les faux papiers qu’il avait présentés aux gendarmes.
Présenté au tribunal de Rouiba, Kamel et Samir (accusé pour sa part de recel et d’usage de faux) ont écopé de 5 ans de prison ferme et d’une amende de
20.000 DA chacun. Il y a quelques jours, la cour de Boumerdes a confirmé cette peine.

Par : Kamel Aziouali

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