"Tumulte des mots", une mise en espace tirée du texte "Sans voile, sans remords" de Leïla Aslaoui-Hemmadi a été présentée mercredi, à Alger, au palais de la culture Moufdi Zakaria, ravivant le souvenir d’une blessure ouverte au cúur des évènements de la guerre de Libération.
Dans une représentation statique conçue par Ziani Cherif Ayad, Amel Himer et Wassila Arridj Bendaoud ont donné vie à un texte dense et profond aux contours poignants racontant le mutisme d’une mère qui s’est résignée au silence face à l’histoire et au personnage controversé de sa fille aînée, Nouria.
Ayant été aidée à fuire la prison coloniale par un des geôliers, Nouria a éveillé des soupçons et fait l’objet de rumeurs faisant planer le spectre de la femme impure, ce qui a poussé son frère aîné a taire son histoire. Soutenue par les airs expressifs donnés par le violon de Noureddine Saoudi, la trame évolue dans une double temporalité, évoquant par moments, la lutte de l’Algérie pour l’indépendance et dans d’autres, la tragédie nationale des années 90.
Bahidja, vivant dans le passé et le présent, est en quête de vérité sur le sort réservé à sa súur aînée Nouria. Sans doute, tente-elle de trouver des réponses dans la grande histoire familiale, à la disparition tragique de son fils Redouane, éliminé après avoir basculé dans le terrorisme durant la décennie noire.
Affichant une curiosité excessive et une envie de savoir, Bahidja agace sa mère qui a fait le choix de rester emmurée dans son silence laissant le soin au temps d’atténuer les douleurs de l’absence et guérir les blessures antérieures.
De cette dualité entre une mère qui a peur d’affronter le passé et une fille qui manifeste une soif de savoir pour pouvoir comprendre et avancer, la tragédie s’installe donnant lieu à des moments émouvants et des situations bouleversantes.
Pendant plus d’une heure de temps, les deux comédiennes, portant savamment le texte, se sont donné la réplique dans des échanges éloquents et contradictoires à la rhétorique qui renvoie à l’amertume et au regret entretenant les ambiguïtés et nourrissant les antagonismes.
Tumulte des mots s’inscrit dans la continuité des expérimentations menées par Ziani Chérif Ayad qui propose "de partir d’un texte non dramatique et avancer par paliers dans le but d’une mise en espace qui donnera lieu à une présentation au public" a-t-il déclaré rapporte l’APS .
"D’autres étapes suivront, notamment celle d’une éventuelle traduction vers la langue théâtrale intermédiaire (dialecte populaire) qui permettra de toucher un plus large public", a ajouté le metteur en scène.
A la tête de "Gosto théâtre", Ziani Chérif Ayad tente d’initier les prémices d’un nouveau théâtre aux allures contemporaines et post-modernes, en phase avec l’exercice actuel du 4e art dans le monde. Dans "L’autre théâtre", la relation de proximité avec le public et sa disposition rapprochée de la scène, motivent son implication dans les évènements et la trame proposés.