Le drame sur l’esclavage "12 Years a Slave" a été sacré meilleur film aux Oscars, laissant "Gravity" faire une razzia sur les prix techniques, lors d’une soirée teintée de politique qui a également distingué Cate Blanchett et Matthew McConaughey.
"Je dédie ce prix à toutes les personnes qui ont enduré l’esclavage et aux 21 millions de personnes qui sont encore sous le joug de l’esclavage aujourd’hui", a déclaré le Britannique Steve McQueen en recevant l’Oscar du meilleur film, aux côtés de son co-producteur Brad Pitt, qui a vécu le travail sur le film comme "un privilège". "12 Years a Slave" raconte le destin édifiant et véridique de Solomon Northup, un homme libre enlevé et réduit à l’esclavage pendant 12 ans quelques années avant la Guerre de Sécession.
Le film a également remporté le trophée du scénario adapté et valu à la Mexicano-kenyane Lupita Nyong’o, devant une salle debout, l’Oscar du second rôle pour son rôle d’esclave martyrisée. L’actrice de 31 ans -- dont c’est le premier film -- a déclaré entre deux sanglots : "Que cette statuette dorée me rappelle toujours, ainsi qu’à tous les enfants, que quelle que soit votre origine, vous avez le droit de rêver".
La politique s’est également invitée dans le discours de remerciements de Jared Leto, Oscar du second rôle pour son rôle poignant de transsexuelle séropositive dans "Dallas Buyers Club". L’acteur de 42 ans s’est ainsi adressé "à tous les rêveurs du monde, dans des endroits comme l’Ukraine et le Venezuela", actuellement en proie aux soubresauts politiques. "Je veux leur dire: nous sommes là (...) et nous pensons à vous".
"Dallas Buyers Club", un drame sur l’aube de la pandémie de sida, a également enlevé les Oscars du maquillage et du meilleur acteur pour Matthew McConaughey, qui a remercié Dieu et sa famille, avant de lancer avec son fort accent texan son expression fétiche, répétée -- et raillée -- à l’envi pendant toute la saison des prix hollywoodiens : "All right, all right, all right...".
Une première pour Disney
L’Oscar de la meilleure actrice est allé, sans surprise, à Cate Blanchett pour son rôle de grande bourgeoise déchue dans "Blue Jasmine" de Woody Allen. L’odyssée galactique "Gravity", signée Alfonso Cuaron, a pour sa part largement dominé les prix techniques avec sept trophées, dont celui de meilleur réalisateur, qui revient pour la quatrième année consécutive à un cinéaste étranger. "Gravity" s’est également arrogé les Oscars des effets spéciaux, du son, du mixage, du montage, de la musique et de la photographie.
Parmi les autres lauréats, le film français "Mr Hublot" a remporté l’Oscar du court métrage d’animation, au nez et à la barbe de "Get A Horse !" de Disney, qui faisait figure de grand favori. Le studio de Mickey s’est consolé avec le premier Oscar de son histoire pour un long métrage animé, avec "La reine de neiges", et le trophée de la meilleure chanson pour son tube "Let it go", face aux Irlandais de U2.
L’Oscar du film étranger est allé à l’Italie pour "La Grande Bellezza" de Paolo Sorrentino, confirmant tous les pronostics. Les scénarios se sont partagés entre "12 Years a Slave" (adaptation) et "Her" (script original). Enfin, "Gatsby le magnifique" a décroché deux statuettes: meilleurs costumes et décors. "Twenty feet from stardom", qui retrace la carrière d’une poignée de choristes qui n’ont jamais connu la gloire, a remporté l’Oscar du meilleur documentaire.
Un tweet record
L’animatrice vedette de la télévision américaine, Ellen DeGeneres a multiplié les improvisations avec les stars de l’audience, donnant lieu à un "selfie" à faire rêver tous les photographes amateurs, entourée notamment de Meryl Streep, Julia Roberts, Brad Pitt et Angelina Jolie. La photo, retweetée plus de 2,1 millions de fois, est devenue en moins d’une heure l’image la plus virale de l’histoire de Twitter, pulvérisant le record jusqu’alors détenu par la photo diffusée lors de la réélection de Barack Obama. Le grand perdant de la soirée restera "American Bluff", le thriller aussi brillant que loufoque de David O. Russell, qui partait pourtant avec 10 nominations.
Réussissant l’exploit d’être nommé pour le meilleur film, le meilleur réalisateur et les quatre catégories d’interprétation, le film est reparti bredouille. Même punition pour "Le loup de Wall Street" de Martin Scorsese, parti les mains vides malgré cinq nominations. Leonardo DiCaprio, qui était nommé pour la cinquième fois de sa carrière, devra encore attendre.