Dans le cadre de la célébration du 50e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, le Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc) et l’Université d’Alger II organisent, les 5 et 6 décembre prochain, un séminaire national ayant pour thème : «Toponymie et anthroponymie en Algérie : politique et pratiques, 50 ans après l’Indépendance». Ces deux journées d’études seront axées autour de trois projets : toponymie et normalisation des noms de lieux (usages et orthographes officiels en Algérie), anthroponymie et état civil (nomination et écriture(s) des patronymes en Algérie) et les prénoms algériens (mode d’attribution et socialisation).
D’après la présentation de ce séminaire par le comité scientifique et organisationnel, «depuis l’Indépendance, des efforts nationaux sont fournis pour mettre en place des systèmes de dénomination nationale intégrée. Beaucoup de ces actions ont été, d’abord et surtout, en réaction à une large entreprise historique de déstructuration et restructuration des modes de nomination traditionnelle algérienne et / ou maghrébine menée par l’armée et l’administration coloniales.»
D’ailleurs, ce séminaire a pour centre d’intérêt les volets historique, linguistique, géographique, sociologique, psychologique, anthropologique et littéraire de cette articulation multiforme qu’est la toponymie ou les noms de lieux, l’anthroponymie ou les noms de personnes.
Il faut rappeler que la toponymie et l’anthroponymie couvrent la grande masse des noms de lieux et de personnes avec toutes les catégories qu’elles supposent : les oronymes (noms de montagnes), les hydronymes (noms de cours d’eau), les odonymes (noms de rues), les patronymes, les prénoms, les surnoms, les sobriquets, les pseudonymes, etc.
Il faut aussi gérer cette masse de désignations, plusieurs millions de noms propres de lieux et de personnes, non seulement comme objet d’étude pour les historiens et les géographes par exemple, mais aussi pour les fonctions économiques, sociales, culturelles, patrimoniales qu’elle remplit : culture, tourisme, sécurité, secours, aviation, cadastre, communication, économie, territoire, postes, etc. Sa législation fait l’objet dans tous les pays du monde d’une large concertation entre les institutions pour sa préservation, son recensement périodique, son enrichissement et particulièrement pour sa normalisation. Sur un plan institutionnel, le premier rôle de la toponymie et de l’anthroponymie est de permettre l’identification, le repérage rapide, et en toute sécurité, d’un lieu ou d’une personne donnés. C’est pourquoi des règles bien établies consacrent l’attribution, la modification, le changement des noms propres de lieux et de personnes. Il devait en être de même pour leur(s) écriture(s). Dans le contexte de la mondialisation, autant la mobilité des hommes et des biens est permise, autant la mobilité orthographique n’est plus tolérée.
Pourquoi ce séminaire ?
Les deux journées d’études vont permettre, à l’occasion de la célébration du 50e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie de premièrement, rassembler tous les chercheurs algériens ayant travaillé sur les questions de dénomination. En second lieu, de dresser un état de l’art, rétrospectif d’abord et prospectif après, sur les politiques et les usages de la toponymie et de l’anthroponymie en Algérie, toutes disciplines confondues, en faisant ressortir les invariants structurants de cette identité nationale onomastique, dont la «filiation est établie depuis la plus haute antiquité» (Lacheraf, 1999), dans ses dimensions plurilingues, multilingues, culturelles et symboliques les plus fécondes. Y seront également soumis à l’analyse les types de dysfonctionnements structurels et conjoncturels qu’il faut constamment revisiter, eu égard à l’apparition de nouveaux comportements dénominatifs (formels et/ou informels), à l’avènement de nouveaux résultats de recherche mais également suite à l’introduction de technologie moderne dans la gestion des noms de personnes et des lieux.
Enfin ce séminaire a pour objectif de recentrer le débat en apportant un éclairage sur les raisons historiques relatives à la multiplicité des écritures des noms de lieux et de personnes en Algérie, que d’aucun considèrent comme source de dysfonctionnements institutionnels, donc de préjudices économique, administratif mais aussi social et psychologique (état civil, notariat, justice, sécurité routière…). En sommes, les intervenants auront à débattre autour de différents thèmes à l’instar du «patrimoine algérien des noms propres», de «la gestion coloniale du patrimoine onomastique algérien», des «institutions nationales et les écritures des noms propres algériens»…