Primé aux festivals de Berlin, Toronto, San Sebastian (Espagne) en 2012, et distingué par le Prix Goya en 2013 du meilleur film documentaire, le film espagnol "Les enfants des nuages", réalisé par Alvaro Longoria et produit par Javier Bardem, a été présenté pour la première fois mardi dernier en France aux journalistes français et étrangers.
Ce film sur le conflit du Sahara occidental se présente comme un voyage très personnel de Javier Bardem, guidant le spectateur sur le chemin sinueux de la diplomatie mondiale devant un problème de décolonisation et dévoile la réalité d’un peuple abandonné.
Le documentaire, d’une durée d’une heure 20 minutes, trace les grandes lignes de la situation de marginalisation politique du peuple sahraoui, plongé depuis 38 ans dans la tourmente de l’occupation marocaine et de la passivité du gouvernement espagnol face à l’occupation de son ancienne colonie par le Maroc.
Il traite également de la lutte armée contre le Front Polisario, de la répression qui s’exerce contre la population civile du Sahara Occidental, des connivences américaines pendant la Guerre froide, du véto systématique de la France à l’Onu contre l’application de mesures qui garantiraient le respect des droits de l’Homme dans les territoires occupés et de l’absence d’organisation d’un référendum pour l’indépendance du peuple sahraoui.
Plusieurs personnalités politiques ont été interviewées par Javier Bardem lors du documentaire pour dénoncer la situation de stagnation dans laquelle est plongé le règlement de ce conflit, telle que la militante sahraouie des droits de l’Homme Aminatou Haïdar, l’ancien chef du gouvernement espagnol, Felipe Gonzalez ou l’ancien ministre français des Affaires étrangères Jean-François Poncet et l’envoyé personnel du Secrétaire général de l’Onu pour le Sahara occidental Christopher Ross.
Le documentaire dévoile également les entretiens refusés par l’ancien chef du gouvernement espagnol José Maria Aznar, de l’ancien Secrétaire général de l’Onu Kofi Annan, l’ancien chef de la diplomatie espagnole Miguel Angel Moratinos, l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing ou encore les autorités marocaines.
Il explique et montre également les vaines tentatives de Bardem pour remettre au président Zapatero la liste des 230.000 signatures rassemblées en Espagne en faveur de la cause sahraouie. Des témoignages d’enfants sahraouis traumatisés après la perte de leurs parents tués par l’armée marocaine ou encore celui de militants violemment torturés par l’armée d’occupation marocaine, n’ont pas non plus été oubliés dans le récit.
Lors de la conférence de presse conjointe qui a suivi la projection et réuni son réalisateur, Aminatou Haïdar, et Kerry Kennedy, présidente du Centre Robert F Kennedy pour la justice et les droits de l’Homme, Javier Bardem est revenu sur l’initiative de la réalisation de ce documentaire militant et dénonciateur de la violation des droits de l’homme au Sahara occidental par le Maroc. Il a expliqué que ses auteurs ont voulu mettre sous les projecteurs la situation d’un peuple et d’un conflit "qui sont généralement poussés à l’arrière-plan des agendas politiques et diplomatiques des pays".
Un film né d’une volonté personnelle de comprendre ce conflit
"Mon désir de faire ce film est né d’une volonté toute personnelle de comprendre ce conflit sahraoui qui traîne depuis des années", a-t-il dit, ajoutant qu’il est "important" d’être aujourd’hui présent en France pour présenter ce film documentaire, espérant que celle-ci, puisse avoir une mission à mener dans son règlement, appelant, par-là même, la presse française à "faire preuve d’impartialité et ne pas entourer la question sahraoui d’opacité".
Le réalisateur Alvaro Longoria a de son côté indiqué que ce documentaire "doit nous conduire tous à la vigilance à soutenir les droits de l’Homme pas uniquement dans nos propres pays, mais partout dans le monde".
Il a saisi cette opportunité pour indiquer que la distribution de ce documentaire a été très difficile à obtenir en France en raison de la position de ce pays vis-à-vis de ce conflit mais aussi en raison de la présence d’une importante communauté marocaine qui perçu ce documentaire comme "anti-marocain", alors qu’en fait, il expose "une situation déplorable qui existe réellement au Sahara Occidental occupé". Kerry Kennedy, a rappelé à cette occasion, que chaque année, le Conseil de sécurité des Nations unies "déçoit le peuple sahraoui en refusant d’inclure la question des droits de l’homme dans le mandat de la Minuro".
La militante sahraouie des droits de l’homme Aminatou Haidar, a quant à elle, appelé la presse française à "faire la lumière" sur la situation qui prévaut au Sahara occidental dont "la violation systématique des droits de l’homme par le Maroc", souhaitant que la France puisse jouer avec toutes ses institutions
"un rôle de maintien de la paix" non seulement au Sahara Occidental mais aussi dans toute la région pour "éviter une réponse violente de la part des nouvelles générations sahraouies sur le non-respect des droits de l’homme, de l’égalité et de la tolérance". Après avoir finalement obtenu un droit de distribution en France, le documentaire "Les enfants des nuages" sera projeté dans les salles parisiennes à compter de la fin du mois d’avril prochain.