Le Midi Libre - Culture - «Pour sauver le tapis, sauvons l’artisan»
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Ben Mesbah Fatima, maîtresse tisseuse, au Midi Libre
«Pour sauver le tapis, sauvons l’artisan»
18 Mai 2010

Des séances d’initiation au tissage sont organisées au profit des visiteurs qui le voudraient au niveau du Palais des Raïs. Trois maîtresses tisseuses s’y adonnent à cœur joie. Nous avons rencontré l’une d’elles, Ben Mesbah Fatima, une professionnelle du domaine depuis neuf ans et également enseignante de tissage au Musée national des arts et traditions populaire à la Casbah d’Alger. Notons que le festival de la création féminine se poursuivra jusqu’à la fin de la journée.

Quelles sont vos impressions sur ce premier festival national consacré au tissage ?
Je pense que cette initiative a permis aux artisans de faire connaître ce métier au grand public, et d’avoir eu l’opportunité de captiver son intérêt. Les gens qui sont venus nous ont souvent demandé des détails et voulu connaître les différentes étapes du tissage et il y a eu même des personnes qui ont fait part de leur intention de suivre une formation afin d’apprendre.

Est-ce que vous avez déjà pris part à des manifestations de ce genre ?
Oui. J’ai déjà pris part à plusieurs manifestations à travers le territoire national dont celles qui ont lieu à Tipasa, Annaba et d’autres villes. L’année dernière, j’ai présenté ici même au Palais du Raïs des tapis.

Est-il facile de fabriquer un tapis ?
Ça prend en principe trois mois, mais tout dépend des dimensions du tapis qu’on veut confectionner. On doit acheter d’abord la laine, soit de mouton, soit chèvre. On doit la laver avant de pouvoir la passer au tissage, la carder, la filer et la teindre. La taille du tapis se règle sur le métier à tisser en faisant glisser les deux tiges latérales et les tiges supérieures et inférieures qui ajustent respectivement la largeur et la longueur de l’ouvrage. La chaîne et la trame s’enroulent autour des deux barres, ce mouvement permet le dévidement à nouveau de la chaîne au fur et à mesure que le travail avance. Pour obtenir un tapis de grande taille, on fait enrouler la trame autour de la barre inférieure. Dès que tout est fin prêt, on prend place devant le métier à tisser et on attaque un nœud connu sou le nom de « khit el rouh » (fil de l’âme) avant de commencer par lui donner la touche qu’on veut.

Comment faites-vous pour les couleurs ?
La plupart du temps, on les commande auprès d’une teinturerie. A défaut, je le fais à domicile avec des colorants naturels. Pour obtenir par exemple la couleur bleu ciel j’utilise ce qu’on appelle Azar (le Daphné) qui est une plante à fleurs rouges ou blanches, on la trouve généralement chez les botanistes. Après un mélange précis on obtient la couleur voulue pour le motif désiré.

Parlons un peu des motifs, comment faites-vous pour les choisir ?
Il y en a trois catégories. Les plus couramment utilisés sont les motifs stylisés, géométriques et figuratifs. En ce qui me concerne, quand je ne suis pas sûr de mon choix et par peur de faire des erreurs, je dessine tout d’abord sur une fiche cartonnée pour ensuite reprendre le dessin sur la trame. Généralement je conçois mon tapis sur deux phases qui se terminent par ce qu’on appelle chez nous « El mihrab ». Mais dans la majorité des cas ce sont des motifs de ma région de Khenchela que j’utilise. Il faut dire que chaque tapis se distingue par ses motifs et sa dimension. La qualité du produit dépend en fin de compte de l’artisan qui le fabrique. C’est pour cela qu’il il faut préserver ce patrimoine afin de le transmettre aux générations futures.

Par : Karima Hasnaoui

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