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Virée au Palais Rahat eddey
Un site historique livré à l’usure du temps
1 Décembre 2008

Niché au milieu d’une végétation dans l’enceinte du lycée Djillali-Ghanen qui s’ouvre sur une vue imprenable du côté de la Vallée des consuls, surplombant la baie ouest, cet édifice ottoman, dont les parois crépies, nous édifie sur l’opération réhabilitation. Mais depuis plus d’une année, le maître d’ouvrage a levé le pied sur cette belle demeure fahs du XVIIIe siècle.
Plusieurs demeures somptueuses de l’ère ottomane font l’objet et ce, depuis plusieurs années de travaux de restauration d’urgence, à l’image de dar Djenane Lakhdar (Madania), la villa Mahieddine, Djenane Raïs Hamidou (dite villa du Traité sise à El Biar), fort de Bordj el Kiffan, palais du dey Hussein, palais Boulkine (daira d’Hussein-Dey), et la villa Abdelatif qui vient réceptionnée... Aussi, faute de ressources financières conséquentes et de spécialistes en restauration, les travaux de réhabilitation de certains monuments classés patrimoine national vont, faut-il souligner, cahin caha, au point de nous interroger si ces bâtisses qui revêtent le caractère historique ne sont pas abandonnés à leur triste sort. La direction de culture de wilaya s’est mobilisée en annonçant en 2005, le lancement des travaux d’urgence sur les sites historiques sus évoqués. Tant mieux… Le palais Rahat eddey (Bologhine) ou Djenane Eddey (jardin de repos du dey) n’échappe pas à la ‘’règle’’ de la liste du patrimoine à arracher de l’anonymat. Cette demeure datant du XVIIIe siècle, une des plus anciennes villas extra muros d’Alger (fahs), fait partie de cet ensemble de sites historiques que certains responsables et le comité du Vieil Alger n’ont eu de cesse d’appeler – durant les années cinquante et soixante – de leurs vœux pour le sauver de la décrépitude, lit-on dans certaines correspondances. Niché au milieu d’une végétation dans l’enceinte du lycée Djillali Ghanen qui s’ouvre sur une vue imprenable du côté de la Vallée des consuls, surplombant la baie ouest, cet édifice ottoman, dont les parois crépis sur lesquels est dressé un échafaudage, nous édifie sur l’opération réhabilitation. Mais depuis plus d’une année, le maître d’ouvrage a levé le pied. Le bâtiment est-il livré une nouvelle fois à l’outrage du temps ? ‘’Non’’, répond de manière péremptoire, un archéologue exerçant au niveau du département patrimoine à la direction de la culture de wilaya, expliquant qu’ ‘’après étude, des travaux d’urgence ont été réalisés en 2006, dans le but de conforter la bâtisse historique en attendant la phase des travaux de restauration’’. Depuis, c’est le stand by, aucune opération n’est entreprise. Dans les abords de l’édifice, ce sont les herbes folles qui, couvrant nos pieds, envahissent les lieux. Des étais consolident le porche ogival ainsi que les voûtes du patio et quelques portiques en tuf qui donnent sur une galerie à deux travées. Quelques carreaux de faïence (zâlaïdj) prêts à céder tapissent encore les colonnes qui ont peine à supporter les claveaux dont les lézardes laissent échapper la lumière du jour.
On nous apprend, par ailleurs, que son excellence l’ex-ambassadeur des Etats-Unis venait prendre le pouls de l’avancée de l’opération restauration. Nous n’osons pas nous aventurer davantage. Le second niveau n’est pas assez solide pour supporter notre charge, nous avertit-on. Des pans de murs menacent ruine de l’ensemble du second niveau. Aucune carte ni source historique ne permet de connaître avec exactitude l’origine de sa réalisation. Les archives, à vrai dire, se montrent «chiches» à ce sujet. «Seule une analyse architecturale poussée et une étude comparative permet de penser, selon un attaché de recherche, M. Messelem – en poste en 1969 dans l’établissement technique –, que sa fondation remonte aux environs de 1775», lit-on dans une correspondance rangée dans un pan d’archives au niveau de la bibliothèque du Centre des arts et de la culture. Ni la Bibliothèque du Cneh ni celle du Bardo n’assouvissent notre curiosité sur cette villa mauresque qui, après avoir été érigée par un des deys comme une demeure de campagne, servit en 1780 de résidence au consul de France, Dubois Thinville, puis de 1800 à 1827 comme résidence au consul britannique, Blanckley, avant qu’elle ne devienne, à l’époque coloniale propriété de la famille du général Laquière.
Les ouvrages disponibles des historiens Lucien Golvin, Henri Delmas de Grammont, Albert Devoulx, Henri Klein, George Marçais, Charles André Julien…..que nous avons furetés ne pipent mot sur cette maison de campagne bâtie à l’endroit le plus élevé de la falaise dominant la mer, que Mrs Broughton qualifie, pourtant, de «pur joyau» dans son livre édité en 1839 «Six ans de résidence à Alger» (1806-1812). Il est à souligner que Alger et sa périphérie (fahs) compte des dizaines de demeures de style datant de l’époque ottomane. Ces bâtisses qui sont répertoriées au niveau de la bibliothèque du palais des Raïs méritent, selon des archéologues, d’être restaurées et classées dans le patrimoine national.
F. B. H.

Par : Farouk Baba-Hadji

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