Le Midi Libre - Culture - «L’écriture, pays d’adoption de l’écrivain exilé»
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Waciny Laâredj anime une conférence au Caire
«L’écriture, pays d’adoption de l’écrivain exilé»
6 Fevrier 2008

Waciny Laâredj a exposé sa perception de l’exil lors d’une conférence qu’il a donnée à l’occasion de la quarantième foire internationale du livre du Caire. Menacé de mort par les terroristes islamistes comme des milliers d’autres intellectuels, l’écrivain s’est réfugié à Paris en 1994. «Le cordon ombilical avec le pays n’a jamais été coupé» a déclaré, dimanche, l’artiste cité par l’Aps. Cette situation de séparation avec une terre que l’on chérit, Waciny l’a qualifiée de «transition volontaire ou obligatoire de l’écrivain de son environnement d’origine vers un autre espace géographique sous l’effet de conditions données». Cette transition lui a permis de «transformer le nouvel environnement géographique en un espace de mémoire pour y inscrire les peines de son peuple et de son pays». Il a ajouté qu’ayant intériorisé ses références et repères, l’écriture est devenue pour lui un pays d’adoption et un canal à traverslequel il transmet les peines et les souffrances de son peuple. «La vie continue et vous porte vers la créativité et il n’est de tel pour un créateur que de transformer ce malaise existentiel en un facteur d’ouverture aux autres et d’en faire une source de perpétuelle création», a également déclaré Waciny Laâradj selon les mêmes sources. Il écrivait en 2006 dans son article intitulé «La vie sous l’angle des mots» : "C’est la littérature qui m’a ouvert la voie des terres, la route des cieux et les chemins des îles, les universités et les prisons, le pays d’ici et d’ailleurs. Elle va plus loin encore, puisqu’elle nous met face à notre imagination qui travestit le réel pour créer un autre qui déplace et bouscule nos fausses assurances. La fiction n’est autre que notre vérité enfouie, juste, noble et sans calcul.» Ainsi, l’écrivain natif de Tlemcen semble avoir transcendé les souffrances du déracinement par une création littéraire incessante. Enseignant de Littérature maghrébine à l’université de Paris III-Sorbonne nouvelle et à l’université d’Alger ses activités ne l’empêchent pas d’être l’un des auteurs algériens contemporains les plus féconds. Ses œuvres écrites à l’étranger sont notamment : La maîtresse des lieux (1995)- La gardienne des ombres, (1996), Le Ravin de la Femme Sauvage (1997), Mémoire d’eau (1997), Le miroir des aveugles (1998), Kabylie : la lumière des sens, (1998), Fleurs d’amandier (2001), Les balcons des mers nordiques, (2001), Les Algériens (2003), L’impasse des invalides (Biographie, 2003), Le Livre de l’Émir (Histoire, 2006). «Il s’agit de témoignages vivants de ce que j’ai vécu et de ce qu’a vécu mon pays», a expliqué Waciny Laâradj. L’écrivain a obtenu en 2007 le prix des grandes Lettres des Emirats arabes unis pour « Le livre de l’Emir » paru au éditions Dar El-adab de Beyrouth et consacré à l’Emir Abdelkader. En 2006, après réception du prix des Libraires, il écrit : «Oui, la littérature n’est pas un lieu de règlement de comptes, c’est plus notre façon de voir la vie, de l’aimer et de la défendre. Mais, faut-il d’abord savoir faire son deuil avec les débris tranchants de l’histoire et purger la mémoire des assurances les plus aveuglantes et les plus périlleuses. La littérature ne peut offrir le bonheur complet sauf si celui-ci s’installe dans la vie et non dans la mort. C’est peut-être là notre manière de défendre l’idéal de l’écriture qui n’est autre que ce rêve inassouvi qui reste toujours à ré-inventer constamment.» Waciny a également écrit à propos de ce territoire intérieur que tout écrivain porte en lui : «Existe-il un troisième pays pour l’écrivain ou un quatrième ? On le sait bien, l’écrivain ne s’identifie pas seulement à une terre mais à plus, une aire dans toutes ses contradictions, à un siècle avec ses bouleversements les plus insensés, à un espace à ciel ouvert, culturel et sans murailles visibles. Avec tout cet arsenal, l’écrivain s’installe dans l’impossible définition des lieux, c’est-à-dire dans un territoire pluriel et indéfinissable qui n’a de nom qu’un simple mot : l’écriture.»

Par : Karimène Toubbiya

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