«J’ai formé ce que j’ai pu former et je pense avoir fait ce que j’ai pu», a avancé humblement Sid-Ahmed Serri à l’occasion de l’hommage qui lui a été rendu dernièrement à Paris par le Centre de Recherches Interdisciplinaires sur les Mondes Ibériques Contemporains, relevant de l’Université de Paris-Sorbonne, dirigé par Sadi Lakhdari.
Un hommage par lequel les initiateurs de l’événement voulaient, en collaboration avec des élèves de Sid-Ahmed Serri installés en France et qui œuvrent pour la sauvegarde et la promotion du patrimoine musical algérien, mettre à l’honneur de la Sanaâ d’Alger un genre musical arabo-andalou issu de l’école de Cordoue et développé par l’école d’Alger au retour des Arabes d’Andalousie, et dont Cheikh Sid-Ahmed Serri reste, du haut de ses quatre-vingt ans et malgré le poids des années, l’une des figures algériennes les plus représentatives. Cet hommage a donné lieu à une conférence suivie d’un concert de musique et de chants arabo-andalous, par lequel
M. Lakhdari voulait, avec des élèves de Sid-Ahmed Serri tels Farid Bensarsa, directeur de l’Ensemble El-Mawsili et Saâd-Eddine Elandaloussi, musicien, musicologue et responsable de l’ensemble Es-Safina, inviter le public, venu nombreux, au voyage. Notons par ailleurs que Cheikh Sid-Ahmed Serri, ce grand maître de la Sanaâ d’Alger, a été élu en avril 2006 président de la Fédération nationale des associations de musique classique algérienne (FNAMCA), et poursuit son action en faveur de la préservation et de la promotion de cet art. «J’ai essayé de défendre cette musique pour mieux la sauvegarder», dira le maître de la Sanaâ Dzirya dans son intervention prononcée à l’occasion de l’hommage que lui a rendu la prestigieuse université parisienne avant de souligner qu’il a enregistré «la totalité de ce qu’il sait du répertoire de la musique arabo-andalouse de l’Ecole d’Alger». Sid-Ahmed Serri a profité de l’occasion pour rendre hommage, à son tour, à son maître Abderrezak Fakhardji (1911-1984). «Fakhardji, dira-t-il, était un des plus grands détenteurs de ce patrimoine transmis oralement. J’ai appris le maximum de ce que m’a confié mon maître.» Il donnera un aperçu sur son itinéraire artistique, mais aussi sur son parcours d’enseignant dont le talent, plus que le hasard, l’a aidé à passer, en 1952, du statut d’élève à celui d’enseignant.
Exprimant leur reconnaissance, ses élèves présents à cet hommage et qui sont «les tenants de la continuité de cet art», selon l’expression de l’historienne Nadia Lakhdari, la principale organisatrice de cette soirée, lui ont dédié l’ensemble de leur travail réalisé en France.
Ce travail vise à transmettre aux jeunes générations ce patrimoine culturel algérien, dans le double souci de le préserver et de le promouvoir. Cet objectif a été clairement exprimé par Farid Bensarsa, directeur de l’Association El-Mawsili et de son ensemble musical du même nom.
Il n’a pas caché son émotion de se retrouver, pour la première fois depuis de nombreuses années, devant son maître, «débordant de générosité», a-t-il dit. Se voulant digne héritier, M. Bensarsa a souligné que Sid-Ahmed Serri a donné à ses élèves «tout ce qu’il pouvait transmettre». Il est allé au-delà de la musique en trouvant la meilleure manière de la porter, donc de l’aimer et de la préserver.
Cette conférence a donné lieu à plusieurs communications, dont celle de Saadane Benbabaali, maître de conférences en lettres arabes à l’université Paris III, sur les «Mouachahat», cette autre poésie chantante.
La danse et le «secret» du bien-être dans les traditions arabo-musulmanes étaient les autres thèmes abordés lors de ce rendez-vous.
Ce voyage s’est poursuivi, avec les n’qlabats et les noubas interprétées par Es-Safina, un ensemble musical arabo-andalou dirigé par Saâd-Eddine El-Andaloussi.
En apothéose de cette soirée qui lui a été dédiée, le maître de la Sanaâ d’Alger a offert quelques opus aux mélomanes venus, nombreux, assister à l’hommage que lui rendu la prestigieuse université française.