Enfin parmi les siens ! la Joan Baez algerienne, star internationale de la World music dès le début des années 2000, a renoué avec son public samedi dernier après une longue absence.
L’ interprète de Raoui, Paris, Matebkiche n’a effectivement pas donné de concert dans sa ville natale depuis près de dix ans. Un éloignement loin des scènes algériennes que l’artiste dit avoir "mal vécu". "C’est vraiment un pincement au coeur de ne pas chanter dans son pays alors que des artistes étrangers sont eux invités", a-t-elle soufflé.
Dans un théâtre de verdure à moitié rempli de spectateurs, Souad Massi, accompagnée de son orchestre (percussions, guitare-basse, guitare électrique, banjo, oûd et claviers), l’enfant de Bab El-Oued, a rendu hommage aux grands poètes arabes en mettant en musique quelques-uns de leurs textes à travers des oeuvres de son nouvel album opus, visant à faire découvrir une "face cachée du monde arabe", avec des sonorités allant du rock aux musiques d’Amérique latine, en passant par le flamenco et le châabi.
La voix mélodieuse de Souad Massi revisite ainsi les vers d’illustres poètes arabes, tels Zoheïr Ibn Abi Soulma, Imroue El Kaïs, El Mutanabbi et Abou el Kacem Echabbi, entre autres. Ce nouvel album a été réalisé dans le prolongement du spectacle Choeurs de Cordoue, dans lequel la musicienne algérienne a rendu hommage à l’époque médiévale de cette ville espagnole, un bouillon culturel, intellectuel et un espace de tolérance sans commune mesure. Une façon à elle de s’opposer aux horreurs perpétrées par l’extremisme religieux.
Ce savant mélange de poèmes de haute volée et de musiques du monde s’est avéré particulièrement efficace, grâce, notamment, aux musiciens du groupe qui ont rivalisé de virtuosité durant les deux heures du spectacle. Parmi les chansons marquantes de l’album, le poème Ila Toghat El Alaam un texte dénonçant la tyrannie, écrit par le grand poète tunisien Abou El Kacem Echebbi (1909-1934) et qui a été présenté avec les rythmes entraînants du reggae.
"Je dédie cette chanson à toutes les victimes du terrorisme et de l’injustice, ici et à travers le monde", dira Souad Massi en évoquant la Tunisie, frappée vendredi par un sanglant attentat terroriste. En plus des titres de son dernier album, la chanteuse a également repris les succès de ses précédents opus, des balades dans le pur style de la musique folk, chantées en arabe algérien et qui ont fait la renommée internationale de l’artiste.
Plus réactif à ces chansons accessibles par la langue, le public a été conquis par ces titres mélancoliques, particulièrement par Erraoui (le conteur) un des premiers succès de la chanteuse, repris en choeur par les spectateurs dans un moment de grande complicité avec l’artiste.
Née le 23 août 1972 à Bab El-Oued (Alger), Souad Massi compte parmi les artistes algériens de renommée internationale. Dejà petite, elle se passionne pour la musique et découvre les chansons du maître du chaâbi, El Hachemi Guerouabi, puis le rock et la musique américaine grâce à ses frères.
En 1989, elle fait ses débuts sur scène, en accompagnant un groupe de flamenco Triana d’Alger avec lequel elle fera non seulement des scènes, mais aussi des passages télévisés sur les chaînes algériennes. En 2001, après la sortie de son premier album Raoui mélange de rock et traditions qui est salué par la critique, la Joan Baez algerienne ne cesse de séduire à travers les quatre points cardinaux.