Le Midi Libre - Culture - Un week-end spécial Algérie
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Festival des cinémas d’Afrique d’Apt
Un week-end spécial Algérie
16 Octobre 2012

Cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. Cinquante années de production cinématographique (sans compter les films tournés par le FLN pendant la guerre). Ce n’est pas une rétrospective du cinéma algérien mais deux moments essentiels de cette cinématographie, la décennie fondatrice 1965-72 et la période contemporaine. C’est dans cette optique que le Festival des cinémas d’Afrique propose les 19, 20 et 21 octobre prochain un week-end spécial Algérie.




La programmation du Festival, du 8 au 14 novembre, fera une large place aux films algériens récents avec, notamment, une carte blanche aux Rencontres cinématographiques de Béjaïa, la venue de Merzak Allouache avec deux films et une Leçon de cinéma.
Ce week-end d’octobre se focalise sur les films fondateurs du cinéma algérien avec un évènement exceptionnel, la venue à Apt d’une personne qui a porté tout ce cinéma, Boudjemaâ Karèche, directeur de la Cinémathèque d’Alger pendant 25 ans. «Boudj», qui est aussi un conteur exceptionnel, présentera les films et animera leur discussion. Le public d’Apt le retrouvera pour une rencontre sur l’histoire du cinéma algérien et la signature de ses deux derniers livres, l’un sur Alger, l’autre sur le cinéaste Mohamed Bouamari.
Le festival des cinémas d’Afrique d’Apt a choisi de retenir des films proches de 1962, très différents, dont chacun ouvre une voie nouvelle et qui sont des œuvres majeures. Aux trois films algériens, les organisateur ont ajouté un film français d’un cinéaste qui, engagé aux côtés du FLN, fut algérien de 1957 à 1970, René Vautier.
Ainsi, pour la première projection, il y aura Avoir 20 ans dans les Aurès réalisé en 1972 avec Philippe Léotard, Alexandre Arcady, Hamid Djelloul, Jacques Canselier. Les événements de ce film se déroulent en avril 1961, lorsque un groupe de soldats bretons réfractaires et pacifistes est pris en charge par un officier. Celui-ci conduit ces "têtes brûlées" à se livrer aux excès qu’ils condamnaient. Film de fiction très documenté, le premier, presque le seul, à avoir mis en scène les exactions de l’armée française durant la guerre d’Algérie. Film absolument extraordinaire de force, d’insolence et d’humour, d’humanité.
René Vautier, né en 1928, n’a cessé de militer, de la résistance, aux luttes anticoloniales et aux luttes sociales ou altermondialistes. Il anime le service cinéma du FLN à partir de 1957 et dirige en 1962 le Centre audiovisuel d’Alger.
Personnalité exceptionnelle et cinéaste de même envergure (Afrique 50, La folle de Toujane, Quand tu disais Valéry…A propos de...l’autre détail).Le même jour, les cinéphiles découvriront Le Charbonnier de Mohamed Bouamari. Réalisé en 1972 avec Fettouma Ousliha, Youcef Hadjam, Ahmed Hamoudi, l’histoire est celle d’un charbonnier. Ancien maquisard, il est en butte à l’impossibilité économique de continuer à fabriquer du charbon de bois et à des tensions croissantes avec sa femme qui revendique son indépendance. Très beau film, de veine néo-réaliste, en rupture avec la tendance officielle de glorification de la lutte armée.
Mohamed Bouamari, vingt ans au moment de l’Indépendance, a été l’assistant de Lakhdar Hamina, d’Ahmed Rachedi. Figure indépendante dans le cinéma algérien des années 70, il a réalisé trois autres films : L’Héritage, Premiers pas et Refus.
La deuxième journée sera celle d’un grand classique du film algérien avec le célèbre long métrage Le vent des Aurès de Mohamed Lakhdar Hamina. Réalisé au lendemain de l’indépendance en 1966 avec Keltoum, Mohamed Chouikh, Hassan El- Hassani, Mustapha Kateb. En pleine guerre, dans les Aurès, une mère cherche désespérément à retrouver son fils raflé et incarcéré par l’armée française. Elle défiera les soldats français jusqu’au bout. Un film épique à la gloire de la lutte populaire où se marque l’influence du grand cinéma soviétique (Eisenstein, Poudovkine, Dovjenko). Mohamed Lakhdar Hamina, né en 1934, a été le réalisateur des premières bobines de cinéma tournées dans les maquis. Après l’indépendance, il sera directeur du cinéma algérien. Cinéaste majeur de sa génération, seul Africain à obtenir une Palme d’or à Cannes, en 1975 pour Chronique des années de braise. Tahia ya Didou, de Mohamed Zinet, sera le second long-métrage de cette seconde journée. Réalisé en 1971 avec Himoud Brahim, Georges Arnaud, Mohamed Zinet, Tahia ya Didou est un film exceptionnel, unique, en voie de disparition (pas de négatif et plus de copies). Au départ, commande de la Mairie d’Alger pour un film promotionnel. A l’arrivée, un film complètement iconoclaste, mêlant le tragique et le comique, plein de poésie et d’amour pour le petit peuple algérien. Un couple de touristes français découvre Alger. L’homme dans un bistrot reconnaît un Algérien qu’il a torturé pendant la guerre…
Mohamed Zinet fut officié de l’Armée de libération nationale, puis le créateur du Théatre national algérien. Grand comédien, il fut le Charlie Chaplin algérien et un peu "l’Algérien de service" dans le cinéma français (Dupont Lajoie de Yves Boisset). Il n’a pas eu la possibilité de réaliser un second film.
La seconde et troisième journée est celle de Boudjemaâ Kareche qui animera une rencontre-débat autour du cinéma algérien.
Boudjemaâ Karèche est né en 1941. Animateur à la Cinémathèque d’Alger dès 1971, il en devient le directeur en 1978 jusqu’en 2003. Il fait de la Cinémathèque et de ses annexes en région des pôles exceptionnels de rencontres et de découvertes. Il maintient cette ligne de liberté pendant les années noires. Ses livres : Un jour un film sur le cinéma, Juste un mot sur Alger et le dernier à paraître pour octobre sur Mohamed Bouamari.

Par : Kahina Hammoudi

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