Un salon du collectionneur organisé par l’Etablissement Arts et Culture de la wilaya d’Alger se tient depuis samedi et doit se poursuivre jusqu’au 25 janvier prochain au Centre des loisirs scientifiques, rue Didouche-Mourad à Alger.
Les collections exposées touchent à la philatélie (timbres poste), la numismatique (monnaies et billets de banque), à la cartophilie (cartes postales), aux affiches, à la dinanderie, pins et même aux galets de mer qui à notre avis mérite plus qu’un salon de collectionneur. Belkhirat Samir, 30 ans, diplômé de l’école du commerce, supporte son chômage en se défaussant sur la collection de monnaie algérienne surtout et dans une moindre mesure internationale. Il a réuni à peu près 1000 pièces dont 300 datant de la période coloniale. « A travers la monnaie en même temps que ça m’occupe, j’apprends l’histoire de mon pays » dit-il. Et d’ajouter : « J’accède même à des connaissances économiques que beaucoup ignorent, je sais avec précision la valeur d’échange de telle pièce et ce qu’on peut acheter avec durant telle période ». Il nous montre des pièces datant de 1900 jusqu’à 1962 et les fameux bons d’argent de 50 cm, 1 et 2 FF, coupons émis entre 1942 et 1945 coïncidant avec la Seconde Guerre mondiale. C’est en référence à ces coupons qu’on a appelé ces années-là « âwam el-bbo » (années du bon) explique-t-il. Les pièces remontant au-delà de 1900, rappelle-t-il, ne peuvent faire l’objet d’une exposition car elles tombent sous le coup de la loi relative à la protection du patrimoine des musées. Les collections nous explique notre interlocuteur se constituent par l’échange, l’achat et les dons. Les ventes sont interdites dans le salon, mais le visiteur peut y faire des promesses d’achat, opération qu’il ne peut conclure qu’une fois la clôture du salon a lieu. Quant à N.B, 73 ans, preuve vivante que l’enfance se prolonge jusque dans la vieillesse, collectionne des timbres poste émis en Algérie depuis l’âge de 13 ans. Ce chef-comptable retraité d’une société nationale avoue que la philatélie lui a appris « l’ordre et le classement ». «Elle m’a éveillé et m’a montré ce qui est utile et ce qui ne l’est pas » poursuit-il. Il n’a jamais compté le nombre de timbres qu’il a dû rassembler tout au long de sa vie, se contentant de nous dire qu’il pourrait y en avoir plus de 10 000. « Ce n’est pas le nombre qui est important, c’est la qualité et la rareté du timbre » souligne-t-il. Et de préciser : « Le timbre algérien le plus coté actuellement c’est celui qui a inauguré la série des timbres nationaux en 1962. On l’appelle le timbre « Ec-chouhada » (les martyrs), qui à l’époque a été vendu au public à 10 DA, il coûte aujourd’hui 20.000 DA ». Mais le timbre le plus cher qui soit émis en Algérie date de 1938, il coûte 80.000 DA. « C’est un timbre non émis, on a fait un tirage qui a été annulé, quelqu’un doit avoir sorti une ou deux planches » argumente-t-il. Le collectionneur des affiches coloniales exclusivement publicitaires que nous avons trouvé absent expose des affiches datant de l’époque coloniale. Des réclames sur la cigarette Bastos, sur le tourisme saharien avec des flashs sur le développement de l’économie coloniale sur fond d’exotisme et d’images d’Epinal, constituent l’essentiel de cette collection qui ignore curieusement les affiches de concerts artistiques (théâtre, musique et cinéma, et Dieu sait que beaucoup de spectacles y avaient été organisés y compris algériens à cette époque-là). Enfin, un autre exposant, improprement qualifié de collectionneur, et qui fait des merveilles, a présenté une série de produits. Nous insistons sur le mot « produits », parce qu’il n’a pas réuni des pièces toutes faites, mais des objets fabriqués de sa main. Atroun Farid, la soixantaine bien entamée, est en fait un artisan qui fait dans création d’objets décoratifs et même fonctionnels à partir des galets de mer qu’il va chercher sur les plages de Messelmoun du côté de Cherchell et les plages situées entre Boulimat et Azeffoun. Ces galets, en fait des pierres très lisses et dures, il les colle les uns aux autres, ou bien au bois, au verre ou au carton. Il a aussi enduit ces rochers en miniature d’une couche de vernis incolore juste pour les mettre en valeur car dit-il « la nature a fait tout le boulot ». Les mains expertes ont façonné des pièces de bureautique (porte-stylos, encrier, porte-calendrier, etc), des bouchons pour flacon de parfums, des abats- jours des galets en portraits (en tableaux à suspendre sur les murs, des pendentifs aux formes insolites et provocatrices pour reprendre les propres termes de cet artisan. Au fait Atroun Farid peut simplement être le précurseur d’une nouvelle filière d’artisanat en Algérie si les pouvoirs publics y daignent prêter attention.