Bahia Farah, de son vrai nom Bounouar Fatima-Zohra a été une grande danseuse du genre oriental avant de devenir tout aussi grande chanteuse. Elle fut l’épouse du célèbre miniaturiste algérien Mohamed Temmam dit Sid-Ali.
Elle fait partie de cette génération d’hommes et de femmes nés au début du siècle dernier à une époque où naissaient nos grands pères et nos grands-mères. Est-ce que vous auriez pensé que votre grand-maman pouvait être une danseuse ? Non. Eh bien si, Bahia Farah, de son vrai nom Bounouar Fatima-Zohra a été une grande danseuse du genre oriental avant de devenir tout aussi grande chanteuse. Née en 1917 à Bouira, en Kabylie, Bahia Farah est décédée en 1984 à Alger. Elle fut l’épouse du célèbre miniaturiste algérien Mohamed Temmam dit Sid-Ali (1915-1988).
Orpheline, elle a été prise en charge par son oncle qui l’emmena en Tunisie. Après avoir pris des cours de danse dans un centre de formation artistique, elle partit en 1931 à Paris alors qu’elle n’avait que 14 ans. Ses proches, contre toute attente, l’encouragent à suivre son inspiration artistique. Elle perfectionna donc sa danse et très tôt elle fait le bonheur de la communauté émigrée à Paris. Le grand compositeur et interprète tunisien Mohamed El Jamoussi la remarque et décide de l’intégrer en dépit de son jeune âge dans la troupe artistique maghrébine dont il avait la charge. La jeune Bahia rencontre son futur époux en 1937. Mohamed Temmam venait de s’inscrire à l’Ecole supérieure des arts décoratifs de Paris. Il était un génie de la miniature en même temps qu’un musicien hors pair qui savait jouer à merveille du violon et du banjo. Plus tard lorsque Bahia Farah aura l’occasion de diriger son orchestre elle intégrera son mari avant d’aller faire ensemble la tournée au profit des travailleurs maghrébins. A Paris la chanteuse se frotte outre au Tunisien Mohamed El Jamoussi et au Marocain Slaoui Kamal, aux grosses pointures de la musique algérienne et kabyle à l’image de Kamel Hamadi, Slimane Azem, Mohamed El Kamel, Allaoua Zerrouki, Salah Sadaoui et Akli Yahiatène. En 1949 elle enregistre sur la demande de la maison d’édition Pathé Marconi, six disques 78 tours en arabe dont Ya omri lik, (mon âme est à toi) Rayeh maâdoum, Le partant est absent) et Yalli qlaqtou (Celui que j’ai irrité).
Elle interprétera aussi certaines œuvres du grand compositeur Mohamed El Kamel comme Bent ami, Zmane el youm et Saghira mesrara, les œuvres de Missoum, de Kamel Hamadi ainsi que celles de son mari Mohamed Temmam.
Quand la guerre de Libération éclate en Algérie, la troupe artistique maghrébine se disperse. Mais le FLN charge Bahia Farah de sensibiliser la communauté émigrée à la cause nationale. C’est alors qu’elle monte en 1957 son propre orchestre (composé alors de 24 personnes) qu’elle dirigea elle-même. Cet orchestre a fait en fait partie de la troupe artistique du FLN. La thématique de ses chansons traite de l’exil, du patriotisme et de l’amour. C’est de cette époque que date sa rencontre avec Slimane Azem, avec qui elle réalise en duo deux titres en kabyle Kem aouk dhnek (Toi et moi) et Atass issevragh (J’ai trop attendu), une chanson qui lui assrera un succès foudroyant. Elle signe son retour définitif au pays au lendemain de l’Indépendance, plus exactement en février 1965 et interprète Thefouk el ghorba thefouk (L’exil est terminé, bien terminé) (1967) avant de faire ses adieux à la Chaine 2 de la Radio nationale où elle animait une émission. Redevenue libre de tout engagement, elle constitue l’ensemble féminin « El Farah » et s’adonne exclusivement à l’animation des fêtes publiques et familiales. La Radio algérienne semble-t-il n’a conservé que 22 chansons sur les 50 qu’elle a enregistrées à son niveau. Selon le spécialiste Abdelkader Bendameche la musicienne et son époux le peintre Mohamed Temmam ont observé sur la fin de leur vie un très long silence. Bahia Farah était éprouvée écrit Bendameche par « le mépris (…) des responsables artistiques de l’époque et la déception d’un vécu qu’elle n’a jamais imaginé au moment où elle militait âprement pour la libération du pays ». L’artiste meurt Elle a 68 ans, quittant la vie dans la discrétion la plus totale. Il a fallu attendre 25 ans pour voir son souvenir exhumé par la DDirection de la culture de la ville qui l’a vu naître. En effet en 2009 Bouira lui a rendu un hommage posthume lors d’un colloque de trois jours.