Le Diwân Dar Abdellatif n’est pas seulement un monument historique. Cette demeure qui date de la période ottomane retrouve sa véritable vocation : accueillir des manifestations culturelles. Cette habitation, qui a servi de résidence aux artistes de 1906 à 1962, abrite depuis près d’une année diverses activités au profit d’un large public. Ce jeudi sera dédié à la littérature avec la conférence animée par la romancière Pia Petersen autour de ses différentes œuvres. Une nouvelle passerelle sera créée entre cette écrivaine et le lectorat algérien.
A l’initiative de l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel, dans le cadre de son programme «Livres et documentations, saison 2009-2010», Pia Petersen sera aujourd’hui à partir de 17 h à Alger pour parler de diverses sujets dont : sa conception de la littérature, de ses méthodes d’écriture et bien sûr de ses œuvres, elle parlera au public de son métier d’écrivaine. A travers cette manifestation, l’écrivaine souhaite, aussi, rencontrer des lecteurs ainsi que des écrivains algériens pour partager avec eux un moment d’échange à travers les lettres. Cette rencontre littéraire avec une autre grande auteure et académicienne algérienne Aïcha Kassoul, sera une véritable occasion de découvrir les nouveautés littéraires à travers le monde. Avec le regard et la lecture "avertis" de Aïcha Kassoul, le public sera ravi et emporté dans un monde fictif et invraisemblable. Annoncé par les organisateurs, Pia Petersen évoquera plusieurs problématiques qui ont trait à ses œuvres qui sont pleinement imprégnées des grandes questions actuelles.
Un nouveau modèles d’écriture
Nous découvrirons à travers cette rencontre un nouveau modèle d’écriture du XXIème siècle. Charmé d’ores et déjà par son parcours. A l’instar de l’écrivaine rebelle Françoise Sagan, Pia Petersen quitte l’école et cherche désespérément l’évasion littéraire et romanesque «Je ne m’y fais pas au Danemark où je semble toujours dépasser un peu des normes en cours. À 16 ans, je fais ma première tentative d’évasion, je quitte le lycée et pars en Grèce à la recherche de mon grand amour, Zorba le Grec, le héros de Nikos Kazantzakis. Qui n’irait pas chercher un homme pareil ? Je passe un an en Grèce en vivant de petits boulots, femme de ménage en hôpital, loueuse de voitures, vendeuse en magasin de souvenirs, serveuse de bar mais je ne trouve pas Zorba et repars au Danemark», raconte l’écrivaine dans sa biographie. Cette vocation et passion pour l’écriture se confirme d’ailleurs à un âge très précoce «Sans doute par dépit, j’annonce à mes parents à l’âge de 7 ans que je serai un écrivain et que je libèrerai le verbe». Ce rêve a pu se concrétiser avec la parution, en mars 2000, aux éditions Autres Temps, de son premier titre, Le Jeu de la facilité. Depuis, elle a publié cinq autres romans avec les éditions Acte Sud : Parfois il discutait avec Dieu (2004), Une fenêtre au hasard (2005) et Babel n° 999, Passer le pont (2007) et Iouri (2008). Son sixième roman, Une livre de chair, vient de paraître en février 2010. Se référant à la pièce de Shakespeare, Le Marchand de Venise, il a été salué par la critique pour sa manière de «mettre en scène» la crise économique mondiale à travers un huis-clos palpitant de joueurs de pokers campant des personnages étonnants et hauts en couleurs. Ce roman confirme le style qu’elle s’est forgé au fil des publications : des phrases courtes, des constructions rythmées, le goût de la surprise… Un style littéraire exceptionnel, d’autant plus qu’elle ne maîtrisait pas la langue de Molière : «Mes débuts en France sont plutôt compliqués. Je vis quelques temps dans les milieux des délinquants ou gangsters arabes à Paris et j’apprends beaucoup de choses sur la vie. Je ne parle pratiquement pas le français mais je sais que je veux écrire en français. La langue française est une langue très ouverte, aucune définition ne semble définitive, il y a toujours un mot à ajouter ou un truc à modifier, quelque chose à négocier. Je commence mon apprentissage avec le Rouge et le Noir de Stendhal et un dictionnaire. Je vis de petits boulots, toujours, fastfood, restauration, mailings, vente par téléphone, vendeuse magasin, intérimaire comme standardiste, réceptionniste à l’hôtel Concorde Lafayette. Pour écrire, il faut avoir l’esprit libre, alors autant travailler dans des emplois qui ne nécessitent pas un effort spirituel». En somme, nous avons beaucoup à apprendre de Pia Petersen.