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Rencontre avec l’artiste photographe Antoine Tempé
Des photos en mouvement
20 Juin 2010

Antoine Tempé expose, depuis le 3 juin, au Centre culturel français d’Alger, des photographies sur la danse africaine contemporaine. Cette belle exposition, qui se poursuit jusqu’au 30 juin 2010, réunit une série d’images, dont la majeure partie est en noir et blanc, de danseurs et de chorégraphes, toutes prises en Afrique subsaharienne.

C’est un peu tenir un pari fou que de faire du mouvement tout en recourant au statisme, faire de la vidéo tout en s’attachant à l’immobilisme de la photo. On a l’impression quand on regarde les personnages, dirions-nous «dansants», sur les photographies de l’artiste photographe Antoine Tempé que ces derniers n’ont pas cessé de se mouvoir, eux, que l’appareil a pourtant figés dans un geste unique qu’on aurait dit émanant d’une impulsion intérieure. La cinquantaine bien sonnée, Antoine Tempé a gardé la prestance du jeune danseur, prêt à redescendre dans l’arène à tout moment. Cet artiste d’origine française a toujours adoré danser mais sans en faire sa profession. Il est venu à la photographie grâce à l’intérêt qu’il porte à la danse et à la chorégraphie. Ses amis danseurs ont constitué, au reste, le sujet de ses premières photos. Danser implique une conception de la vie, Antoine ne danse-t-il pas entre New York et l’Afrique de l’Ouest, lui qui sans cesse se ballade entre les deux continents consacrant à chacun six mois l’an ? L’homme, il est vrai, est engagé par les festivals de danse africains pour des couvertures photographiques. Exposer, dit-il, sur l’Afrique lui permet d’y retourner souvent. On ne peut trop croire cet homme qui hante depuis dix ans les travées des halls d’expositions burkinabés et de la Côte d’Ivoire lorsqu’il affirme qu’il vit à New York depuis 30 ans ! Pour lui, «le métier de photographe est un métier dur mais très intéressant. Il faut beaucoup travailler parce ça ne paie pas bien», explique-t-il. Peut-être vous croyez que ce cas d’espèce n’existe pas mais Antoine Tempé a dû abandonner son poste d’agent de change dans une Bourse pour se consacrer entièrement à la photographie qu’il a appris «tout seul, en lisant des bouquins». Et d’avouer «sur le plan financier, j’étais à l’aise à la Bourse, mais ce n’était pas intéressant». Donc, l’homme a troqué ça contre un appareil photo moyen format, «un négatif assez grand qui permet de très grands agrandissements» pour aller à la chasse de photos noir et blanc de danseurs et de chorégraphes. Il justifie le choix du noir et blanc par le fait que «ce ton est détaché de la réalité». Tempé aime surtout esquisser des portraits que de faire des photos de danse. «J’essaye, dit-il, de révéler en une photo une partie de ce que les danseurs ont montré sur scène d’eux-mêmes et de leur univers, en même temps que j’y affirme que la photo est mienne». «La photographie et la peinture, peut-être, sont deux arts proches l’un de l’autre. La photo est une autre façon de peindre, voyez-vous, même entre le numérique et l’argentique, il y a de moins en moins de différence.» «Un noir et blanc bien travaillé, ajoute-t-il, permet de rendre compte de l’émotion. Utiliser les couleurs revient à se rapprocher de la réalité. J’aime bien m’en écarter, l’enjoliver, la rendre plus subtile, par un choix délibéré du noir et blanc ou de couleurs non réelles.» Et d’ajouter : «Ce qui m’a plu quand j’ai découvert la danse contemporaine en Afrique, c’est ce côté contemporain et moderne qu’ont tous ces jeunes, alors que les gens se sont faits à l’idée que la danse africaine, ce sont les tam-tams et les noix de coco.» «C’est un mouvement très particulier la danse contemporaine africaine, dont on ne parle pas beaucoup. Ça m’a semblé intéressant d’essayer de réunir un travail sur ce thème», ajoute-t-il. Antoine Tempé regarde à fond ses personnages avant de les inviter à la pose photo.
«En général, je les ai vus déjà danser, je connais un peu leur environnement gestuel, je peux leur demander quelque chose que j’ai vue sur scène, mais en général, je les laisse s’exprimer.»
Et de confesser : «Ils sont musclés, c’est vrai, mais il n’y a pas que les muscles, il y a le regard, le visage, les équilibres et les déséquilibres.» Le réel ne se livre, pour ainsi dire, que par la médiation de la conscience de l’artiste. «Il y a une dizaine d’années on était beaucoup dans le conceptuel. Je pense que ça va tomber comme tout phénomène de mode. La photo et la vidéo vont de plus en plus être deux versants de la même chose, parce que maintenant les appareils photos peuvent tous prendre de la vidéo, il n’y aura plus une grosse différence entre la photo et les films», soutient-il. L’artiste, qui se fait résolument portraitiste, est actuellement sur un nouveau projet qui vise les personnages appartenant au monde artistique et de la culture en Afrique subsaharienne. D’Alger qu’il revoit après 30 ans, il dira qu’elle n’a pas changé et qu’elle est restée telle qu’il l’avait vue pour la première fois quand il était venu en vacances. La ville est belle, elle a la mer, de belles lumières et une esthétique à part. Cette réflexion lui a fait dire qu’il «aimerait faire des portraits maghrébins».

Par : Larbi Graïne

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