Le Prix Goncourt 2010 du meilleur roman français a été décerné à Laurent Binet, un écrivain considéré comme «un inconnu» par la critique en France.
Laurent Binet, 37 ans, s’est vu attribué le prix pour son livre HHhH, un titre énigmatique qui même s’il peut faire allusion au virus de la grippe porcine A/H1N1 n’en désigne pas moins les initiales d’un surnom d’un triste sire du régime hitlérien : "Himmlers Hirn heißt Heydrich", qui signifie "le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich". la tête pensante d’Himmler, redoutable dirigeant de la SS (Reichsführer-SS) et de la Gestapo et également partisan de la "Solution finale". Laurent Binet qui n’en est pourtant qu’à son premier roman, a écrit juge-t-on son texte avec un art consommé. Certainement son métier y est pour beaucoup puisque le lauréat est agrégé en lettres, professeur de français et chargé de cours à l’université. Les péripéties du roman se déroulent au lendemain de l’attentat ayant visé Reinhard Heydrich à Prague le 27 mai 1942 en pleine Seconde Guerre mondiale. L’attentat baptisé "Anthropoïde" a été fomenté à partir de Londres et avait pour objectif la liquidation physique du dirigeant nazi alors nommé par Hitler au poste de protecteur de Bohême-Moravie. Heydrich était doué, méthodique, cruel et bestial. Envers les Juifs, il fut impitoyable. L’homme pour autant a été chassé de la marine pour des histoires d’orgies et de débauche. Le roman retrace l’ascension fulgurante d’un dignitaire nazi alors tombé en disgrâce, et qui va devenir l’"homme le plus dangereux du IIIe Reich". Si on connaît, grâce aux manuels d’histoire, la suite des événements après l’attentat de Prague, - Heydrich s’en sort avec une blessure mais mourra d’une septicémie le 4 juin 1942 - Laurent Binet revient sur les faits par le biais de deux personnages Gabcik et Kubis en les restituant de manière romanesque comblant ainsi les lacunes de l’histoire. L’originalité de la trame romanesque tiendrait au fait que l’auteur s’immisce dans le récit en étalant ses doutes, ses réflexions et ses débats intérieurs. Mais l’écrivain pousse encore le bouchon plus loin en faisant part de sa vie privée de sorte qu’il démontre au fil des pages que c’est le livre qui s’est incrusté en lui. Le Prix Goncourt est le plus prestigieux des prix littéraires en France. L’Académie Goncourt qui l’attribue annuellement entend ainsi "encourager les lettres, assurer la vie matérielle à un certain nombre de littérateurs et de rendre plus étroites leurs relations de confraternité". Sa dotation n’est que de 10 euros, mais au-delà de l’insignifiance de la somme financière concédée, son importance réside dans le fait qu’il incite à l’achat du livre primé qui peut ainsi atteindre des seuils record de vente allant de 300 mille à un million d’exemplaires.
L. G.