Nous avons rencontré le jeune compositeur -interprète au lendemain du dernier concert de la saison estivale, organisé par l’ONCI au Casif. Son tour de chant, entre ceux de Cheb Kada et Houari Dauphin a été chaleureusement applaudi par le public. C’est, précisément, cet enthousiasme du public qui encourage l’artiste à continuer son parcours. Un des plus ardus qui soit.
Natif de Tlemcen, Cheb Ziani, de son vrai nom Hamza Rabrab, a ouvert son cœur au chant dès l’enfance. «C’était à l’école. Je me sentais merveilleusement bien lors du cours de musique. Peu à peu, chanter est devenu une consolation puis un besoin. C’est ce qui exprimait le mieux mes sentiments.» En grandissant à Bab el-Oued, où la famille s’est installée, le jeune garçon s’éprend des chanteurs de raï à l’ancienne, mais également des vieux chants religieux à la gloire du Prophète Qsssl. «Jusqu’à aujourd’hui, je ne saurais commencer sans un chant religieux. Ce n’est qu’après avoir louer Dieu, son Prophète et les aouliya essalihine que je peux poursuivre mon tour de chant.» Dès l’adolescence, il participe en cachette des siens à l’animation des noces et circoncisions. Il se souvient avec un peu de tristesse, cela fait déjà 12 ans, de son premier gala à Sidi Bel-Abbès. «C’était mon premier contact avec le public massif des salles de spectacle. Je suis passé avec 5 autres chanteurs. Cela m’a déterminé à continuer.» Aujourd’hui, Cheb Ziani a écrit plus de 200 morceaux, paroles et musique, mais sur scène, il fait des reprises. Malgré un dur labeur et le succès qu’il remporte à chacune de ses apparitions publiques, la chance qui fait d’un artiste une star ne s’est pas encore montrée. «Je dois absolument faire mon propre produit et le commercialiser dans toute l’Algérie». Sans cela, point d’issue. L’artiste est obligé de se produire au gré des galas et parfois dans les cabarets pour des cachets insignifiants. Une précarité qui rend problématique la sortie d’un album bien à lui. «J’ai des CD en live mais je n’ai encore rien fait éditer. Je suis très exigeant et je voudrais du travail de qualité. Je ne veux pas reprendre les succès des autres et je ne veux pas imiter.» Ses thèmes de prédilection sont les sujets d’actualité à caractère social ou politique. «J’ai composé sur la Palestine, sur les femmes opprimées, les mères, les orphelins, le passé historique, l’amour, les bienfaits divins et la vie quotidienne.» Ainsi, Ziani exprime une forte foi en lui-même et en son art. Ce qui l’aide à croire en son étoile c’est le public. «Nous avons le meilleur public du monde. Le plus réceptif, accueillant et encourageant.» C’est également les soutiens qu’il a rencontrés face au milieu difficile du show-biz. «Beaucoup de gens m’ont aidé, encouragé, souri... Personne ne dira suffisamment la force d’un sourire, d’une porte ouverte. Depuis que j’ai été remarqué par le musicien Mohamed Rédouane alors que je répétais en 1994 à la maison de la Culture de Boumerdès, j’ai enchaîné les galas et répétitions.» Biskra, Chlef, Tizi-Ouzou, Béjaïa, Sétif, Boumerdès… Partout où Cheb Ziani s’est produit, le même merveilleux public était là. «Chaque fois que je me produis avec d’autres artistes, cela me rend plus fort et plus déterminé à tracer mon propre chemin, ramener ma contribution spéciale.»
Ziani apprend la guitare pour mieux maîtriser son art. «Le chemin de l’artiste est bordé d’épines ou plutôt de flammes… Il y a beaucoup de trompeurs, jaloux, menteurs autour de nous…», dit Ziani avec un humour que l’on dirait sorti directement de l’univers des qacidate chaâbies. C’est que Ziani possède la verve et la fraîcheur des habitants de Bab el-Oued. Il reste accroché à son rêve et s’en remet à la providence. Bonne chance.