Le Midi Libre - Culture - Le signe ou la quête du rêve et de la communion
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Rachid Koraïchi expose à la citadelle d’Alger
Le signe ou la quête du rêve et de la communion
30 Juin 2008

Jusqu’au 16 juillet, le public est invité à découvrir dans l’espace de la galerie d’art de la citadelle d’Alger une exposition d’œuvres de l’artiste sans frontières, Rachid Koraïchi, déclinée dans une scénographie qui nous arrache au monde profane. Des compositions qui nous convient à ‘’prendre part à une forme de transcendance’’ dont le ‘’sens est voilé avec sagesse.

Dans une atmosphère feutrée, l‘artiste Rachid Koraïchi invite le spectateur à entrer de plain-pied dans un monde de signes et de lettres vertigineux. Intitulée ‘‘Chemin des roses‘‘ la collection de l‘artiste ‘‘surfe‘‘ entre le schéma classique et l‘art de l‘installation qui structure l‘espace. Dire que les ‘‘niches‘‘ de la galerie d‘art de Dar Essoultane (citadelle) consacrées à l‘exposition se font complices tant elles se prêtent allègrement à ce type d‘œuvres qui, au- delà du signe, cultivent le mystère. Les étoffes sur lesquelles sont imprimées les lettres  multiformes dorées, les assiettes emplies d‘eau sur lesquelles flottent quelques pétales de rose – synonymes de vasques à ablutions – ,  les pièces ajourées en bronze ou en fer,  nous invitent à ‘‘prendre part à une forme de transcendance‘‘ dont  ‘‘le sens est voilé avec sagesse à ceux qui ne comprennent pas‘‘, selon certains critiques. Imprégné de culture soufie, son oeuvre toute de sérénité, de puissance et de liberté, se situe entre les strates profondes de l‘âme soufie et celle du dynamisme de la vie. Animé de la répétition du signe, Koraïchi investit l‘œuvre d‘une force novatrice où les lettres sont des idéogrammes, où les idéogrammes donnent forme à une structure sous forme de personnage qui se veut porteur d‘un message. Les signes emplissent l‘espace non sans donner cette impression de traduire des échos qui cernent le monde spirituel de l‘artiste. Cette écriture passion s‘entend en plusieurs sens. Elle s‘explique par l‘intérêt de l‘artiste pour les textes de la tradition mystique, textes dont il reprend des fragments qu‘il colle à son oeuvre. Elle s‘explique aussi par le travail croisé accompli avec ses amis Mahmoud Darwich, Mohamed Dib, Bencheikh, mais aussi René Char et Michel Butor, montrant ainsi que les cultures s‘enrichissent et se nourrissent de leur rencontre.
                                 L‘artiste sans frontières
Ainsi, Koraïchi, ‘‘le voyageur de la lettre‘‘ recrée la beauté du signe, en le répétant sans cesse dans une grande fresque dans des combinaisons aussi complexes qu‘esthétiques…Il donne plein la vue au visiteur, interpellé, à son tour à interpréter la dimension et la richesse de la lettre, qu‘elle soit puisée de la langue d‘Ibn ‘arabi, empruntée d‘une sagesse confucéenne ou volée au détour d‘une pensée grecque.  En clair, ses compositions demeurent ces passerelles suggestives destinées à abreuver notre for intérieur, pour pouvoir affronter le monde extérieur avec une plus grande sérénité, sans être en rupture avec les autres. Ne voyant dans la vie que l‘Art, ‘‘le voyageur de la lettre‘‘ poursuit sa quête de rêve et de communion. Fasciné par toutes les formes de création, Rachid Koraïchi, l‘artiste sans frontières, jouit d‘une estime considérable dans le monde pour son oeuvre multiforme célébrée du Maghreb au Machrek, de l‘Europe au Japon en passant par Cuba. Quand elles ne sont pas éphémères, comme certaines « installations «ses oeuvres : peintures, stèles (fascinantes), sculptures métalliques, calligraphies «détournées» ou non, au cœur de son monde de création figurent dans nombre de collections privées, dans des institutions prestigieuses et décorent... les banques de Boston ou de Tunis. Son travail est présent à Paris, à Londres, à Rotterdam, à Amman, à Baghdad, au Kuwait, en Espagne, à Washington. La danse est son chemin, l‘amour son signe. ‘‘La vie, c‘est l‘art « disait simplement Koraïchi dans le livre qui lui est consacré. En effet, la vie n‘est jamais belle, seules ses images le sont, une fois transfigurées par le miroir de l‘art et de la métaphysique. Cette leçon de Schopenhauer, Koraïchi l‘embrasse pleinement ; pour que notre vie soit digne d‘être vécue ou pour ne pas périr, il nous faut la beauté salvatrice d‘une transcendance se penchant sur nous ou la belle illusion vitale qui, par la fascination qu‘elle exerce, nous arrache au monde profane. Il crée lui-même cette beauté qui lui est essentielle, afin d‘enchanter, l‘espace d‘un instant, notre sensibilité esthétique. Nos yeux s‘attachent aux signes de son univers, la musique nous enveloppe, les rythmes de la danse nous conduisent. (...)‘‘.

Bio express

Né à Ain Beïda en 1947, dans la région des Aurés, Koraïchi appartient à une famille de tradition soufie. Cet élément est d’importance pour comprendre le lien sacré qu’il entretient avec l’écriture et les signes. Dès son plus jeune âge, son regard d’enfant parcourt, sans encore la lire, l’écriture arabe présente dans la demeure familiale sur des parchemins ornés d’enluminures, dans de vieux livres décorés d’arabesques. Livres merveilleux et mystérieux, soustraits aux mains de l’enfant, ce qui ne manque pas d’éveiller son attention... Après des études à l’Ecole nationale des Beaux Arts d’Alger (1967-1971), il s’inscrit à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts décoratifs de Paris (1973-75), puis l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris (1975-77) avant de suivre un cursus à l’Institut d’Urbanisme de l’Académie de Paris. Il a illustré nombre d’ouvrages dont ‘’Cinq fragments du désert’’ Rachid Boudjedra ; ‘’Couleurs de l’invisible’’ de Sylvie Germain ; ‘’Pluie sur la Palestine’’ de Salah Stétié ; ‘’le Miroir infini de Mawlânâ Djalâl Od-dîn-Rûmî’’ de Marine Lostia et ‘’la Poésie arabe, petite anthologie’’ de Farouk Mardam-Bey.

Par : Farouk Baba-Hadji

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