Quand bien même elle regorge de jeunes talents, Miliana ne dispose, comble de l’ironie, ni d’hôtel pouvant accueillir les convives ni d’espace d’expression culturelle pour les cinq associations musicales andalouses et les deux brillantes formations théâtrales.
La 3e édition nationale de la musique andalouse de Miliana qui a eu lieu du 16 au 18 avril, a convié le public à suivre le répertoire de formations musicales dont le nombre a été restreint cette année, au regard de la faible logistique et le manque d’infrastructure de base dont souffre la ville du mont du Zaccar, fief, rompu, pourtant, à l’art du verbe lyrique ciselé des cheikhs Ben M’saib, Ben Triqui, Ben Sahla et autres Kaddour El Alami et El Maghraoui. La ville du refondateur Ziri Ibn Menad Sanhadji – en 972 – domine joliment les plaines du Chelif. Mais elle manque de souffle. Quand bien même elle regorge de jeunes talents, Miliana ne dispose, comble de l’ironie, ni d’hôtel pouvant accueillir les convives ni d’espace d’expression culturelle pour les cinq associations musicales andalouses et les deux brillantes formations théâtrales ‘’Mahfoud Touahri’’ et ‘’Praxis’’, dont les responsables, faut-il préciser, ne ménagent aucun effort pour donner un regain de vitalité à la région après tant d’années de disette culturelle. Excepté le nouveau théâtre de la commune – un odéon –, inauguré en 2006, ‘’aucune infrastructure culturelle digne du nom du saint patron de la ville, Sid-Ahmed Benyoucef, ne figure dans le plan de développement de la commune’’, tiennent à souligner les initiateurs de la manifestation qui font contre mauvaise fortune bon cœur. Avec des moyens dérisoires récoltés par-ci par-là et quelques maigres subsides accordés par la direction de la culture de wilaya, les organisateurs s’attellent à donner fière allure à leur cité, à l’image du Dr Youcef Azaizia qui œuvre, depuis 1999, en sa qualité de président de l’association Ziria el Andaloussia, à la préservation du patrimoine zyriabien. ‘’Il faut sortir la ville de la torpeur qu’elle a connue lors de la dernière décennie et renouer avec les artistes’’, raconte-t-il dans le coquet espace dit ex-‘’Pointe des blagueurs’’ (actuellement lieu baptisé Place Ali-Amar, ce fidaï et chahid connu sous le nom de Ali la pointe).
Ainsi, l’espace de trois jours, les concerts n’ont pas manqué de drainer un grand nombre de mélomanes qui ont savouré les mélodies andalouses proposées lors du premier jour, par l’ensemble zorna de Miliana et la troupe Errachidia de Mascara (la seule formation invitée). La soliste vocale Kamela Nour a enchaîné la deuxième soirée en égrenant un pan de diwan dans les genres haouzi et ‘aroubi, avant de laisser place aux benjamins de l’association de la ville hôte, Ziria el andaloussia qui ont enchanté les convives d’un nouba ghrib suivie de la pièce bacharaf dans le mode dîl. Dans un beau final, l’Ensemble national algérien de musique andalousienne (Enema), dirigé par l’ethnomusilogue Rachid Guerbas, a clôturé en apothéose la dernière soirée de la 3e édition. Réunissant des musiciens issus des trois écoles, Alger (çan’a), Tlemcen (gharnati) et Constantine (malouf), l’orchestre tente depuis quatre années de se détacher du dogmatisme et de l’assimilation conventionnelle d’un seul modèle de référence. Avant d’entamer la nouba sika, Rachid Guerbas, qui a créé de nombreuses compositions, a tenu à donner un avant-gôut à l’assistance, à travers un survol initiatique concernant la lecture rythmique des strophes de chghalate. Une manière d’inviter l’auditoire à s’imprégner des belles ‘’volutes’’ que les 25 musiciens des trois écoles régionales ont magistralement interprétés dans une cohérence d’enchaînements
rythmiques.