Cet anniversaire a été, une nouvelle fois, l’occasion de débats littéraires de haut niveau et d’évocation émue de ce «géant de la littérature» comme le qualifie Yasmina Khadra dans son message envoyé aux organisateurs d’une journée hommage.
Treize ans après sa mort, le nom et l’œuvre de Rachid Mimouni constituent toujours la meilleure réponse à la barbarie terroriste qu’il a tant dénoncée et qui secouait encore récemment Boudouaou, sa ville bien-aimée.
Cet anniversaire a été, une nouvelle fois, l’occasion de débats littéraires de haut niveau et d’évocation émue de ce «géant de la littérature» comme le qualifie Yasmina Khadra dans son message envoyé aux organisateurs d’une journée hommage qui s’est tenue récemment au Centre culturel de la ville à l’occasion de la 4e édition du Forum sur la littérature algérienne d’expression française.
«Je suis un écrivain du terroir et je veux le rester jusqu’à la fin de mes jours», confiait Rachid Mimouni à son ami Djillali Khellas avant de quitter son pays en proie aux pires convulsions.
Né en 1945 dans un douar de Boudouaou et foudroyé par une hépatite aiguë, 50 ans plus tard, Mimouni a rendu l’âme dans un hôpital parisien le 12 février 1995. C’est un homme plein d’humilité, un ardent patriote et un grand créateur que les Algériens continuent de pleurer à ce jour. Ce fils de la campagne, qui devait faire, 6 km à pied avant d’arriver à son école primaire, déclarait lors d’une interview accordée à France Inter en 1994, s’être senti encore «plus indigène» que ses camarades de classe d’origine citadine. Il découvrait alors l’apartheid régnant dans les écoles coloniales. Il se rendra compte plus tard que son instituteur, Marcel Pellerin, est l’un des plus farouches civils français à lutter contre les commandos du FLN de la région, menés par les deux frères Aoudia.
C’est à la fois à l’homme humble et à l’écrivain brillant que la «Distinction du mérite culturel» a été décernée, lundi dernier, en présence de ses trois sœurs et de tous ses amis dont le moudjahid Ahmed Mahsas.
Le talent du romancier qui puisait directement à la réalité du terrain s’accompagnait de la lucidité de l’analyste, auteur de l’essai : «De la barbarie en général et de l’intégrisme en particulier».
Son œuvre que les spécialistes apparentent au «retour du référent», ce tournant réaliste qu’opère aujourd’hui la littérature mondiale, est saisie comme «une chronique acerbe du réel hallucinant de l’Algérie actuelle» par Charles Bonn, universitaire français, dans sa thèse de doctorat sur le roman algérien d’expression française. En 15 ans, Rachid Mimouni a écrit une dizaine d’œuvres majeures dont «le Printemps n’en sera que plus beau» (1978), «le Fleuve détourné» (1982), «Tombéza» (1984), «l’Honneur de la tribu», (1989), «la Ceinture de l’ogresse», (1990), «Une Peine à vivre» (1991), «De la barbarie en général et de l’intégrisme en particulier», (1992), «la Malédiction» (1993). Sa plume créatrice a été récompensée plus de dix fois par des prix littéraires prestigieux, dont le prix Albert Camus en 1993. En 1990, il obtient le Prix de littérature-cinéma du Festival international du film à Cannes pour «l’Honneur de la tribu». Son œuvre «le Fleuve détourné» a inspiré une interprétation musicale, ainsi que théâtrale.
Des photos prises à différentes étapes de sa vie, la projection vidéo d’une de ses interviews ainsi qu’une table ronde entre universitaires et spécialistes étaient au programme de cette journée en l’honneur de ce maître de l’écriture disparu trop tôt.
Licencié en chimie, Rachid Mimouni a été enseignant et adjoint à la recherche à l‘Institut national de développement industriel de Boumerdes. Il poursuit ensuite des études supérieures en commerce à l’université de Montréal (Canada), puis enseigne à l’Ecole de commerce d’Alger, qu’il rejoint en 1976.
La pièce de théâtre «Essafir» interprétée par les comédiens de l’ association du théâtre boudouaoui a clôturé la manifestation. Rachid Mimouni est enterré au cimetière de Boudouaou parmi les siens.