Si le parcours professionnel de Malek Houd est plutôt mouvementé, son histoire avec la poésie et la culture amazighes en général est d’une remarquable stabilité. Tout un destin.
Pour la littérature amazighe, côté poésie, ça marche plutôt bien ! La poésie amazighe se dit, se lit, s’écrit… Les festivals foisonnent, se nichent parfois très haut dans la montagne, après avoir séduit les villes ; c’est le cas pour le festival d’Aït Smaïl dans la wilaya de Béjaïa qui en est à sa cinquième édition. Le carrefour culturel de la Soummam, initié depuis huit ans par l’association Etoile culturelle d’Akbou, possède également sa dimension poétique avec des récitals et un concours. Là, la poésie s’y dit tout haut, micro à l’appui. La poésie amazighe s’écrit aussi, bien sûr, et s’édite : bon nombre de jeunes poètes se sont jetés corps et âme. Impatients, ils ont eu recours à l’édition à compte d’auteur. C’est ainsi que la quasi-totalité des œuvres qu’on trouve sur le marché sont issues de cette auto-édition qui se révèle souvent ingrate, surtout parce que la distribution n’est pas assurée et se fait par à-coups, au fil des manifestations artistiques organisées ça et là. Malek Houd a eu la chance de trouver un éditeur pour publier son dernier opus «Assirem yessaramen». Si le parcours professionnel de Malek Houd est plutôt mouvementé, son histoire avec la poésie et la culture amazighes en général est d’une remarquable stabilité, c’est tout un destin. Né en 1957 à At Mlikech, dans la wilaya de Béjaïa, Malek fait ses études primaires et moyennes à Tazmalt. En 1973, il part pour l’INHC de Boumerdès où il fait ses premières classes dans la lutte identitaire amazighe ; c’est là où il prend conscience de l’injustice qui entoure et enterre la langue berbère. Après ses études, Malek Houd va travailler à la raffinerie d’Arzew pendant une année avant de retourner au bercail. Il enseignera les sciences physiques à Akbou, aux lycées Debbih-Chérif et Hafsa. Sa carrière sera coupée net, il sera «remercié» pour ses activités «berbéristes», qui, de nos jours, seraient considérées comme de simples activités culturelles. Il sera plus stable dans les usines du complexe velours d’Akbou où il travaillera pendant douze ans.
Même s’il n’a jamais lâché sa langue maternelle, puisqu’il en use régulièrement pour mettre sur papier ce que lui dicte la muse, il voudra s’en rapprocher davantage, jusqu’à en faire son métier ; il revient à l’enseignement mais cette fois-ci pour officier dans cette même langue maternelle. Il est enseignant de tamazight depuis une bonne dizaine d’années.
Malek Houd va donc côtoyer la poésie pendant trente ans et continue de le faire. Il continue également d’écrire, de déclamer à travers les nombreux festivals et autres rencontres poétiques qui s’organisent un peu partout. Sa dernière apparition fut pendant le huitième carrefour culturel organisé par l’Etoile culturelle d’Akbou à la maison de la culture de Béjaïa ; il continue à collectionner les distinctions et il est le premier à publier des poèmes en tamazight dans la revue trilingue Rivages qui a commencé à paraître dans les années 80.
La persévérance de Malek va se solder par la publication de deux ouvrages sortis aux éditions Baghdadi : un conte kabyle, Tamacahut n udrar aberkan (L’histoire de la montagne noire) et un recueil de poésie «Assirem yessaramen (L’espoir qui espère).
D’autres travaux attendent leur tour pour se faire apprécier : la traduction du fameux poème fleuve de Smaïl Aït Djaâfar, «Complainte des mendiants de la Casbah et de la petite Yasmina tuée par son père», un recueil de contes Timucuha d temâ yin, un recueil de poésies tilelli ur telli (Il n’y a pas de liberté) et des revues complètes de mots croisés en kabyle.
D’une force tranquille, à l’image de cette sérénité qui se dégage de sa personne, la carrière poétique de Malek Houd se poursuit, se déroule, coule comme «un long fleuve tranquille» ; tranquille en surface mais tumultueux en profondeur.