« C’est un coup de génie stratégique puisqu’étant faible sur le terrain des opérations, la Résistance palestinienne a transplanté le conflit dans un cadre d’opérations virtuelles où il est à son avantage, à savoir la communication et les opinions publiques », a déclaré hier M. Mourad Preure, enseignant en stratégie et géopolitique à l’université d’Alger à l’occasion du premier anniversaire du «Déluge Al-Aqsa» déclenché le 7 octobre 2023.
« Et dans la situation où était la cause palestinienne face à l’arrogance de l’ennemi sioniste, couvert par le silence occidental, complice du génocide, toujours en cours, les Palestiniens ont allumé une mèche tout en sachant qu’il y aura embrasement du Moyen-Orient ». explique l’intervenant à l’émission «L’invité du jour», de la Chaîne III de la Radio algérienne, soulignant que « de ce point de vue, les Palestiniens ont atteint leurs objectifs alors que le gouvernement génocidaire n’a pas atteint ses buts dans une guerre asymétrique ».
Un rappel à l’ordre
Revenant à la cause principale de ce Déluge, M. Preure explique qu’ « avec les accords d’Abraham, les Palestiniens étaient au seuil critique. La question palestinienne n’était plus à l’ordre du jour et on a fini par la faire oublier, d’où cet acte héroïque, même s’il étant désespéré il est néanmoins porteur puisqu’il a atteint le but qu’il s’était fixé : alerter le monde sur ce déni de droit ».
On peut considérer, explique l’analyste, que «sur le plan de la stratégie militaire, c’est un coup de maître, dans une guerre de type asymétrique, guerre du faible contre le fort, communément décrite comme une guerre du tigre contre l’éléphant où le faible ne cherchait pas à conquérir des territoires du plus fort, mais de frapper son système en entier et l’empêche de fonctionner, rappelant ce qu’a fait le FLN durant la Guerre de libération nationale, quand il a mis à rude épreuve tout le système colonial français». « En 1958, rappelle encore le Professeur, il y a eu réellement un coup d’Etat, la démission
du président René Coty laissant la place à un général, menacé, lui aussi par les paras qui avertissaient d’envahir les Champs Elysées (…) Le FLN, rappelons-le a réussi à frapper le système français en entier ».
Réussite totale
Finalement, enjoint-il, « cet acte de bravoure de la Résistance palestinienne est une réussite puisqu’elle a réussi à réaliser son objectif : causer un échec à l’entité sioniste et amener des capitales occidentales à changer leurs positions en désavouant les criminels de Tel-Aviv, voire les amener à reconnaitre l’Etat de Palestine, comme l’Espagne, la Suède, la Norvège et l’Irlande ». « L’événement qui s’est produit, le 7 octobre 2023, est un en soi un événement exceptionnel », souligne l’orateur, rappelant qu’en 2006, « l’entité sioniste a déjà reçu une raclée au Liban, pourtant on vantait sa force et son invincibilité suprême. Or les Palestiniens ne l’ont pas seulement défié mais l’ont littéralement ridiculisé. Après une année de guerre, on parle toujours de prisonniers de guerre, entre les mains de la Résistance ».
« En fait, on assiste à quelque chose d’historique : les Palestiniens ont renversé la table, alors que les Etats arabes s’alignaient, un à un, sur la normalisation de la honte, acculant la question palestinienne aux gémonies. Alors que le monde fermait les yeux depuis 1948 sur un déni de droit, selon une logique de deux poids deux mesures », estime l’invité de la Radio. Déplorant le nombre des personnes tombées en martyrs à Ghaza et au Liban, M. Preure dit-qu’ « il fallait ce sacrifice au même titre que le 1.5 million de martyrs algériens tombés au champ d’honneur pour payer notre indépendance et ce depuis les batailles de Staoueli en 1830 ». « Il fallait payer le prix de sang », indique-t-il.
L’éternel recommencement
A la question de savoir quand l’épilogue de la guerre, M. Preure considère qu’il y a «une conjonction de variables qui font un enchaînement chaotique qui s’est engagé et que l’on sait pas comment va-t-il évoluer à l’ombre de la situation politique aux Etats-Unis, dans un contexte électoral qui profite aux sanguinaires de l’entité sioniste auxquels les deux candidats Donald Trump et Kamala Haris ne vont refuser aucune demande à leur allié criminel dans le sens de l’escalade qu’il mène au Liban, hors du droit international, pour faire diversion pour couvrir son échec à Ghaza ».
Pour M. Preure, « le droit international établi après la Seconde Guerre mondiale n’est pas positif et qu’il a toujours fonctionné selon des rapports de force. Présentement l’ordre de Yalta est agonisant tant que les institutions issues de cet ordre (ONU, Conseil de sécurité, droit de véto) sont visiblement anachroniques d’où l’impératif d’introduire des réformes. »