Certains jeunes gens s’imaginent que la séduction d’une fille passe obligatoirement par un exploit. Mais quand ils découvrent leur erreur, il est souvent trop tard. C’est ce que nous découvrons dans l’affaire ci-dessous.
Cela s’est passé à Khemisti, une petite ville de la wilaya de Tipasa, le 23 juillet dernier. Salim, 23 ans, est amoureux d’une fille de la localité mais il n’ose pas l’aborder pour un tas de raisons. La principale est que, pour lui, lorsqu’un jeune homme aborde une jeune fille c’est qu’il a des intentions sérieuses envers elle. Des intentions, Salim en a et des plus respectables, mais il ne peut les assumer faute de moyens. Pour le moment, tout ce qui l’intéressait était d’attirer l’attention sur lui, de celle qu’il aimait en secret et de l’amener à s’apercevoir de son existence ! Et ce n’était pas facile. Comment une fille, belle, éduquée, instruite et, apparemment, gentille pouvait-elle s’intéresser à un pauvre quidam comme lui qui ne pouvait même pas assurer sa propre subsistance ? Sans son père, il mourrait de faim !
Après avoir réfléchi, le jeune homme finit par avoir la conviction qu’il n’avait rien d’intéressant à offrir pour mériter ne serait-ce que le regard de la jeune fille. Aussi avait-il décidé de ruser pour donner de lui l’image de quelqu’un que l’on puisse aimer. Dépourvu matériellement, il ne lui restait plus qu’à montrer qu’il était immensément riche en matière de qualités humaines. Il avait lu, ou entendu, quelque part que beaucoup de filles étaient plus sensibles aux vertus qu’aux richesses matérielles.
Salim imagina alors un petit scénario qui, selon lui, serait à même de lui permettre de conquérir le cœur de la belle.
Le lendemain, il se posta au coin d’une ruelle par laquelle il avait l’habitude de la voir passer. Comme il s’était procuré le numéro de son téléphone mobile, il attendit qu’elle arrive à un lieu moins fréquenté et il lui téléphona. Comme il était prudent, il prit soin d’utiliser la méthode dite de «l’appel masqué». De loin, il la vit fouiller dans son sac à main, signe qu’elle cherchait à répondre à l’appel qu’elle venait de recevoir. Il plaça sur sa tête une casquette, chaussa des lunettes noires et fendit sur elle tel un faucon qui venait, du haut des cieux, d’apercevoir une proie. Il était si rapide que la malheureuse n’avait même pas eu le temps de plaquer son téléphone contre une de ses oreilles. Salim happa le petit gadget et s’enfuit à la vitesse de l’éclair. La jeune fille était si surprise qu’elle ne poussa pas le moindre cri.
Salim, dès qu’il eut la certitude que la jeune fille et ceux qui avaient assisté au vol ne pouvaient pas le voir, il s’engouffra dans un immeuble et entreprit de changer de chemisette et de pantalon. Il se débarrassa aussi de sa caquette et de ses lunettes solaires. Puis, il alla à la rencontre de la jeune fille pour appliquer la dernière étape de son plan : rendre son téléphone à la jeune fille et lui faire croire qu’il avait couru derrière le voleur et qu’il avait réussi à le délester du produit de son larcin.
Il la trouva en larmes. Il lui sourit et se fit rassurant :
- Bon, ça y est, vous n’avez plus aucune raison de pleurer et de vous lamenter. J’ai poursuivi le voleur et j’ai pu lui arracher ce qu’il vous a volé !
Salim s’attendait à ce que la jeune fille se mette à le remercier et à souhaiter le Paradis pour ses parents qui l’avaient si bien éduqué au point de risquer sa vie pour voler au secours d’une malheureuse jeune fille. Mais qu’elle ne fut sa surprise lorsqu’il la vit se tenir la tête et hurler de toutes ses forces :
- Au fou ! Au fou ! Il me vole mon téléphone puis il me le rend ! Au fou ! Au fou !
Salim s’attendait à tout sauf à ce que la jeune fille le reconnaisse, malgré son déguisement !
Le malheureux n’était pas arrivé au bout de ses mauvaises surprises. Deux adultes l’avaient aussi reconnu comme étant le voleur du téléphone
L’un d’eux lui avait lancé avec ironie :
- Ya khi habess ya khi ! Tu croyais passer inaperçu avec ton ridicule déguisement, hein ? Tu crois que le Ramadhan nous a esquintés à ce point ? Vraiment, tu nous prends pour des mulets à deux pattes !
On se saisit de lui et on l’emmena à la sûreté de daïra de Bousmaïl. Le jeune homme était si effrayé par la tournure prise par les événements qu’il eut du mal à s’expliquer.
Résultat final ? Il y a une dizaine de jours, il a été jugé au tribunal de Koléa pour vol de téléphone portable.
Deux ans de prison ferme et une amende de 10 millions de centimes ont été requis contre lui.