Résumé:
Farid 23 ans, étudiant en 4e année économie, avait du mal à trouver le sommeil à cause, selon lui, du poulet qui avait été servi à la cantine de la cité universitaire. Il décida, en pleine nuit, de protester.
Farid fusilla du regard son copain de chambre et lui répliqua :
- Non, je ne suis pas en train de dire n’importe quoi. Mais si tu considères que demander un peu de respect à notre égard est une manière de dire n’importe quoi, là c’est autre chose.
- Je suis d’accord avec toi, Farid mais ce n’est vraiment pas le moment de présenter une plateforme de revendications, si tu vois ce que je veux dire... Tu as vu l’heure qu’il est ? Demain matin, il fera jour et tu verras plus clair.
- Mais cela te concerne aussi, Salah. Tu ne veux pas que la nourriture que l’on nous sert soit de la nourriture et non du poison ?
- Oh ! Farid, tu exagères ! Ce n’est pas du poison qu’on nous sert... Je ne te laisserai pas dire n’importe quoi... Cela fait quatre ans que nous mangeons dans ce resto «U» et personne n’en est mort. Mais je suis d’accord avec toi si tu me dis que cette nourriture peut être améliorée...
- Ah! mais je constate qu’on t’a acheté, Salah ! Tu es devenu un faux jeton...
- Bon, Farid je vois que tes douleurs d’estomac te font dire n’importe quoi alors je préfère ne plus te répondre. Tu es grand et vacciné ; fais ce que tu veux.
- Parfaitement, je fais ce que je veux. Si tous les étudiants étaient comme toi, on nous servira tous les jours des lentilles avec du pain rassis. Je vais en toucher un mot aux responsables de la cité. Bien sûr, si je te demande de m’accompagner, tu refuseras...
- Je n’ai pas envie de te répondre.
- Je savais que tu ne voudrais pas venir avec moi. Il en a toujours été ainsi dans les grands mouvements révolutionnaires... C’est toujours une personne qui se sacrifie et c’est tout le monde qui en profite.
Salah s’était promis de ne plus rien dire mais les derniers mots de Farid l’avaient fait sursauter.
- Tu fais une révolution à cause d’un peu de poulet que tu as du mal à digérer, elle sera belle ta révolution, Farid. Farid haussa les épaules et sortit de la chambre.
Il avait l’intention de se rendre au pavillon administratif mais dès qu’il fut sorti de la chambre, il eut une autre idée : faire un tour dans les cuisines. Il trouva la porte fermée. Au lieu de rebrousser chemin, il força la porte et y entra. Il se rendit tout droit à la chambre froide et l’ouvrit. Là, il trouva pour au moins dix kilos de poulets congelés. Farid avec rage se procura un gros sachet noir en plastique y fourra les poulets en question et les jeta dans la grosse poubelle qui se trouvait dans la cour. Convaincu qu’il avait accompli un acte de salubrité publique, il retourna à sa chambre comme si de rien n’était. Mais deux employés l’avaient vu jetant les poulets à la poubelle et se firent un devoir de le dénoncer au premier responsable de la cité «U» lequel, à son tour, déposa plainte contre l’auteur de ce qui s’apparentait à un acte de sabotage.
Il y a quelques jours, Farid se retrouva au box des accusés au tribunal de Bir Mourad-Raïs pour répondre de son acte.
Farid qui s’était dit que la nourriture de Serkadji n’était certainement pas faite pour être supportée par son estomac fragile, sollicita l’indulgence des responsables de la cité «U» à qui il demanda pardon, justifiant son geste par l’énorme stress qui l’avait «esquinté» au point de ne plus savoir ce qu’il faisait.
Après délibérations, il fut condamné à une amende de 20.000 DA. Auparavant, six mois de prison ferme avaient été également requis contre lui.
Ah! Oui, le poulet était vraiment mauvais.
La preuve ? Il a failli l’envoyer en prison !