Le Midi Libre - entretien - À cause d’un tournoi de football
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Edition du 30 Mai 2012



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Tentative de meurtre
À cause d’un tournoi de football
30 Mai 2012

Dans une de nos précédentes chroniques, nous écrivions que nos concitoyens étaient en train de perdre l’usage de la parole qu’ils tendaient à remplacer par le recours au jeu des coups de couteau. Nous avions avancé par ailleurs que ce phénomène concernait aussi bien les personnes d’instruction modeste que ceux bardés de diplômes. Dans l’affaire qui va suivre, une triste confirmation de ce que nous avançons.

Nous sommes le 23 juin 2011. Un groupe de jeunes du quartier Les Vergers à Birkhadem a organisé un tournoi de football. En 2010, un tournoi similaire avait été organisé avec succès. C’est pourquoi, d’un commun accord il a été décidé de le rééditer cette année-là. Tout le monde était convaincu que le succès serait plus retentissant encore, vu que d’autres équipes s’étaient jointes à la compétition. Il y avait notamment une équipe composée uniquement d’étudiants. Une bonne occasion pour vérifier ce qu’avaient dans les jambes ceux dont les têtes semblaient bien pleines.
Or, pour des raisons que personne n’avait jamais pu élucider, l’équipe composée d’étudiants ou qui se faisaient passer comme tels n’avait pas été programmée pour participer au tournoi. Cet oubli avait mis en colère Mohamed qui n’avait que 23 ans et qui s’était autoproclamé responsable de l’équipe de jeunes instruits. Il s’approcha de quelques responsables de l’organisation et leur dit :
- Quelqu’un peut-il me dire quel est le fils de… qui n’a pas programmé mon équipe dans ce tournoi ?
Il y a lieu de signaler que l’auteur du chapelet d’insanités que nous n’avons pas pu reproduire mais dont la teneur peut être aisément devinée, est un étudiant de la fac de droit d’Alger.
Quelqu’un lui répondit :
- Ne te mets pas en colère, Ahmed. C’est Nordine qui est responsable de toute l’organisation. On ne sait pas pourquoi il a oublié ton équipe. Mais il doit avoir de bonnes raisons de le faire.
- Et moi j’ai de bonnes raisons de lui casser la gueule à ce fils de…
Un autre organisateur intervint sur le ton de la conciliation et de la pondération.
- Calme-toi, Ahmed… De toutes les manières, tu ne peux parler maintenant avec Nordine. Il est occupé. C’est lui qui est en train d’arbitrer le match d’ouverture.
Ahmed regarda en direction du terrain et vit un homme habillé en noir en train de courir au milieu de 22 joueurs.
- Ah ! Mais je le reconnais… c’est ce fanfaron qui a organisé le tournoi… je vais lui dire deux mots pour lui apprendre à être respectueux des bonnes manières.
Le groupe d’organisateurs était partagé entre l’idée d’empêcher Ahmed d’arriver jusqu’à Nordine et le désir de voir se dérouler un beau spectacle inattendu. Nordine avait la réputation d’être nerveux et celui qui était sur le point de s’expliquer avec lui l’était aussi. Un beau spectacle en perspective. Oui mais ils étaient loin de soupçonner que les coups de colère d’Ahmed étaient aussi féroces qu’imprévisibles.
Dès qu’Ahemed fut arrivé au niveau de Nordine, il se mit à vociférer :
- Hé ! Il parait que c’est toi qui n’as pas programmé mon équipe. Tu peux m’expliquer pourquoi espèce de… et …de…
Norine devant tant d’agressivité verbale jugea bon d’arrêter la partie pour se consacrer comme il se devait à la nouvelle situation.
- Du calme, du calme chriki….
- Je ne suis pas chrikek ! Je ne veux rien savoir ! Ce n’est pas un chien comme toi qui mettra sur la touche mon équipe…
- S’il te plait… sortons du terrain et calme-toi. Nous avons dû négocier pendant des semaines pour arracher aux habitants de cette cité l’autorisation de jouer sur ce terrain. Si tu n’arrêtes pas tes grossièretés, ils peuvent changer d’avis et c’est tout le tournoi qui sera purement et simplement remis en cause.
- Eh bien ! Si mon équipe ne joue pas, ce sera avec plaisir que je verrai le tournoi annulé.
Ces propos d’une rare méchanceté donnèrent des ailes à Nordine qui poussa alors Ahmed :
- Allez, sors d’ici !
Ahmed tomba mais se releva aussitôt pour brandir un couteau qu’il avait sorti de derrière une chaussette. Il se rua alors sur Nordine et lui porta un coup au niveau de la cuisse droite. Celui-ci poussa un hurlement de bête blessée et s’effondra au milieu du terrain. Ahmed essuya la lame de son couteau avec un mouchoir en papier et s’en alla en courant.
Les jeunes gens qui étaient là s’approchèrent du blessé et quand ils eurent vu sa plaie, ils se mirent à hurler ;
- Vite ! vite ! Une voiture ! Il perd beaucoup de sang ! On dirait un robinet.

Quand Nordine arriva à l’hôtel de
Kouba, il était sans connaissance.
Après les premiers soins, il fut emmené à l’hôpital de Clairval à Chevaley où il subit plusieurs opérations délicates ainsi que des transfusions sanguines pour remplacer tout le sang qu’il avait perdu.
Nordine fut sauvé et Ahmed l’étudiant en droit fut arrêté.
Jugé il y a quelques jours, l’affaire atterrit à la cour d’Alger. La peine de prison à perpétuité a été prononcée à l’encontre d’Ahmed parce que selon le procureur général, le coup porté était calculé pour être mortel.

Par : kamel Aziouali

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