Le coach suisse de l’ES Sétif estime que le football algérien est en pleine évolution et la formation des jeunes, leur encadrement par des techniciens, leur orientation et les conseils qu’on leur prodigue peuvent beaucoup les aider à élever leurs performances.

Ce technicien de renom, qui a évolué au sein du Servette de Genève dans les années 1980 et admirateur du football offensif, estime que certains joueurs algériens ont de bonnes qualités techniques.
Alain Geiger dont l’équipe va affronter demain, à Sétif, le Mouloudia d’Alger de François Bracci et anciennement drivée par son coéquipier du Servette de Genève des années 1980, en l’occurrence Michel Renquin (début des années 2000) va s’efforcer de remporter cette confrontation face au doyen des clubs algériens. Et conserver, ainsi cette dynamique de groupe qui possède la hargne de gagner en dépit de la fougue et de la ténacité du MCA.

Midi Libre : Comment appréciez-vous la situation au sein de l’Entente Sportive de Sétif et quelles sont vos ambitions ?

Alain Geiger : Nous sommes partis un peu dans l`inconnu dans ce championnat dans la mesure où il y a des joueurs connus qui ont quitté le club de l`Entente de Sétif. Nous avons réalisé une bonne phase aller en remportant le titre de champion de l’aller et nous avons terminé premier au classement (de l’hiver). Il faut maintenant rester dans le peloton de tête parce qu’il y a quatre ou cinq équipes qui prétendent jouer le titre.
Il faut réaliser un bon départ au début du championnat et être régulier sur la deuxième partie. En effet, la seconde partie du championnat sera difficile. Nous ne nous cassons pas la tête car nous n’avons pas construit une équipe et sur le plan financier, nous n’avons pas programmé un titre de champion, cette année.
Nous avons un outsider et nous essayons de prendre match après match et puis essayer de gagner des matches. Ensuite, nous verrons bien à la fin du championnat où nous allons nous situer et voir si c’est jouable ou non jouable. Pour l’instant, nous ne nous tracassons pas puisque nous n’avons pas pour objectif d`être champion d`Algérie, mais simplement rester dans le groupe de tête et jouer progressivement match après match.

Vous êtes d`autant plus enthousiaste au sein de l`équipe de Sétif en plus de la qualification en coupe d`Algérie acquise brillamment face au MC Oran. Vous disposez d`une équipe qui tourne assez bien et vous avez un concurrent, à savoir l`USM Alger. L`Entente est une équipe qui joue bien et avec votre capital expérience, vous pouvez donner un nouveau souffle à l`équipe. N`est-ce-pas ?

Oui, c’est juste, mais nous avons commencé le championnat difficilement après quatre journées à la 14e place. Donc, il y a eu des passages à vide et des problèmes que les équipes rencontrent à longueur du championnat.
Donc, il faut rester tranquilles et concentrés et il faut également bien travailler. Et nous l’avons vu lors de la précédente journée face au NAHD où après 23 minutes, nous avons été réduits à dix joueurs. Donc tout peut se passer dans les matches et nous pouvons commencer à perdre des points et des matches.
Cependant, pour l`instant, nous sommes sur une bonne route et une dynamique qu’il faut conserver.

Après 23 minutes, l`ESS a joué à dix joueurs.  Peut-on savoir quelle est la potion magique utilisée pour battre le NA Hussein Dey à domicile ?
Avant l’expulsion, il y avait la possibilité de prendre deux buts d`écart. Cela nous a beaucoup aidés et nous avons bien évolué en début de rencontre notamment durant les 15 et 20 premières minutes de jeu et d’ailleurs, le joueur expulsé a de bonnes qualités de jeu. Nous avons débordé sur les côtés et nous avons ramené des centres sur Aoudia avant de prendre rapidement le large. Et un incident anodin, un télescopage entre deux joueurs et l’arbitre a pris la décision sachant, qu’à mon avis il n’ y avait pas faute et le referee a décidé d`expulser notre joueur. Après nous avons géré le match et à 2 à 0, la rencontre est devenue difficile.
A 2 à 0, c’était difficile et le NAHD n’avait rien à perdre et pouvait revenir au score et ils ont même bénéficié d’un penalty qui aurait pu nous mettre en danger en deuxième mi-temps, mais cependant, nous avons maîtrisé tout le match.

L’équipe de l’Entente de Sétif est un bon team, pratiquant un beau football et en plus de la condition physique à parfaire et votre tactique basée sur l’esprit offensif, cette équipe peut faire sensation cette année en championnat d’Algérie. N’est-ce- pas ?
Oui. Sur le plan africain, nous allons jouer la coupe de la CAF à titre honorifique et nous avons des ambitions pour nous qualifier pour la poule finale. Nous avons le staff technique et les entraîneurs qui entourent bien le groupe. Pour l’instant, ça marche bien entre la direction, le staff technique et les joueurs, alors que nous allons aussi disputer la coupe de l’UNAF et face au Club Africain, ce sera un challenge… Il faut toujours souligner qu’à la maison comme à l’extérieur, et avec le soutien de notre public, et cela fait toujours plaisir que les supporters soient le 12e homme et toujours derrière nous.

Vous avez quand même apporté une certaine empreinte à cette équipe sachant qu’en Suisse les joueurs pratiquent l’offensive à outrance.
C’est vrai que j’essaie de trouver des joueurs qui peuvent marquer des buts et il y a des joueurs qui veulent aller de l’avant. Le football consiste à marquer des buts et nous savons qu’en Europe, notamment en Angleterre et en Italie, beaucoup de buts sont inscrits. Tout simplement en Algérie, un match qui se termine par 1 à 0, on est content, ou bien lorsqu’on perd par 3 à 0 on dit que ce n’est pas normal alors que cela fait partie du football. Par ailleurs, il existe aussi des scores fleuves et il faut prendre cette empreinte en Algérie où il faut également jouer à l’avant, en attaque.

Vous étiez défenseur et en même temps vous alimentiez l’attaque lorsque vous évoluiez au sein du Servette de Genève. Est-ce qu’il existe une similitude entre le football algérien et le football suisse ? Comment appréciez-vous le football algérien en particulier, et le football africain, en général, d’autant plus que vous avez drivé l’équipe d’El Masry et vous connaissez le football continental au niveau des clubs ?
Il y a des différences, naturellement, c’est la culture qui fait que les gens vivent différemment dans leurs pays et où le football se pratique aussi d’une manière différente. Mais, les mêmes règles restent et il faut comprendre que le football est un jeu simple et le FC Barcelone nous fait rappeler, tous les jours, que c’est un football qui est purifié et qui est très simple de jeu vers l’avant et une multitude de passes et on essaie aussi de l’appliquer dans tous les pays du monde.

Le plus important est-ce que c’est de jouer au football comme l’Ajax Amsterdam dans les années 1970, c’est-à-dire pratiquer un football total orienté résolument vers l’offensive ? Et puis, puisque vous évoquez le cas du Barça qui est devenu la bête noire du Real Madrid à Santiago Bernabeu, est-il question d’insuffler un style spécifique à l’Entente de Sétif ?
On ne peut pas comparer tout cela, mais pour dire il y a une grande différence entre l’Europe et l’Afrique et ce que je remarque chez les jeunes, c’est qu’en Europe ils ont 7 à 9 entraînements par semaine et puis les jeunes du même âge sont à 3 à 4 séances d’entraînement.
Donc, il y a un double entraînement qui est fait à un certain âge et c’est peut être là-dessus que l’Europe au niveau du football travaille plus et avec plus de consistance et il y a éventuellement plus de moyens et d’installations et d’éducateurs également.
C’est peut-être la différence au niveau de la formation, mais je crois que la FAF est en train de combler cette lacune tandis que dans les clubs on essaie de s’organiser pour donner une très bonne formation pour les futurs jeunes joueurs.

Donc, vous donnez la primauté au jeu et à l’engagement physique pour conférer plus de fraîcheur physique aux joueurs et pouvoir surclasser l’adversaire, en plus des qualités techniques bien entendu.
Oui, disons que le plus important en football, c’est la technique et le sens du jeu. Si vous avez la technique, il est possible de faire des choses avec le ballon et après, bien sûr, c’est très important de disposer également de joueurs qui sont bien préparés.
Moi et Boudjemâa, le préparateur physique qui prépare toujours bien les joueurs, nous veillons au grain et puis il les fait travailler spécifiquement aussi. Et là, nous sommes bien sur le plan physique et l’entraîneur ramène la touche au niveau tactique et de l’organisation.
Tout cela est très important pour bien faire. En Algérie, il est très important d’entourer les joueurs qui sont restés petits amis, il faut bien les encadrer et les entourer.

C’est quoi exactement l’encadrement des joueurs ?
Il faut les encadrer, c’est-à-dire les conseiller. Ils ont besoin d’avoir beaucoup de conseils. Je suis surpris de savoir qu’un joueur ne se rend même pas compte qu’il possède des qualités. Alors, je lui dis, mon petit tu as des qualités pour faire une carrière ! Rends-toi compte de cela !
Et puis, il me regarde et il a l’air de me dire apparemment que personne ne m’a dit cela.

S’agit-il, par exemple, d’Abdelmoumène Djabou, qui joue bien à la manière de Messi avec son pied gauche et ses dribbles déroutants ?
Il s’agit de joueurs moins connus que Djabou parce que celui-ci a déjà fait part de ses preuves et a des qualités. Un garçon comme Djabou, cela fait normalement quatre années qu’il devait être en Europe dans un championnat. Car, pour lui, le championnat d’Algérie est trop facile. Il devrait évoluer en Europe dans une bonne équipe et puis il continue à progresser. Car, c’est un garçon qui a un immense talent.