Résumé : Zahia, une enseignante d’une trentaine d’années, fait la connaissance d’un jeune homme par le biais d’Internet.

La jeune enseignante ne fut pas déçue. Bien au contraire. Elle trouva Madjid exactement comme elle l’avait imaginé… Il était même beaucoup mieux que l’image qu’elle s’était forgé de lui. Mais restait la grande inconnue : comment la trouvait-il, lui ? Elle vit le jeune homme à l’intérieur de l’écran de 17 pouces, hochant la tête plusieurs fois de gauche à droite en signe d’émerveillement.
- Vous êtes très belle, Zahia ; je suis vraiment gâté par le destin ! Il faut que nous nous rencontrions.
Zahia était aux anges. Béni soit le jour où elle avait décidé de confier son destin aux mailles du Web !
Les deux jeunes gens convinrent d’un rendez-vous pour le surlendemain (c’était un samedi) vers 11h.
Zahia était si heureuse qu’elle décida d’inviter le jeune homme à déjeuner dans un restaurant huppé d’Alger…Quitte à ce qu’elle dépense jusqu’au dernier centime les 40.000 DA qu’elle venait de retirer de son compte postal.
Elle passa la soirée du jeudi et toute la journée du vendredi à rêver de l’homme qu’elle venait de connaître et qui avait tout l’air d’être celui que son destin lui avait réservé. Ce ne pouvait être que lui parce qu’il était fils unique et de condition aisée. Son destin ayant réalisé l’injustice dont il avait fait montre à son égard avait dû décider de se racheter en lui faisant toucher le gros lot ! Elle était si certaine que dans quelques mois, elle serait l’épouse d’un jeune et riche héritier qu’elle avait failli parler de lui à sa mère. Mais elle tempéra son ardeur et se ravisa. Elle eut la sagesse de s’accorder un petit délai avant d’en parler à sa mère. En principe, samedi en fin d’après midi, quand elle aurait pris congé du jeune homme, elle saurait à qui elle avait vraiment affaire. Et son instinct de femme lui susurra qu’elle était dans le vrai.
Le samedi, à 10h50, son téléphone portable sonna. C’était Madjid.
- Allo ! Zahia…Où es-tu ?
Zahia était arrivée déjà au lieu du rendez-vous, mais elle mentit pour ne pas donner l’air d’être très intéressée par ce rendez-vous.
- Euh… je vais arriver dans cinq minutes…
- Très bien…je vous ai appelée pour vous demander de patienter un peu parce que j’arriverai un peu en retard. Ma voiture est tombée en panne alors je viens en taxi.
- Il n’y a pas de problème, Madjid, je vous attends.
Madjid finalement arriva à 11h 10 dans un taxi. Il était habillé de manière élégante et était plutôt bel homme...
Après un échange de banalités, Zahia lui demanda où il voulait qu’ils aillent déjeuner et il lui répondit qu’il lui en laissait l’initiative.
- Ce sera pour moi, lui dit-il, l’occasion d’avoir un aperçu de vos goûts.
Ils se rendirent alors dans un restaurant se trouvant dans un des hôtels huppés du centre-ville.
Dès que l’hors-d’œuvre fut servi, Zahia réalisa que le jeune homme en compagnie duquel elle se trouvait n’avait rien à voir avec le fils unique aisé dont il lui avait parlé. Il avait vidé son assiette en moins de trente secondes, avec une rapidité qui lui avait donné du vertige. Il s’était comporté exactement comme s’il n’avait pas l’habitude de manger à sa faim ! Un terrible soupçon s’insinua dans le cœur de Zahia. Un soupçon qui se confirma quelques instants plus tard lorsqu’il dévora un steak de 250 grammes en un clin d’œil.
Alors Zahia demanda :
- Qui êtes-vous, Madjid ?
- Je vais vous donner ma carte d’identité, il y a tous les renseignements que vous voudrez mais s’il vous plaît, quand je mange, je n’aime pas être dérangé !
Elle prit sa carte d’identité et au vu de son adresse, elle sut qu’il lui avait menti.
- Pourquoi m’avez-vous menti ?
Avant de répondre, il alluma une cigarette.
- Si je vous ai dit que j’étais un pauvre type qui n’a même pas de quoi payer un café et une cigarette, vous accepteriez de sortir avec moi ?
Elle voulut se lever mais il se saisit de sa main très fortement et l’obligea à se rasseoir. Elle persista à vouloir se lever et il appliqua sa cigarette contre le revers de sa main. Elle hurla et il la lâcha.
Elle sortit en courant. Elle ne rentra pas chez elle. Elle déposa plainte au poste de police le plus proche. Lorsqu’elle avait regardé sa carte d’identité nationale elle avait gravé dans sa mémoire tous les renseignements le concernant.
Les deux férus d’Internet et du chat se sont retrouvés il y a quelques jours au tribunal d’Alger.
Une peine de 3 ans de prison ferme a été requise contre Madjid.
Il y a fort à parier qu’après cette mésaventure, Zahia révisera sa conduite vis-à-vis des rencontres et des discussions sur le Net.