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Edition du 27 Avril 2011



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Pr Merad Boudia, cardiologue, chef de service au CHU Mustapha, au Midi Libre
«35% des Algériens souffrent d’hypertension artérielle»
27 Avril 2011

Le Professeur Merad Boudia est cardiologue spécialiste de l’hypertension artérielle. Auteur d’un ouvrage intitulé HTA (hypertension artérielle), il développe d’une manière explicite ce qu’est l’hypertension artérielle. Avec un style scientifique mais combien fluide, il met l’accent sur les problèmes liés à cette pathologie. Une pathologie qui tue chaque année des milliers de personnes et touche aussi bien les femmes que les hommes. Elle n’épargne ni les pays pauvres ni les pays riches ; aucune discrimination raciale. Nous avons rencontré le Professeur Merad Boudia au CHU de Mustapha où il occupe le poste de Chef de service cardiologie. Il a bien voulu nous accorder cet entretien pour donner de plus amples éclaircissements quant à cette maladie pernicieuse.

Midi Libre : L’hypertension artérielle est une pathologie qui semble prendre de l’ampleur ces dernières années ; peut-on connaître le nombre d’hypertendus en Algérie ?

Pr Merad Boudia : Vous tombez bien car j’étais promoteur d’une enquête sur le plan national. En effet, nous avons réalisé une enquête dans les règles imposées par l’OMS et la Société algérienne de l’hypertension artérielle (SAHA). Selon des normes strictes que nous avons respectées, on a fait un échantillonnage à travers le territoire, comme nous avons fait également une enquête sur les habitudes alimentaires et même concernant le tabac. Et surtout, nous avons fait une étude parallèlement à tous ces paramètres, les autres facteurs de risques cardiovasculaires, tels que la glycémie, l’obésité, le stress, la sédentarité… Cette enquête a révélé 35% d’hypertendus en Algérie âgés de 18 ans et plus, avec un taux légèrement supérieur chez les femmes. Par contre, nous avons découvert aussi que 50% des malades ignoraient qu’ils étaient hypertendus et à peine 10% étaient traités.

Votre enquête a été réalisée en 2004, ces chiffres obtenus vous permettent-ils de savoir qu’en est-il de la prise en charge 7 ans après ?
A travers ces chiffres on peut vérifier s’il y a eu une amélioration ou pas. Par contre, une autre enquête qui a été faite récemment, mais pas sur le plan national, montre que 20% de malades sont pris en charge, ce qui est encourageant. Cependant, je ne peux vous l’affirmer étant donné que ce n’est pas moi qui ai fait l’enquête. Il faut dire que nous ne sommes pas les seuls, en France ou aux Etats- Unis, 35% des hypertendus ne sont pas pris en charge. On est moins performants que ces pays cités certes mais on constate une nette amélioration chez nous.

Peut-on connaître les causes de cette maladie ?
Cette maladie n’a pas de causes, sauf dans 5% des cas où l’on retrouve des causes endocriniennes, hormonales, des tumeurs… mais dans 95% des cas, on dit qu’elle n’a pas de causes. C’est ce qu’on appelle une hypertension artérielle essentielle. Seulement, il y a des prédispositions. Par exemple, si nous avons des parents hypertendus, nous avons de fortes chances qu’on le soit nous aussi.

Qu’en est-il de la prévention ?
Si l’on veut faire de la prévention, on doit cibler la descendance de ceux qui sont hypertendus, ainsi que les obèses, les diabétiques, les sédentaires, ceux qui ont une alimentation riche en sel, le tabac. Tous ces facteurs favorisent la maladie. Cependant, il y a aussi un facteur héréditaire. Par ailleurs, pour faire de la prévention, il faudrait aussi que les gens comprennent ce qu’est l’hypertension artérielle, à savoir ce sont des chiffres qui dépassent 14/9 et que ça peut toucher n’importe qui. A partir de 30 ans, il faut exiger de son médecin de lui prendre sa tension. Il est recommandé également à toutes les femmes de prendre leur tension, particulièrement lorsqu’elles sont enceintes ou lorsqu’elles prennent une contraception. Donc, dans la prévention, il faut cibler les gens à risques et lutter contre les facteurs à risques que nous avons mentionnés précédemment, à savoir l’obésité, la sédentarité, la glycémie, une alimentation riche en gras, éviter trop de sel et manger des fruits et des légumes. Autrement dit, comme dit le dicton, éviter les 3 blancs, c’est-à-dire le sucre, le sel et la farine.
Une fois qu’en est hypertendu, que doit-on faire ?
L’hypertension peut entraîner directement ou indirectement des complications, donc un suivi médical s’impose. Le traitement est pratiquement administré à vie et il ne doit être modifié ou changé qu’avec l’avis du médecin.

Qu’appelle-t-on un AVC ?
Les AVC sont l’une des complications de cette maladie. Ils peuvent entraîner des accidents vasculaires cérébraux (AVC). Mais pour être plus précis, il n’y a pas que l’hypertension artérielle qui peut provoquer un AVC. En effet, il y a ce qu’on appelle aussi l’embolie cérébrale qui n’est pas due à l’hypertension artérielle. Vous avez aussi une troisième catégorie d’AVC qui est due à une hémorragie cérébrale qui peut être provoquée par un petit anévrisme. Et lorsque nous recevons ce genre de malades, il est très important d’identifier de quel AVC souffre le malade pour le soigner, car le traitement de ces trois catégories citées n’est pas le même.

Peut-on dire que les AVC en Algérie sont un problème de santé publique ?
Pas seulement en Algérie, mais de par le monde les AVC sont un problème de santé publique. Chez nous, on n’a pas de vraies statistiques mais on dénombre entre 25.000 et 30.000 AVC par an. 15.000 morts par an, 10.000 restent handicapés à vie. Mais ces chiffres que je vous donne ne sont qu’approximatifs.

Un dernier mot…
Enfin, ce qu’on préconise, et c’est un point très important, c’est que les gens hypertendus se traitent. S’ils ne sont pas atteints de la maladie, ils doivent lutter contre les facteurs de risque cités plus haut, en l’occurrence en ayant une bonne hygiène de vie, une activité physique, diminuer le sel, le gras… Je voudrais dire aussi que les gens doivent être conscients que l’hypertension artérielle relève d’un fléau de santé publique. Ce n’est pas seulement l’affaire du médecin mais du citoyen également qui doit être conscient de sa santé en faisant des bilans. C’est aussi l’affaire des médias qui doivent sensibiliser la population quant au danger de cette maladie.

Par : Ourida Ait Ali

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