C’est un chantier titanesque auquel s’atelle la direction de Falcon Motors (distributeur en Algérie des marques Mitsubishi et Mitsubishi Fuso). M. Lyès Madi, adjoint directeur général de Falcon Motors, compte remanier la gamme touristique, relancer une nouvelle gamme utilitaire et réorganiser la carte du réseau de la marque aux trois Diamants. Ce sont là les principaux chapitres d’un plan global qui s’étalera jusqu’à 2015. M. Madi a bien voulu nous tracer dans le détail les différentes étapes de sa nouvelle stratégie.
Falcon Motors a participé à la 14e édition du Salon international de l’automobile d’Alger ; quelles sont vos appréciations du salon ?
M. Lyès Madi : On remarque pour cette 14e edition du Salon de l’automobile d’Alger une amélioration en continue. Les exposants ont mis le paquet en ce qui concerne la qualité des stands et l’accueil des visiteurs et des clients. Le marché algérien est toujours demandeur de véhicules et les clients affichent leur engouement pour l’achat de véhicules ; ce dernier est devenus de plus en plus exigeant, ce n’est plus le client qui ne pense qu’aux remises, mais il nous demande des détails sur nos services après-vente et la disponibilité de la pièce de rechange et exige aussi d’acquérir une voiture robuste, avec une qualité de moteur, du châssis… Je dirais donc que le client est devenu connaisseur, cela va de soi avec l’accès à l’information à travers les technologies de communications avancées existantes aujourd’hui, ce qui notamment donne accès au public de consulter avec plus de détails toutes les informations concernant la marque.
Certains clients nous demandent même des renseignements à propos de certains modèles de véhicules commercialisés uniquement en Amérique ou dans d’autre marchés et s’interrogent sur leur absence du marché algérien. Cela est bien sûr dû à plusieurs causes, tel que le prix, mais surtout la qualité du carburant existant en Algérie.
En ce qui nous concerne, on peut dire aujourd’hui que nous avons dépassé nos objectifs. Au courant du 2e semestre de l’année précédente, nous avons établi un nouveau plan de relance, il y a eu un redéploiement, une nouvelle organisation, des formations de perfectionnement pour l’ensemble de nos cadres, avec une redéfinition de la stratégie marketing, stratégie de communication et la stratégie des ventes de Mitsubishi en Algérie, axée essentiellement sur la loyauté du service. Notre vision aujourd’hui ne consiste pas seulement en la quantité de vente, mais assumer en matière d’après-vente et de disponibilité de pièces de rechange ; cela est notre politique actuelle.
Falcon Motors a exposé au salon la gamme des pick-up ainsi que le Pajero Sport, avec une absence totale de la gamme touristique. Que devrions-nous déduire de cette situation et quelle sera l’avenir de la Lancer en Algérie?
Effectivement, en ce qui concerne la gamme des véhicules touristiques, principalement la Lancer qui était très bien positionnée par rapport au segment auquel elle appartient, une berline 1.3 litres essence avec une consommation de 5l/100, fabriquée et montée au Japon contrairement à ses rivales qui ont étaient délocalisées, ce qui a fait que son prix soit un peu plus cher par rapport à son segment dans le marché, on a actuellement puisé notre stock et on a arrêté sa commercialisation au grand public, sauf pour des commandes spécifiques d’avis d’appel d’offres ou ventes ciblées, mais pas en vente traditionnelle.
Il existe un ambitieux projet qui a été un peu retardé suite à la catastrophe naturelle qu’a connue le Japon, c’est la Global Small. Une petite micro-citadine d’une motorisation de 1.2 L essence qui ne sera disponible qu’en fin 2012 ou début 2013. Elle représentera une petite surprise pour le marché algérien et sera montée dans les usines japonaises installées en Thaïlande ce qui diminuera ainsi son coût. Ce nouveau modèle sera présenté aux Algériens avec un prix très accessible et compétitif en termes de rapport qualité/prix.
Comment se porte la gamme des 4x4 Mitsubishi en Algérie connue traditionnellement par le Pajero ?
Sur le segment des 4x4 chez Mitsubishi, on a le traditionnel PAJERO Mentero avec ses prix qui peuvent aller jusqu’à 7 million de dinars, et donc par rapport au marché algérien, on reste toujours dans les commandes spécifiques, pour des avis d’appels d’offres…un 4x4 bien équipé, robuste, connu pour sa cylindrée...
A l’occasion du 14e salon de l’automobile d’Alger on a présenté le Pajero Sport, un 4x4 sportif et dynamique d’un beau design, avec une motorisation de 2.5L. Nous avons écoulé 60 unités durant ce salon, grâce aussi à la remise de 180.000 dinars. J’ai été personnellement surpris par l’engouement des clients pour le Pajero Sport et même nos clients n’y croyaient pas, surtout par rapport à son prix qui leur offrait un vrai 4x4 franchiseur japonais nommé Pajero.
Falcon Motors commercialise une large gamme de véhicules utilitaires avec un panel de déclinaisons, des camions nacelles, grus, frigorifique… Présent au côté de la gamme des bus Rosa ; qu’en est-il de cette partie de votre business ?
Concernant l’utilitaire et les bus, on avait les bus Rosa avec leurs 26, 30 et 34 places avec et sans climatisation, on avait les camions avec différentes applications ; nacelles, grus, frigorifique, dépannage, etc. des camions qu’on importait en châssis-nu 2.5T et 3.5T aménagés en Algérie à travers des carrossiers certifiés. Aujourd’hui nous avons épuisé toute la gamme et actuellement on est en phase de négociation avec nos partenaires japonais pour l’introduction d’un nouveau camion châssis nu de 3.5 tonnes et une motorisation plus puissante afin de subvenir aux besoins du marché.
Ce camion, le "Canter", est fabriqué au Japon et n’a pas était délocalisé, ce qui l’a un peu retardé à cause encore une fois de la situation que vit actuellement ce pays. Il a été déjà commercialisé en 2.5 tonnes est 3.5 tonnes, mais le nouveau a plus de capacité de charge et une motorisation plus importante que ces précédents, ce qui a fait que nous avons eu énormément de commandes notamment des avis d’appel d’offres. Par rapport au pick-up, le L200 avec ses différentes versions, le simple et le double cabine, le 4x2, le double cabine 4x4 et le Sportero qui est le produit phare, reste produit suréquipé (un system d’allumage spécifique et un turbo allemand "Bosch" comon-rail, qui est le meilleur turbo existant sur le marché aujourd’hui…) ce qui a créé une demande énorme, et on pense que ça va durer encore quelque temps.
On note que 65 à 70% du marché du pick-up en Algérie va pour le simple cabine. On a enregistré pour le L200 une demande exponentielle notamment par le biais des dispositifs mis par l’Etat algérien tel que l’Ansej, la Cnaac, l’Andi, etc. Près de 2.500 ’’proforma’’ ont été livrés à travers ces dispositifs-là, ils sont actuellement en instance due bien évidement à la procédure de validation et d’approbation des diffèrents organismes liés à ces dispositifs. Sachant que notre produit L200 offre une fiabilité, une robustesse et une longue durée de vie prouvée, on l’a testé avec les agriculteurs, les entrepreneurs, les ambulants, etc., d’ailleurs au salon, nous étions les seuls à mettre en place des miroirs sous les véhicules, afin qu’on puisse voir à quel point le châssis est solide. La disponibilité immédiate et surtout son prix ont fait que les jeunes investisseurs désirant s’octroyer des crédits se sont tous tournés vers notre produit.
La force de vente de tout concessionnaire est l’étendue et la qualité de son réseau, comment se développe l’activité au sein de Falcon Motors ?
Dans notre stratégie globale, une grande partie a été réservée au réseau. On avait 35 agents agréés à travers le territoire national, actuellement on en est à 20 agents. Cette diminution résulte d’une sélection très sévère, et seuls les agents qui sont à la hauteur sont retenus pour représenter la marque Mitsubishi, il ne suffit pas d’avoir un espace de présentation de véhicules pour qu’on soit agents chez Mitsubishi, ni de vendre sans assurer un service après-vente et la disponibilité des pièces de rechange, donc c’est ce qui nous a obligés dà restreindre le nombre de nos agents agréés aà20, et nous sommes en train de les former et les tirer vers le haut.
Pour cette année, on compte intégrer 5 nouveaux agents agréés. Leur ouverture est imminente et il s’agit d’agents à Tamanrasset, Ouargla, Oued Souf, Blida et Annaba, et donc on en sera à 25 d’ici la fin de l’année en cours. Un plan quinquennal a été développé. D’ici 2015 nous atteindrons notre objectif qui est de couvrir tout le territoire national. J’estime qu’un client qui réside à Tindouf ou à Illizi ou à Adrar, se doit d’avoir un service après-vente chez un agent agréé à proximité de lui. Ce n’est pas normal qu’il doit faire jusqu’à 2.000 km pour une simple vidange.
Autre point important, l’originalité de la pièce de rechange. Je tiens à affirmer que chez Falcon Motors Mitsubishi nous n’avons pas eu un problème de contrefaçon, sauf peut-être pour la filtration, mais pas dans les autres pièces. Le système Mitsubishi a fait que les fabriquants de la contrefaçon ne sont pas arrivés à suivre la nouveauté de nos références pièces. Ce qui est sûr, je le rappelle, c’est que si on achète une pièce contrefaite à moindre prix, on la payera 5 fois plus en cas d’accidents grave dû à l’utilisation de cette pièce, en mettant en danger notre vie et celles de nos proches. Pour ce qui est du volet investissement, nous avons déjà acquis une assiette de 17.000 m2 à Dely-Brahim, nous attendons le feu vert des administrations pour débuter les travaux de construction de notre administration et notre méga showroom. Il est utile de signaler que nous avons également acquis des assiettes pour notre succursale à Ouargla et les pré-phases études sont lancées. On est aussi à la recherche d’autres assiettes à l’Est et à l’Ouest pour deux autres succursales, des succursales qui vont servir de soutien pour tous nos agents agréés afin de ne plus se déplacer jusqu’à Alger.
Certaines marques chinoises équipent leurs véhicules de moteurs Mitsubishi. Les concessionnaires de ces marques en Algérie mettent en avant la motorisation des véhicules comme argument principal de vente. Ne pensez-vous pas que la marque Mitsubishi sera affectée par ses pratiques qui peuvent créer de la confusion chez le client ?
Mitsubishi Japon a vendu près de 200.000 moteurs dégriffés pour le marché local chinois, après ils les ont mis en exportation et c’est de bonne guerre j’imagine. Moi je dis, qu’en est-t-il de l’homologation, quand vous mettez un poumon Mitsubishi et des organes autres (tous dépend des marques) c’est comme si vous mettez une personne, vous lui faites des greffes avec un cœur solide, mais un rein, un pancréas et tout le reste d’une qualité très mauvaise et non compatible. Cette composition là, fera que physiologiquement cette personne ne pourra pas vivre normalement, et donc pour moi le problème en Algérie est un problème d’homologation. Si on veut sauvegarder le marché algérien et épargner des vies humaines, ce sera par une homologation claire, nette et saine. Actuellement on est en train de faire une homologation administrative, c’est-à-dire réceptionner des véhicules par rapport à une paperasse admirative que tout le monde peut fournir. On a posé le problème auprès des services des mines, ces derniers font des efforts par rapport à ces homologations mais c’est aux pouvoirs publics d’engager des actions concrètes et rapides c’est-à-dire comme en Europe où il existe 3 laboratoires d’essais pour des millions de véhicules de tout le marché européen. Ne faut-il pas qu’il en existe un pour le Maghreb par exemple ? Ne pourra-t-on pas sous-traiter pour chaque modèle ? Ces actions là doivent êtres prises par la tutelle.
Je dirais qu’il faut faire une bonne homologation. Certaines marques sont connues et suivent toutes les normes notamment de sécurité, mais d’autres qui circulent dans le marché algérien sont classées en dessous de la moyenne dans leur crash test. Il existe des normes à respecter et pas uniquement sur papier, quand des modèles de véhicule ne sont pas commercialisés ni en Europe, ni en Amérique, ni en Asie et commercialisés en Algérie avec de grandes quantités, là les pouvoirs publics doivent intervenir et demander si ces véhicules là répondent aux normes. Ce n’est qu’à ce moment là, qu’on arrivera à 100.000 véhicules par an, au lieu de 300.000 et là on pourra parler de crédit de consommation pour permettre aux pères de famille d’acheter un véhicule de qualité qui répond à ses exigences, qu’il pourra garder pour une dizaine d’années et on pourra par la suite gérer notre parc auto.
On est là pour faire du profit, mais pas en dépit de la qualité des produits. Tous les concessionnaires doivent être conscients. On doit également investir en ce qui concerne le service après-vente, les réseaux et la formation.