Le Midi Libre - Culture - Mouloud Feraoun à la cinémathèque algérienne
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Edition du 12 Mars 2011



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A l’occasion de la commémoration de son assassinat
Mouloud Feraoun à la cinémathèque algérienne
12 Mars 2011

La cinémathèque algérienne à Alger propose pour le mercredi 16 mars « Mouloud Feraoun » un film documentaire réalisé par Ali Mouzaoui. La projection sera suivie d’un débat avec le réalisateur.

Mouloud Feraoun a été assassiné par un commando de l’Organisation de l’armée secrète (OAS) le 15 mars 1962, à quelques mois de l’indépendance de l’Algérie. Il était né à Tizi Hibel le 8 mars 1913 en Kabylie, mais cette date de naissance serait celle qui a été déclarée par ses parents, l’enfant serait né en réalité en février. Le nom patronymique Feraoun a été imposé par l’administration française qui avait « inventé » des noms pour doter les populations d’Algérie d’un état-civil. Mais en Kabylie Feraoun appartenait à la tribu des Aït chabane. Formé à l’Ecole normale d’Instituteurs de Bouzaréah (Alger), il fut l’un des premiers Algériens à devenir instituteur. Mais très tôt s’affirma chez lui une vocation d’écrivain qui allait changer l’intonation même des voix colonialistes qui se posaient comme les interprètes de l’Algérie française. L’arrivée de Mouloud Feraoun dans le champ de la littérature introduit une rupture avec les poncifs mis au point par les écrits exotiques d’inspiration européenne. La production romanesque qui s’étend de 1898 à 1935 ne comporte du reste que très peu de noms algériens. Les personnages s’appelant Bertrand, Florance, Michel, etc. Aussi, Mouloud Feraoun qui avait pour amis des écrivains, et pas des moindres, comme Albert Camus et Emmanuel Roblès, avait déploré que leurs romans aient omis les Algériens. Loin d’être en proie au déchirement comme celui qu’avait enduré Jean El Mouhoub Amrouche, Feraoun énonce sa sentence à l’égard des écrivains algériens de langue française : « Notre position n’est pas si paradoxale qu’on le pense. En réalité, nous ne nous trouvons pas "entre deux chaises" mais bel et bien sur la nôtre » écrit-il en 1957. Ayant émergé en contexte colonial, l’œuvre de Feraoun a soulevé bien sûr des controverses parmi les militants nationalistes. Il avait, ne l’oublions pas, publié en 1960 chez les éditions de Minuit « Les poèmes de Si Mohand ». On pouvait ainsi lui reprocher l’intérêt particulier qu’il a dû manifester à la culture kabyle, un intérêt qui, à l’époque, était très peu admis. Mais cette réticence à adopter l’œuvre n’a pas pour autant empêché son auteur d’arracher une reconnaissance nationale. La littérature feraounienne devait même incarner une forme de résistance culturelle à la colonisation française en Algérie. Si la mémoire de cet écrivain semble aujourd’hui se perpétuer en Algérie, grâce notamment à la commémoration de son assassinat, elle est restée quand même assez relativement contrôlée. Ses textes, repris dans les manuels scolaires, ont connu des amputations. Cette énième aberration a consisté à éliminer la référence au contexte colonial. Mouloud Feraoun incarne cette virtualité d’hommes que notre pays a peu connue : on peut être favorable à l’indépendance tout en étant critique à l’égard du FLN, on peut adopter la langue française tout en rejetant l’Algérie française. Donc le film d’Ali Mouzaoui est venu à point nommé pour nous rappeler, au-delà de l’itinéraire de l’homme, la situation des Algériens pendant la colonisation.

Par : LARBI GRAÏNE

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