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Edition du 16 Janvier 2011



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Iness se produit à la salle Sierra Maestra
Le blues qui charme Alger
15 Janvier 2011

Une belle affiche qui n’a pas été mise en valeur, voilà ce qu’a été le concert de la chanteuse Iness à la salle Sierra Maestra d’Alger, ce jeudi soir. Pourtant l’artiste qui se produit pour la première fois en Algérie n’a pas déçu ses férus.

Alger avait peut-être la tête ailleurs avec cette effervescence sociale qui court dans ses veines de ville grincheuse, mais on est en droit de se demander si le gala avait bénéficié de la publicité qu’il aurait méritée. C’est donc devant une assistance clairsemée et avec une demi-heure de retard que le concert a débuté. Karim Albert Kook, natif d’Hussein Dey était entré le premier sur scène sur sa chaise roulante artistiquement ornée avant de s’emparer d’une guitare électrique histoire d’en fixer les accords. Iness a fait son apparition en arborant un costume qui résume toute sa philosophie artistique. Tout est dans ce costume d’apparence médiévale, un tantinet berbère, un tantinet européen. Un costume d’apparat qui est en fait une longue jupe de bergère, à texture complexe, et un tee-shirt serré qui laisse échapper les bras nus depuis les épaules jusqu’à la main. Le bracelet et les boucles d’oreilles sont kabyles, la chevelure châtaine irisée de blond est répandue sur le dos à la manière des amazones. « Je suis très émue et très contente, je vais vous emmener dans mon univers qui est aussi le vôtre, peut-être ce qui change c’est la manière dont je le vois » annonce-t-elle de go dans une langue française radiophonique. Les chansons d’Iness sont étranges et en même temps familières. Elles semblent sortir du fin fond des âges, elles épousent un air de complainte éternelle, d’hymne fougueux à l’amour, qui appuient d’une manière pittoresque sur les finales des textes. L’empreinte de son mari Karim Albert Kook y est patente, il y a dans sa musique du Rolling Stones, du Jimmy Hendrix et du Beatles. Pourtant c’est le blues qui semble imprégner le tout. L’orchestre est celui du blues : deux guitaristes électriques, un batteur, un joueur d’harmonica et un joueur de derbouka (percussion) qui fonctionne comme un ajout algérien occasionnel. Hormis le morceau qui évoque la Casbah d’Alger sur des notes de chaabi avec Mohamed Rouane, qui excelle dans le mandole, la musique n’a rien d’algérien. L’architecture musicale d’Iness repose en fait sur le collage d’une voix algérienne sur une musique américano-européenne. C’est la voix qui nous parle et qui nous interpelle, la voix non pas la langue, la voix de la mère et des ancêtres qui s’exprime au-delà des époques, des monts, des rivières et des continents. « Ak-id waligh » (je te verrai) expression prononcée en kabyle, titre d’un lamento dédié aux parents mais qui ne figure pas sur l’album. La langue kabyle se dilue dans la mélodie imposée par l’anglais guttural, langue d’adoption de la chanteuse, il en est de même de l’arabe dialectal. Selon elle « l’arabe, si on y prête attention, ressemble beaucoup à l’anglais ». L’originalité de l’œuvre tient à une quête identitaire qui se réclame de référents universels qui ménagent à la culture locale une place quasi symbolique. Un certain courant de la littérature maghrébine d’expression francophone utilise du reste les mêmes techniques. Iness qui a rappelé sa dette à la radio El-Bahdja où elle avait exercé comme animatrice a interprété aussi « Djazaria » (Algérienne) sa chanson emblématique sur l’Algérie, son pays natal qu’elle a quitté avant d’aller s’installer en France. Mais quand l’enthousiasme veut s’y exprimer, il est porté par les envolées de la musique country… Berbère farouche, Iness nous a transportés à dos d’harmonica à travers une belle balade dans le monde. Ce fut une belle soirée. Notons que l’album dont elle a interprété les titres est disponible au niveau du centre de Riadh El Feth.
L.G.

Par : LARBI GRAÏNE

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