Connu et connaisseur du marché des véhicules industriels algérien, M. Lenz est à la tête de Alltruck Company, distributeur officiel de Volvo Trucks chez nous depuis quelques semaines. Il prend en main une marque qui souffre de carences au niveau du réseau de distribution mais qui dispose d’atouts indéniables en matière de fiabilité de ses modèles et du potentiel du marché lors des cinq prochaines années. Fort d’une expérience soutenue chez Renault Trucks, M. Lenz prend le taureau par les cornes et nous explique sa stratégie à la tête de Alltruck Company.
Midi Libre : Fraîchement installé à la tête de Altruck Company mais fin connaisseur du marché algérien, quel constat faites-vous de la situation de Volvo Trucks en Algérie ?
M. Marco Lenz : Le constat aujourd’hui pour Volvo en Algérie est qu’il y a un potentiel non négligeable qui n’a pas été suffisamment exploité par rapport à la croissance du marché en raison de l’organisation du réseau qui n’est pas suffisamment développée sur les points stratégiques à travers le territoire national. Il est nécessaire aujourd’hui de rattraper notre retard rapidement et saisir toutes les opportunités qui vont, désormais, se présenter avec les nouveaux programmes d’investissement des autorités pour le prochain programme quinquennal. Notre objectif aujourd’hui est de mettre en place un réseau de distribution aux normes et aux standards de Volvo. Je tiens à rappeler que Volvo est le deuxième constructeur mondial de camions. Nous devons, donc, être à la hauteur du rang que tient Volvo à travers le monde dans le domaine du poids lourd.
Comment voyez-vous la 4e édition du Salon international des véhicules industriels ?
Je dirais un peu en demi-teinte avec un marché qui a l’air de baisser surtout sur le segment du poids lourd. Cette année encore, le secteur a énormément souffert. On ressent une certaine réticence des clients à faire des commandes sur ce salon, ce qui ne veut pas dire que le salon ne génère pas d’opportunités et des commandes qui peuvent se concrétiser ultérieurement.
Quelles sont les nouveautés que votre marque dévoilera dans les mois à venir ?
Nous lancerons en début janvier 2011 le nouveau FMX. C’est donc une déclinaison du camion chantier FM avec une plus grande garde au sol et certains éléments qui vont intéresser les entreprises qui opèrent dans des chantiers difficiles. L’idée était de développer un camion plus adapté aux conditions très difficiles. En Algérie, nous avons des clients qui travaillent dans des domaines assez accidentés et très difficiles ; ce camion leur sera l’outil idéal pour réaliser les chantiers qui s’annonceraient dans les prochains mois avec le nouveau programme d’investissement.
Entre le dernier-né de Volvo (le FMX) et les modèles à moteur Euro 3 commercialisés en Algérie, comment comptez-vous diriger Volvo Trucks dans un marché aussi particulier ?
Ce qui va nous différencier nous, ce sont la qualité et la fiabilité du produit qui est déjà réputé, sans oublier la qualité qui est un challenge que tout le monde aujourd’hui affronte. C’est sur ce plan-là que nous devons nous battre pour être les meilleurs, ce qui suppose une organisation qui soit capable d’animer et supporter le réseau en termes de formation et de process. Mais également la mise en place des personnes aux bons endroits pour permettre à cette stratégie d’être gagnante parce qu’aujourd’hui ce sont les hommes qui font la différence. Ce sont les hommes qui permettent à une marque de remplir et de satisfaire pleinement les attentes des clients. Ces derniers deviennent aussi de plus en plus exigeants, ce qui est tout à fait normal. Aussi, les conditions de circulation s’améliorent avec l’amélioration du réseau routier, donc la profession du transport se professionnalise et les clients deviennent plus exigeants et on veut être à la hauteur en termes de disponibilité de la pièce mais également avec la qualité de service. Les clients aujourd’hui ne peuvent pas attendre que leur camion soit réparé en 4 ou 5 mois, ce qui compte aujourd’hui, c’est la mobilité du matériel. Nous vendons un outil de travail, donc il faut que le client puisse terminer son chantier dans les délais. Nous devons être mobilisés pour permettre au client d’atteindre ses objectifs.
Lors des deux dernières années, le marché a connu l’arrivée de nouveaux constructeurs européens et la réorganisation d’autres au milieu d’une offensive des constructeurs chinois ; comment voyez-vous Volvo Trucks au milieu de tout cela ?
L’arrivée des marques chinoises se traduit par un dévoiement du concept de l’investissement parce que nous vendons un outil industriel qui s’amortit sur une certaine durée, et pendant ce temps-là, il rapporte des bénéfices à l’utilisateur. On a vu arriver les Chinois qui cassent les prix avec une qualité qui ne répond pas aux normes. Sur ce plan, bien évidemment, on se caractérise par la qualité de nos produits parce que nous nous inscrivons dans la durée. Nous sommes un groupe qui s’intéresse à toutes les questions liées à l’environnement, l’écologie. Donc, le concept du camion jetable ne répond pas à ce type de préoccupations. Il s’agit d’un produit qui s’inscrit dans le bien-être général. Concernant les marques européennes, nous avons une certaine ancienneté sur le marché. Volvo est quand même le deuxième constructeur mondial. On veut être à la hauteur de notre rang mondial également en Algérie. Nous ne craignons pas la concurrence de nos collègues.
Il semblerait que Volvo met en avant de plus en plus de camions équipés de boîtes de vitesses automatisées ; pourquoi un tel positionnement ?
Dans le cadre du service, ce qui compte bien entendu pour le client, c’est le coût de l’exploitation. Aujourd’hui, la boîte mécanique est beaucoup plus sujette à des arrêts en atelier. Ceci pourra avoir un impact sur le régime moteur. Nous essayons, donc, de promouvoir la boîte semi-automatisée ‘’I-Shift’’ pour permettre aux clients d’être plus efficaces et plus rentables dans l’exploitation de leur matériel. C’est-à-dire une maintenance plus maîtrisée et également un régime moteur plus contrôlé pour moins de consommation dans l’intérêt du client. A travers cette solution, on veut contribuer au succès de nos clients en leur permettant de mieux maîtriser leurs coûts d’exploitation. Et ça se passe également par le package (forfait) dans la maintenance que nous allons aussi lancer dans le cadre du réseau que nous sommes en train de mettre en place. Aujourd’hui, notre faiblesse c’est une présence insuffisante géographiquement. Nous allons développer le réseau sur le territoire pour permettre aux clients d’être plus proches des points de service des ateliers de notre réseau.
Allez-vous opter à l’avenir pour la commercialisation exclusive des camions automatisés ?
On gardera dans un premier temps la boîte mécanique parce que le marché algérien ne s’est pas encore habitué à la boîte automatique, mais nous voyons certains clients même dans le public demander maintenant la boîte automatique. On va vraiment déployer tous nos efforts pour promouvoir la boîte semi-automatisée «I-Shift». Lorsque le client verra l’intérêt que va représenter pour lui-même le léger surcoût à l’achat vu qu’il rattrapera largement dans l’exploitation de son matériel. On va essayer vraiment de rendre les véhicules plus économiques. Une boîte automatique pour un chauffeur représente moins de manipulation dans le levier de vitesse, donc une bonne concentration sur la route, le tout va dans l’intérêt des usagers de la route.
Comment voyez-vous la fin de l’année dans une conjoncture assez particulière ?
Par rapport à 2009, on évalue la chute du marché entre 10 et 15%. Jusqu’à fin août, on a une chute du marché de près de 12% par rapport à la même période de l’année précédente. Vu la tendance actuelle, on a plutôt le sentiment que le marché va redémarrer en début de l’année prochaine parce que nous avons des clients qui préfèrent faire des livraisons à partir de janvier. On est plutôt dans une phase d’attentisme. On attend que les projets démarrent. Il y a aussi le projet de l’autoroute des Hauts- Plateaux qui va démarrer en janvier. Il y a plein d’autres projets qui vont être lancés au courant de l’année prochaine. Au premier trimestre, on verra normalement une reprise du marché.
Quel est le segment qui pousse le plus chez Volvo ?
Notre force sont les tracteurs puisqu’ils représentent 98% de nos ventes. Notre activité principale est dans le tracteur, cela ne veut pas dire que nous nous désengageons du porteur. On veut développer ce segment avec l’arrivée du FMX. Nous espérons atteindre dans les 3 à 4 années à venir 20% de nos ventes en porteurs. Aujourd’hui, nous sommes seulement à 2 ou 3%.
Qu’en est-il aujourd’hui de l’autre activité de Alltruck Comapny, en l’occurrence Volvo Penta ?
Nous venons de constituer une équipe entièrement nouvelle qui a commencé à travailler en juillet dernier. Elle est très récente parce que nous avons constaté que nous avons un grand parc de Volvo Penta en Algérie qui n’est pas correctement suivi par l’ancienne équipe. Donc, on a renforcé les équipes techniques et les équipes technico-commerciales pour offrir un service digne de cette marque. Nous allons également développer l’activité nautique parce qu’il y a énormément de bâteaux de plaisance qui ont besoin d’un service répondant aux exigences et aux normes de cette marque. C’est un axe qui va être développé par une équipe jeune, dynamique, motivée et professionnelle.
Un dernier mot…
Nous espérons que l’activité redémarrera l’année prochaine. En tout cas, Volvo sera là pour répondre aux attentes de nos clients qui attendent un service dans les endroits stratégiques du pays. Nous allons ouvrir des points de vente dans les prochains mois à Oran, Sétif, Batna et Ghardaïa.