Si les années 70 ont vu la suprématie algérienne du Septième art maghrébin («Chronique des années de braise», palme d’or à Cannes en 1975), les années 80 ont laissé place à la cinématographie tunisienne qui a révélé une génération très talentueuse (Nouri Bouzid, Mohamed Benmahmoud, Moufida Tlatli, Ferid Boughedir).
Depuis 15 ans, c’est le Septième art marocain qui a conquis le leadership grâce à une politique volontariste et organisée qui doit beaucoup à la personnalité de Nourredine Saïl, l’actuel directeur du Centre de la Cinématographie Marocaine : 15 longs métrages produits en 2009, ainsi que 70 courts métrages. Ce choix, consistant à se donner les moyens d’une industrie cinématographique, a nécessairement débouché sur l’émergence de nombreuses œuvres de qualité sur lesquelles le Maghreb des films 2010 ne pouvait faire l’impasse. Aux talents confirmés que sont Daoud Aouled-Syad («La Mosquée») et Hassan Benjelloun («Les Oubliés de l’histoire») est venu s’ajouter un jeune auteur au patronyme déjà connu. Hicham Ahouch («Fissures») est, en effet, le frère cadet de Nabil («Ali Zaoua, prince des rues»).
Par l’audace de son sujet - une histoire d’amour à trois personnages – et son «écriture», très physique et qui emprunte beaucoup au style de John Cassavetes, «Fissures» apparaît comme une sorte d’OVNI dans le ciel du cinéma arabe ; le premier jalon d’une «nouvelle vague», comme le fut ici, en son temps «A bout de souffle», avec lequel il entretient plus d’une similitude stylistique et narrative.
Cette montée en puissance de la cinématographie marocaine ne pouvait que nous inciter à plonger au cœur de son histoire en interrogeant à travers quelques films-phares («Traces», «Adieu Forains», «Marock», «Amours voilés» entre autres) l’évolution de la tradition à la modernité sur une période de 40 ans. La Tunisie et l’Algérie produisent moins de films. Elles ne sont toutefois pas oubliées.
D’Algérie, avec «Essaha» («la Place») de Daoud Dahmane Ouzid, nous vient la première comédie musicale produite par ce pays ainsi que le Panaf 2009 («Africa is black» et «L’Afrique vue par …» des cinéastes du continent africain dont Rachid Bouchareb – même s’il est Français -, Abderrahmane Sissako ou Mama Keita qui seront présents à Paris
Un coup de projecteur à caractère historique sera donné sur la ville d’Alger en tant que sujet cinématographique – des bandes des frères Lumière jusqu’à «Omar Gatlato» ou «La bataille d’Alger» en passant par les collections Albert Kahn et le mythique «Pépé le Moko», occasion sera donnée de suivre le parcours cinématographique d’Alger la blanche, revue et révélée par les yeux de cinéastes et d’opérateurs d’origine et de nationalités diverses.
Un portrait consacré à Rachid Boudjedra, l’une des meilleures plumes de la littérature algérienne contemporaine, établit la relation qui s’instaure entre sa vie personnelle et son œuvre publique.
Côté «Carte blanche à …», on retrouvera un autre Algérien, Malek Bensmaïl, dont le dernier opus télévisuel «La guerre secrète du FLN en France», sorte d’écho au «Hors la loi» de Rachid Bouchareb, confirme le talent d’un documentariste dont plusieurs autres réalisations seront montrées.
L’autre carte blanche va à Philippe Faucon, natif d’Oujda, qui, outre son film sur la guerre d’Algérie («Trahison»), ne cesse d’explorer la réalité et l’histoire de l’immigration maghrébine en France. Quelques extraits de «Le fils perd» qui traite de la dérive islamiste d’un jeune beur et qui sortira en salle à Parisen 2011 seront montrés aux heureux spectateurs du samedi 6 novembre..