Le Midi Libre - Culture - «La littérature féminine ne se définit pas»
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Edition du 20 Octobre 2010



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Maïssa Bey, au Midi Libre
«La littérature féminine ne se définit pas»
20 Octobre 2010

Maïssa Bey est née en 1950 à Ksar El- Boukhari. Elle est essayiste, poétesse et romancière d’expression francophone. Elle a écrit, entre autres, «Au commencement était la mer» (roman, ed. Marsa, 1996), «Cette fille-là» (roman, ed. l’Aube, 2001) (Prix Marguerite Audoux), «Puisque mon cœur est mort» (ed. l’Aube, 2010), «Surtout ne te retournes pas» (roman, ed. l’Aube et Barzakh, 2005) (Prix Cybèle 2005), «L’une et l’autre» (essai, ed. l’Aube, 2009). Nous l’avons rencontrée hier à l’Institut national supérieur de musique d’Alger où elle participait à la manifestation culturelle réunissant des écrivaines du Maghreb et d’Europe.

Midi Libre : Alors… vous êtes établie en France ?
Maïssa Bey : En fait c’est un mythe, je ne sais pas qui, et pourquoi on me fait traverser la Méditerranée. Non je vis en Algérie, je vis à Sidi Bel-Abbès, où j’ai exercé une profession jusqu’à il y a quelques années, j’ai ma vie, j’ai ma famille, j’ai ma maison, mais je suis assez souvent en France, je suis très souvent invitée dans des manifestations où l’on fait parler les femmes et les écrivains, donc c’est peut-être ça qui a induit un peu les gens en erreur et qui fait penser que je suis en France.

Certains même vous considèrent comme une écrivaine beur
Oh la la, (éclats de rires). Non non, ya khouya (ô frère en arabe)

Si je vous demande de me définir un peu ce que c’est la littérature féminine, est-ce qu’elle existe ?
Oh la la. Vous savez il y a des centaines et des centaines d’ouvrages qui essayent de définir la littérature féminine, je n’aime pas les catégorisations, j’ai un très gros problème avec les catégorisations, parce que si on devait nous définir nous, on nous classerait dans la littérature féminine algérienne maghrébine d’expression française. Il faudrait faire plusieurs catégories, la littérature féminine, en fait, ne se définit pas. Je serai d’accord qu’on définisse la littérature féminine si lorsqu’un écrivain homme écrit, on dit tient ça c’est de la littérature masculine, ça on ne le dit jamais. Une littérature écrite par des écrivains femmes est effectivement une littérature féminine, mais elle n’a pas de code précis, elle n’a pas pour objectif de se différencier de la littérature masculine.

Est-ce que les conditions qui sont faites aux femmes écrivaines sont toujours les mêmes que par le passé ?
Je peux parler de chez nous, de ce que je connais, c’est vrai que les femmes qui osent investir l’espace public, l’espace de la parole, qui osent se dire ou dire tout simplement, sont plus ou moins en rupture de ban dans une société qui ne supporte pas la prise de parole féminine. Ça on le sait. Dans une société comme la nôtre, qui est la société maghrébine, y compris le Maroc et la Tunisie, on sent aujourd’hui qu’il y a de plus en plus de femmes qui ont investi l’espace de la parole, non seulement de la parole politique puisque nous avons des femmes engagées en politique, mais aussi de l’expression et de la création. Vous avez des chanteuses, des artistes qui mettent en valeur leurs opinions, leurs manières de réagir, leurs relations au monde, je crois quand même que c’est assez important. Maintenant je ne crois pas que lorsqu’on a une maison d’édition, on va privilégier plutôt les femmes que les hommes, ou les hommes que les femmes, je ne crois pas, je ne pense pas que la question se pose en ces termes-là. Aujourd’hui la question qui se pose est jusqu’où peut aller la littérature féminine, dans l’expression de soi, dans l’expression de la relation qu’elle a avec le monde. Est-ce que les femmes peuvent tout dire ? C’est ça le problème.

Quelle est votre écrivain(e) algérien(ne) préféré(e) ?
Sans conteste c’est Assia Djebar, c’est une femme qui m’a énormément apporté sur le plan de l’écriture parce que je trouve qu’elle a une écriture magnifique, et sur le plan des thèmes qu’elle a osé aborder, et qui lorsque j’étais jeune et que je la lisais, me semblait être vraiment une transgression totale de l’ordre établi dans ma famille et dans mon milieu.

Votre préféré (e) étranger ?
Il n’y en a pas particulièrement. Je suis une très grande lectrice, je suis une lectrice boulimique, mais j’aime beaucoup l’écrivain français Pierre Michon, c’est quelqu’un qui allie aussi bien le style que la manière de faire passer les choses, cet écrivain contemporain n’est pas très connu mais je trouve sa manière d’écrire et ce qu’il écrit, comme si c’était fait pour moi.

Par : LARBI GRAÏNE

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