La fermeture de la plupart des boulangeries au premier jour de Aïd el-Fitr et l’absence de pain dans les corbeilles que tous les épiciers remplissaient "à craquer" durant le mois sacré ne sont pas vraiment des problèmes pour les familles batnéennes.
Une des traditions les plus observées à l’occasion de le fête de l’Aïd par les mères de famille de la capitale des Aurès et dans les régions avoisinantes demeure, en effet, la préparation du pain traditionnel, "Khobz ed-dar" (littéralement "pain de la maison") qui garnira la table après avoir été pris au tout premier petit-déjeuner après un mois de jeûne.
Cette tradition "impose" ainsi à la femme, qu’elle soit travailleuse ou mère au foyer, de préparer ce pain spécial dont la recette repose sur l’utilisation de semoule mélangée à de l’huile de table, de la levure, du lait et de l’eau de fleur d’oranger. La pâte, une fois bien levée, est divisée en deux gros morceaux aplatis pour former des disques dont la surface est badigeonnée de jaune d’œuf et décorée de grains de nigelle (sinoudj) avant d’être cuites au four à la maison ou envoyées pour la cuisson chez le boulanger du quartier.
Cette dernière opération suscite d’ailleurs une animation toute particulière, parfois jusqu’à une heure tardive de la nuit, la veille et l’avant-veille de l’Aïd, devant les boulangeries dont le sol est abondamment jonché de plateaux de toutes tailles amenés là, généralement, par des enfants qui créent une ambiance tout en "piaillements".
Moins nombreuses sont les femmes qui préfèrent faire cuire leur pain chez elles, dans des fours électriques. Le goût ne sera cependant pas identique à celui du pain cuit chez le boulanger, assure Ahmed R., un boulanger de la cité populaire de Kechida qui souligne qu’en pareilles occasions, nombre de boulangeries se consacrent exclusivement à la cuisson des gâteaux et de khobz ed-dar préparés par les ménagères.
Pour Mme Hadda S., mère de famille, Khobz ed-dar, dont la saveur demeure intacte pendant plusieurs jours, à condition que le pain soit soigneusement conservé "dans des serviettes en tissu", permet, en outre, de "se passer, ce qui n’est pas plus mal, du pain de boulanger qui devient d’ailleurs introuvable durant les journées de l’Aïd".
Signe d’attachement aux us et coutumes de leurs aïeuls, la préparation des plats traditionnels, dont Khobz ed-dar ou encore le couscous de l’Aïd, demeure une pratique bien ancrée dans les mœurs des femmes de cette région.
APS